Films d’hier et d’aujourd’hui
4 juillet 2014 par Bertrand Tavernier - DVD
L’IMAGE MANQUANTE est un choc. Me frappe une fois encore la dignité, la retenue du regard de Rithy Panh. Et cette idée miraculeuse d’évoquer par des figurines ces images qui manquent, cette mémoire qu’on a voulu occulter, bafouer avec la complicité de quelques beaux esprits et journalistes européens. A voir absolument. Complément indispensable à S21.
Je profite de la sortie du dernier film d’Hiner Saleem, MY SWEET PEPPER LAND, qui m’a un peu déçu, avec quelques passages réjouissants, malgré (ou à cause) de ses références westerniennes qui m’ont semblé scolaires, pour rappeler ses précédentes œuvres dont le ton est assez unique, VODKA LEMON et SI TU MEURS JE TE TUE.
De même la sortie des TROIS SŒURS DU YUNNAN de Wang Bing m’a fait réaliser que je n’avais jamais mentionné À L’OUEST DES RAILS, un des films les plus étonnants, les plus passionnants de ces dernières années.
On a beaucoup dit qu’ÉPOUSES ET CONCUBINES (très beau Blu-ray) de Zhang Yimou était un film académique. Il est vrai que tous les plans sont tirés au cordeau, centrés, composés avec un soin infini, parfois pesant. Mais la réalité est plus complexe. On peut aussi y voir le désir du metteur en scène de restituer visuellement un ordre hyper ritualisé, où tout semble prévu, ordonné, dirigé d’une main de fer. Le tout dans un décor épuré, géométrique, qui ne laisse aucune place à l’improvisation et au désordre. Les personnages doivent s’asseoir là ou c’est prévu et les cadrages entendent capter le poids de tout ce système. Et à l’intérieur de cet ordre, Zhang Yimou se permet des audaces qui le perturbent : des personnages sont exclus du cadre (la belle mère qui scelle le sort de l’héroïne), le maitre des lieux est le plus souvent filmé de loin ou de dos. On ne nous montre pas vraiment son visage, audace discrète et payante. Ce sont les victimes qui ont droit au gros plan. La mise en scène se contente de l’intégrer au décor sans lui donner de substance charnelle. Il n’est en fait que l’exécutant quasiment anonyme d’un système oppressif. Et je suis toujours touché par la découverte progressive des différentes maisons, des terrasses. Il y a là quelques plans larges de toute beauté, quand la troisième épouse chante sur les toits.
J’ai été plutôt déçu par THE MURDERER de Hong-jin Na qui m’a paru en retrait sur THE CHASER, après un bon début. L’action s’embourbe dans des poursuites interminables où l’on brise des centaines de vitres, qui deviennent de plus en plus invraisemblables. L’accumulation des morceaux de bravoure étouffe la tension.
Et comme le rappelait Ballantrae, on peut trouver chez Bach films en complément de HAMLET de Kozintsev (l’une des plus belles adaptations de la pièce avec celle de Laurence Olivier), LA CHUTE DE SAINT PETERSBOURG (sans la partition d’origine de Chostakovitch je crois) co-dirigé comme LE TRAIN MONGOL avec Trauberg, DON QUICHOTTE qu’il réalise seul comme LE ROI LEAR.
FILMS FRANÇAIS
J’ai revu avec un réal plaisir le POIL DE CAROTTE, version parlante de Julien Duvivier. On est saisi par la beauté de certaines idées de mise en scène, certains raccourcis fulgurants. Une manière aussi d’intégrer la nature au propos, dans les quelques rares moments de paix (il y a de fulgurants travellings précédants ou suivants la carriole). Duvivier va souvent droit à l’essentiel, supprime les plans d’introduction, de description (l’ouverture est très forte) qu’affectionnent 90% des réalisateurs de l’époque. L’interprétation tenue, mesurée de Harry Baur, sa manière de parler bas, sans détacher les phrases, sans les projeter, de ne pas paraître écouter est d’une modernité absolue. En revanche comme souvent l’actrice qui joue Mme Lepic (Catherine Fonteney), effrayant personnage, souligne trop sa dureté, l’explique au lieu de la solder. Les gros plans renforcent ce défaut alors que dans certains plans larges, elle dramatise moins. Christine Dor est, elle, très juste, en Annette.
Il est regrettable que le CAFÉ DU CADRAN de Jean Gehret, en fait Henri Decoin, et LA FILLE DU DIABLE toujours de Decoin ne soient disponibles qu’en VHS. Le premier est une excellente chronique unanimiste, populaire, écrite par Pierre Bénard, le directeur du Canard enchainé, le second est un film étrange, noir, poétique qui commence par une étonnante scène de fusillade, une sorte de Fort Chabrol, sans pratiquement aucun dialogue. Puis le ton change et oblique vers une rêverie mélancolique sublimée par la présence d’Andrée Clément, actrice rare et émouvante. Magnifique musique, excusez du peu, de Henri Dutilleux (qui écrit aussi un petit air de jazz pour le CAFÉ DU CADRAN). Cela devrait suffire pour donner envie de voir ce film sur lequel Paul Vecchiali a écrit un beau et chaleureux texte enthousiaste.
J’ai revu avec un bonheur infini CASQUE D’OR, chef d’œuvre absolu. La concision dense de la mise en scène, son appréhension de l’espace (le décor du duel), la peinture très aiguë, sans clichés, sans commentaire du milieu des « apaches », des marlous et des prostituées (regardez comment Becker épingle le machisme des truands et regarde les femmes), le dialogue incroyablement épuré, net, précis, la rapidité de la narration (influence si bien assimilée du cinéma américain tout en gardant un regard français), tout cela en font un de mes films favoris. Très belle musique de Georges Van Parys. Dans un autre registre, RENDEZ-VOUS DE JUILLET possède des qualités identiques dans un registre en apparence plus léger.
Il est réjouissant de voir comment Guitry tord le cou à tant de clichés qui paralysent les biopics dans LA MALIBRAN. L’ouverture du film notamment est un triomphe d’invention, de légèreté, d’ironie souriante. Guitry atomise les points de vue, brise la narration avec une invention étonnante. Le plan ou Jeanne Fusier-Gir explique dans l’escalier qu’ils « percent le masque » est une merveille tout comme l’entrée de Guitry dans le film. Ce dernier interprète, fait assez rare, un personnage assez noir voire méprisable, maquereau, maitre chanteur. La scène où il est démoli par La Fayette est des plus réjouissantes.
Je crois n’avoir jamais dit tout le bien que je pensais de MAIGRET TEND UN PIÈGE de Jean Delannoy. A commencer par le scénario du au critique R.M. Arlaud, à Delannoy et à Audiard qui signe là d’excellents dialogues (la crise de colère de Maigret mais aussi des moments plus mesurés où affleurent le doute et l’émotion). Gabin campe un magnifique Maigret et cela dès le premier plan. Il nous fait comprendre par sa démarche, ses gestes, une façon d’entrer dans une cuisine, la fatigue du personnage, la manière dont ces meurtres l’atteignent. Delannoy utilise adroitement le décor, ces rues qui longent la place des Vosges. Très efficace reconstitution du Marais en studio avec une belle et originale utilisation de la musique de Paul Misraki : la chanson qu’on entend à la TSF et qui ponctue les errances d’un inspecteur et celles de l’assassin. Magnifiques interprétations de Jean Desailly, acteur simenonien par excellence et d’Annie Girardot.
Je vais aussi revoir MAIGRET ET L’AFFAIRE SAINT-FIACRE, histoire plus intime, voire quasi autobiographique de Maigret qui revient sur sa jeunesse et qui m’avait tout aussi plu en attendant un DVD du GARÇON SAUVAGE dont j’ai une bon souvenir.
A propos de Resnais, j’ai aussi revu STAVISKY que j’ai toujours trouvé sous-estimé même si le scénario de Semprun reste superficiel (le rôle d’Arlette n’est pas le mieux écrit). Il y a dans tout le film une élégance, une intelligence narrative. Une manière de sans cesse briser la chronologie. Belmondo est bien meilleur qu’on a voulu le dire mais la palme revient à Charles Boyer, formidable baron Raoul. Très belle musique de Stephen Sondheim et cela dès le générique avec ses pulsations. Très belle valse grinçante, une danse au dessus d’un volcan. Ce qu’est le film.
CINÉMA ANGLAIS
J’ai adoré CHAUSSURE À SON PIED de David Lean. Je ne sais pas pourquoi, je n’ai jamais voulu voir ce film. Ce qui était stupide. Il s’agit d’une des meilleures comédies de l’époque avec un Charles Laughton délectable, dans ses colères, son entêtement, ses injustices, son refus de voir la réalité. La vision des rapports hommes/femmes met à mal certains clichés qui encombrent le cinéma anglais. Ici les hommes sont montrés comme étant beaucoup moins intelligents, créatifs que les femmes même quand ils excellent dans leur métier. C’est en se mariant que John Mills évolue et prend de l’assurance. A noter que David Lean est sans doute le metteur en scène qui aura le mieux utilisé Mills à deux reprises, ici et dans LA FILLE DE RYAN.
On ne trouve, hélas, que des VHS de THE SPIDER AND THE FLY de Robert Hamer, œuvre perçante, aiguisée, ironique avec un élan romantique qui se cache derrière une narration rapide, un regard apparemment sceptique. Le début avec toute une série d’ellipses et de magnifiques plans de nuit (une des constantes de ce film) est foudroyant. Et la vision de Paris avec cette suite d’immeubles haussmanniens ou 18ème, fort réussie. Le scénario s’inspire je crois d’un fait divers qui s’acheva durant la guerre de 14. Un perceur de coffre fut engagé par le gouvernement pour dérober des papiers importants. Eric Portman est épatant dans le rôle de l’inspecteur qui cherche désespérément à coincer le cambrioleur (Guy Rolfe, le plus immense des acteurs britanniques dont le charme est sidérant). Nadia Grey fait de jolis débuts et le traitement de son personnage est exempt de toute misogynie comme toujours chez Hamer. A découvrir absolument.
Plusieurs des critiques français parlant de LA FOLIE DU ROI GEORGE (Koba) ne citent même pas le nom d’Alan Bennett le scénariste du film tiré de sa pièce. C’est pourtant lui qui impose ce regard acéré, décapant, ironique, cultivé sur cet épisode rocambolesque de l’Histoire de la monarchie anglaise. Quels que soient les mérites de la mise en scène très honorable de Nicholas Hytner, le ton du film est celui de Bennett, génial dramaturge dont j’ai vanté ici les magnifiques, drolatiques, poignants monologues de femmes (à ma connaissance il n’y a qu’un seul homme dans tous ces portraits) filmés par la BBC dans TALKING HEADS 1 et 2 (ils ont été traduits par Jean-Marie Besset sous le titre MOULINS À PAROLE et montés souvent au théâtre), le scénario de PRICK UP YOUR EARS de Stephen Frears. J’adore aussi son roman, LA REINE DES LECTRICES, désopilante apologie de la lecture avec une inoubliable ouverture durant laquelle la Reine Elizabeth demande à Nicolas Sarkozy ce qu’il pense de Jean Genet.
La FOLIE DU ROI GEORGE est un film merveilleusement écrit et dialogué (« il fait froid comme dans le museau d’un chien de chasse »), avec une intelligence, un sens du raccourci qui font mouche et donnent aux différents acteurs une partition éblouissante sur laquelle ils peuvent broder les variations les plus délectables : Nigel Hawthorne est bien sûr splendide mais on ne saurait oublier Ian Holm, Rupert Everett (Prince de Galles incroyablement maléfique), Helen Mirren (les rapports entre le roi George, le seul à n’avoir jamais eu de maîtresse, et la reine Charlotte sont particulièrement touchants). Aucune pesanteur idéologique dans cette description ironique, sceptique de la Monarchie, de l’étroit fossé qui oppose William Pitt à Fox, candidat réformateur qui veut abolir l’esclavage (ce qui ne soulève pas le moindre enthousiasme chez le prince de Galles). Tout d’ailleurs dans ce film paraît contemporain. Et le moment magique où Bennett fait se rencontrer l’Histoire au présent avec Shakespeare donne lieu à une séquence mémorable. Nicholas Hytner réussit son premier film même s’il veut trop parfois nous faire oublier les origines théâtrales dans une débauche de travellings et de très gros plans parfois insistants.
CINÉMA AMÉRICAIN
THE EAGLE de Clarence Brown (Bach films). Sans doute la meilleure adaptation du roman de Pouchkine (1841), supérieure même à la version de Freda (mais pas à LA VENGEANCE DE L’AIGLE NOIR). Le début, elliptique, rapide, avec de brillants travellings qui voit Dubrovsky sauver une jeune fille dont le carrosse s’est emballé, est éblouissant. Le film mélange avec brio durant la première moitié l’aventure, la romance et surtout l’humour (les scènes de séduction de la tsarine où les deux tourtereaux font semblant de boire l’alcool.). Il y a de nombreux détails charmants ou drolatiques (la réaction d’un témoin en fond de plan qui commente l’action). Et de jolies idées visuelles comme ce court travelling avant dépassant les personnages et avançant légèrement vers une fenêtre ou va poindre le jour. Sans oublier les moments d’action où l’on retrouve le Clarence Brown qui dirigeait de magnifiques de seconde équipe chez Maurice Tourneur : ainsi cette vision d’un carrosse sur une plage, se terminant dans les vagues, meilleure scène du guindé LORNA DOONE (DVD zone 1). Dans la deuxième moitié, le héros pris dans des quiproquos calqués sur ceux de Zorro paraît hélas un peu godiche et le film en souffre malgré une fin amusante.
Pour les amateurs d’histoires sentimentales, je recommande EVANGELINE (1929, Les films du Paradoxe), illustration soignée du poème de Longfellow (le chêne d’Évangeline est l’endroit où Bootsie et Dave Robicheaux scellent leur amour) et l’une des rares œuvres qui évoquent la déportations des Acadiens : l’intrusion des Anglais, les plans de la déportation même s’il édulcorent la réalité, ne manquent pas de puissance. Un film d’ Edwin Carewe qui signe là, la troisième version après celle de Walsh en 1919.
ABRAHAM LINCOLN (Bach Films). Ce film de DW Griffith, meilleur, moins statique qu’on a bien voulu le dire, contient même de fort beaux plans (le travelling d’ouverture, des plongées traduisant la solitude de Lincoln dans la Maison Blanche), des séquences de montage assez nerveuses très inspirées des photos de Matthew Brady et aussi une bataille maladroitement filmée. Le scénario n’évite pas les pièges du « biopic », certains acteurs surjouent et déclament (Una Merkel en Ann Rutledge dont la mort hélas n’est pas ellipsée). Mais Kay Hammond est crédible en épouse de Lincoln, E. Alyn Warren fort bon en Général Grant (étrangement on lui fait jouer aussi Stephen Douglas) et surtout Walter Huston est magnifique en Lincoln. Il donne une vérité profonde au film. On a retrouvé une séquence d’ouverture de quelques minutes décrivant la traite des esclaves avec une grande âpreté comme si DWG voulait revenir sur l’idéologie de Birth of a Nation.
Aux USA, j’ai pu revoir une magnifique copie 35 de PLATINUM BLONDE, un de mes Capra favoris, une des meilleures comédies de journaliste, écrite par le talentueux Jo Swerling avec la collaboration de Robert Riskin. On sent la patte de Capra dans le rythme, la manière de mettre en scène le dialogue, de lui donner une rapidité, une évidence, de faire en sorte qu’il propulse l’action. Une longue scène entre Robert Williams et Jean Harlow semble totalement improvisée. Il faut dire que Robert Williams qui, hélas, mourut quelques semaines après la sortie du film, était un acteur génial qui surclasse même Lee Tracy pourtant inoubliable dans ce genre de personnages. Loretta Young et Jean Harlow sont succulentes. Bref un régal.
Philippe Garnier m’avait donné envie de voir THE DOORWAY TO HELL (Trésor Warner, sous-titres) bien que le metteur en scène soit Archie Mayo, incarnation de la routine la plus plombante. Il faut dire que le film était tiré d’une nouvelle de Rowland Brown (en fait d’une pièce), ce fulgurant auteur réalisateur à qui on doit QUICK MILLIONS, HELL’S HIGHWAY et BLOOD MONEY, tous très durs à trouver en DVD : comme me l’écrit Garnier, « c’est vraiment le compagnon de QUICK MILLIONS, le même ton, le même humour laconique, le même rythme. Le flic joué par Kenneth Thompson (formidable) est un personnage de Rowland Brown. Pour une fois Mayo ne dirige pas comme s’il avait deux pieds gauches. Il y a de l’humour visuel aussi. C’est dur de dire ce qui est du à Zanuck ou à Brown qui travaillèrent main dans la main sur ce film, Zanuck revendiquant la majorité du scénario (l’écrivain crédité et un prête nom) mais on est dans le monde de Brown. On a pu dire que le film avait été coulé par le casting de Lew Ayres et c’est vrai qu’il n’est pas crédible en bootlegger atteint du complexe de Napoléon. Mais dans les moments tranquilles et à la fin, il est fort bon. » Que dire de plus, sinon qu’il y a quand même des scènes assez plates avec le petit frère du héros. L’ouverture avec ses ellipses est typique de Brown et toutes les séquences finales, le dialogue avec le jeune livreur de journaux, avec le flic (le personnage le plus original), ce dîner qu’on vient livrer en ajoutant qu’il est payé et que ce sera le dernier, méritent le détour. La toute fin qui se termine par un plan de la dernière page du livre qu’écrivait le héros, est étonnante.
THE LADY AND THE MONSTER est la première des adaptations du CERVEAU DU NABAB de Curt Siodmak. La copie de Loving the Classics est horrible et ne rend pas justice à la photo de John Alton que l’on devine spectaculaire. Il se permet même des audaces assez naïves comme de changer l’éclairage, la lumière chaque fois que le personnage de Richard Arlen est possédé par le cerveau de Donovan qu’Erich Von Stroheim a ranimé après la mort de ce dernier. La mise en scène de Sherman, plaisante, joue avec les ombres et l’espace, créant une tension surtout dans la première partie. Et cela malgré un scénario écrit à la serpe et surtout l’interprétation décalée, relativement absurde dans sa manière de dire les répliques, de Vera Rhuba Ralston.
Pour les amateurs de sérial, Roland Lacourbe présente la réédition de THE MIRACLE RIDER, le dernier film où joue Tom Mix. Le premier épisode très pro indien convoque Daniel Boone, Buffalo Bill, Davy Crocket qui, tous, tentent de protéger les Indiens. En vain. C’est un western moderne avec des touches de SF. Tom Mix ne manque pas de charme et d’une certaine vérité ce qui paraît surprenant vu les péripéties qu’on lui fait affronter.
Il ne faut pas manquer non plus en zone 1, TUMBLEWEEDS, le dernier vrai western de William S. Hart qui co-réalisa certaines séquences dont l’époustouflante « ruée vers l’Ouest », cette course au lopin de terre qui surclasse les séquences similaires des deux CIMARRON. C’est le grand moment de ce film qui contient des séquences très soignées, avec un souci de vérité cher à William S. Hart. Mais aussi deux ou trois séquences sentimentales ou explicatives très plates avec une fort mauvaise actrice. Pour une réédition en 1939, Hart fit ajouter un prologue très touchant où il parle de son amour pour l’Ouest et les cow-boys. Même l’emphase déclamatoire du ton est émouvante. Ce moment suffit à justifier la vision d’un film dont 40 minutes au moins sont remarquables.
THE MAN I LOVE de Raoul Walsh est un vrai chef d’œuvre dont l’intensité grandit. C’est aussi un film où tous les personnages d’hommes sont faibles, mesquins, velléitaires. Certains sont malades ou blessés. Démunis en tout cas face aux femmes beaucoup plus actives (dans le bien comme le mal). Qu’il s’agisse d’un musicien (étrange choix de le faire jouer par Bruce Bennett, assez payant), d’un truand misérable (Alan Alda). Voir la manière dont Ida Lupino désarme le mari qui veut abattre un gangster et le gifle plusieurs fois, Ida Lupino, magnifique, déchirante qui chante « The Man I love » d’une façon inimitable.
Le charme de THE MASK OF DIMITRIOS opère toujours à chaque nouvelle vision. Bien que le scénario de Frank Gruber ne tire pas le maximum du roman d’Eric Ambler. Il préserve néanmoins certains dialogues délectables : toutes les scènes savoureusement cyniques avec un excellent Victor Francen qui joue ironiquement avec tous les clichés que trimballe son personnage. Et surtout les séquences qui opposent un Peter Lorre, remarquable en écrivain enquêteur qui préfigure le Joseph Cotten de THE THIRD MAN, à Sidney Greenstreet, l’inquiétant monsieur Petersen, lequel énumère constamment des maximes qui exaspèrent Lorre. L’une d’entre elles, qu’il cite plusieurs fois, ponctue sa sortie du film : « I told you sir, there is not enough kindness in the world. » (on la retrouve, via Wayne Shorter, grand cinéphile dans AUTOUR DE MINUIT). La mise en scène de Jean Negulesco brillante, inventive visuellement, avec de multiples plongées ou contre-plongées entraîne le récit à l’écart du film noir typiquement américain, lui donne une saveur plus européenne, un côté Mitteleuropa qui préfigure Carol Reed et le Welles d’Arkadin. L’écrivain enquêteur, restitué avec une grande finesse par un Peter Lorre très attachant, est l’antithèse des héros habituels et ses séquences avec le formidable Sidney Greenstreet ont une saveur tout à fait unique, à part dans la filmographie de ce duo stupéfiant. On sent que Dimitrios est en fait un personnage malléable, sans existence réelle, qui semble chaque fois recréé par ceux qui l’emploient et qu’il imite, idée passionnante. Séquence très marrante de filature dans le métro parisien (Ballard est écrit avec deux l) où le portillon automatique est remplacée par une grille.
THE THREAT de Felix Feist est un film noir tendu, hyper violent qui donne un de ses meilleurs rôles à Charles McGraw en gangster assoiffé de vengeance qui kidnappe le flic et le magistrat qui l’ont envoyé en taule. A ne pas manquer.
Rappeler que Feist avait réalisé, vu aussi à la Cinémathèque, THE DEVIL THUMBS A RIDE que l’on ne trouve qu’en VHS, hélas, qui nous offre comme dans les deux autres meilleurs Feist (THE THREAT et TOMORROW IS ANOTHER DAY) un personnage de méchant mémorable joué par Lawrence Tierney. La tension du film vient moins de ce qu’il fait (un meurtre au début) que de ce qu’on pense qu’il peut faire. On se dit tout le long que l’explosion va être imminente et terrible. La violence, on la sent quand il saoule le veilleur de nuit et là encore, on sait que cela pourrait être pire. La description des policiers n’est pas trop mal venue, exempte de tout prêchi-prêcha et le personnage du jeune pompiste qui se révèle un formidable joueur de poker est plutôt réjouissant. Le dernier quart est moins tenu et la distribution donne de vrais signes de faiblesse. A noter que le criminel n’est pas abattu par le flic qui le pourchasse. Feist signe le scénario et la photo est de Roy Hunt.
Ce film a fait l’objet d’une étude de la part du romancier Barry Gifford, THE DEVIL THUMBS A RIDE AND OTHER UNFORGETTABLE FILMS. Dans ce livre, il qualifie BLUE VELVET de « pornographie académique », ce qui est marrant vu que Lynch adaptera un de ses livres qui deviendra le magistral SAILOR ET LULA. Tous deux collaboreront sur THE LOST HIGHWAY.
4 TUEURS ET UNE FILLE est un agréable western dont j’avais surtout apprécié la première partie et le charme gracile de Colleen Miller. Mais il y a quelques touches bienvenues quand les personnages entrent dans la petite ville (décor Universal ultra classique), un ou deux mouvements de grue assez habiles.
LE FIER REBELLE fut aussi une jolie découverte bien que le DVD sorti par Artus ne rende pas justice à la photo de Ted McCord qu’on devine beaucoup plus belle. On retrouve l’art du découpage qu’avait Curtiz, la façon de jouer avec l’espace, de privilégier des plans larges avec des amorces décadrées, l’utilisation des courtes focales et de la caméra basse. Olivia de Havilland donne une grande vérité, une dignité à un personnage qui aurait pu rester conventionnel et on sent une véritable alchimie entre Alan et David Ladd ce qui décuple la force de cette histoire sentimentale et touchante. Harry Dean Stanton (crédité Dean Stanton) est excellent tout comme Dean Jagger en méchant.
LE SANG DE LA TERRE de Marshall est catalogué comme un « AUTANT EN EMPORTE LE VENT du pauvre » avec une distribution moins éclatante. Il vaut mieux que cela : bien photographié par Lionel Lindon et Winton Hoch, il frappe par ses notations idéologiques plus subtiles. Contrairement à son modèle et à la majorité des films, il n’est pas pro-sudiste. Certains confédérés sont même odieux et se comportent mal (le fiancée de Susan Hayward). Le personnage de Van Heflin, moins flamboyant que Gable, est plus nuancé et il n’incarne pas les valeurs du Sud (il dénonce les propriétaires d’esclaves parmi lesquels son père). Susan Hayward s’ingénie à calquer Vivien Leigh ce qui n’est pas toujours heureux. Mais il y a des péripéties curieuses : ce désir qu’incarne Ward Bond (remarquable) de créer une zone neutre qui ne se soumette ni à l’Union ni aux Confédérés, ce qui les amène à se battre contre ces derniers. Mise en scène classique, parfois routinière, parfois plus exigeante (plans plus longs que d’habitude) de Marshall, certaines des qualités devant être portées au crédit du producteur Walter Wanger.
Je n’ai jamais compris pourquoi THE BLOB (DANGER PLANÉTAIRE) était un film culte au point que Criterion l’avait sorti. Oui, il y a Steve McQueen, qui cabotine et dans certains plans ne sait pas quoi faire mais qui s’en sort grâce au charme, pas totalement étouffé par une photo hideuse et un maquillage trop épais. Le film est bariolé en couleurs flashy (ce qui a du plaire), tourné avec un amateurisme consternant, aussi mal écrit que joué. Je préfère de loin les deux autres réalisations d’Irvin Yeaworth, LES MONSTRES DE L’ÎLE EN FEU et THE 4D MAN dont j’avais dit du bien. Il avait tourné des films religieux avec message social avant de se lancer dans la SF pour revenir ensuite à ses premières amours. Il tourna THE BLOB pratiquement dans sa cour en Pennsylvanie et n’était pas du tout fier du résultat. Il avait raison.
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A propos du FIER REBELLE,j’ajouterais que l’intensité dramatique ne se relâche jamais, ce qui crée une tension tout au long du film plutôt rare dans les westerns.
Coucou, cet article m’apparait très enrichissant. Les Ateliers Peeling fournis des peelings TCA et AHA professionnels à Lyon à prix cassé.
à Bertrand: je suis moins sévère que vous sur DOORWAY TO HELL mais c’est grâce à vous que l’ai vu! Je trouve que Lew Ayres est bon du début à la fin et je me trompe ou est-ce que les gros plans étaient beaucoup moins utilisés à l’époque sur les seconds rôles? Car en ajoutant une qualité de master exceptionnelle donc une image superbe je me suis régalé visuellement avec les nombreux portraits de gangsters en gros plan ou à la taille (américain?). Ayres force un peu son jeu avec ces fameux regards non pas caméras mais dans le bas de l’objectif qui semble afficher un certain strabisme et trouble le spectateur. L’actrice principale n’est pas très excitante mais tous les gros durs sont étonnants. Il n’y a pas une note de musique mais au générique un « general music director » avec le Vitaphone Orchestra, ils ont dû paumer la bande musique! Le premier plan est déjà le début de l’histoire pas d’intro ne perdons pas de temps, formidable. Les scènes avec le petit frère sont-elles si plates, bon mais elles sont courtes! Mais est-on sûr que c’est Mayo qui a dirigé ce film? En tout cas dans le livret H Frappat lui attribue aussi LITTLE CAESAR c’est Mervin Le Roy, de même Frappat relate faussement la première scène avec l’échange sur la boîte à violon. J’ai l’impression que certains critiques se fient trop à leur culture et souvenirs négligeant de varifier. Grand film.
A MB
Je pense que le film doit beaucoup ç Rowland brown à une époque ou les réalisateurs comme Mayo suivaient fidèlement les scénarios et brown devait inclure des indications visuelles. Le film est en tout cas moins terne, moins plat que la plupart des mayo
à Bertrand: et vous (ou Brion) avez dit qqpart dans un bonus que le scénario pouvait être signé par le réal (ou je l’ai lu)! merci pour la découverte!
à propos de textes de critiques, dans le livret du BANDIT, on en lit des pas mal (un coq aux pieds de Betta St John quand elle prend sa douche! Un COQ??!!!) d’ailleurs c’est pas signé… mais relisez-vous messieurs! et revoyez les films pour une mémoire fraîche!
Je me risquerai à affirmer, tout en connaissant très mal sa filmographie assez pletorique, que l’excellent film sur le Ku Klux Klan BLACK LEGION soit son meilleur film; selon imdb Michael Curtiz aurait par ailleurs participé a la realisation. SVENGALI a aussi une très bonne reputation, notamment chez Carlos Clarens si je me rappelle bien (je viens de voir le TRILBY de Tourneur père qui m’a paru decevant, du moins dans ma copie DVD) et on pourra peut-etre faire des petites decouvertes dans sa periode pre-code (son CONVENTION CITY fut meme interdit à jamais car, parait-il, trop osé…), quoique THE MAYOR OF HELL m’ait paru assez mou. Qu’est-ce que vous en pensiez?
A Mario Calandrella
J’aime bien les effets du hasard : hier soir, j’ai visionné PETER IBBETSON, d’Henry Hathaway. Dans les suppléments, il y avait un passionnant regard croisé Bertrand Tavernier-Noel Simsolo. Ce dernier, à propos de George Du Maurier, évoque SVANGALI, adaptation d’Archie Mayo mais aussi TRILBY, version muette qu’il attribue à George Fitzmaurice (je n’ai pas vérifié)et non à Tourneur.
à A Angel: Svengali est le nom du méchant hypnotiseur et Trilby celui de sa victime chanteuse d’opéra! Il y a au moins 5 versions muettes dont des cmétrages mais j’ai pas trouvé une de Fitzmaurice, pas mal de versions parlantes, aussi.
Pour fêter la vision imminente de THE MAN I LOVE, que je n’ai jamais vu, j’ai chiné un peu dans la filmo 40’de Raoul Walsh, histoire de me mettre un peu dans l’ambiance. J’aurais pu me repasser MANPOWER, THEY DRIVE BY NIGHT ou HIGH SIERRA. Et bien non, j’ai opté pour la propagande anti-nazie. A commencer par NORTHERN PURSUIT, seul Walsh/Flynn que je ne connaissais pas. Curieux croisement de propagande et d’aventures à la Jack London, le postulat, qui profite du talent technique de la Warner et d’un certain panache graphique, condamne le film à l’anecdotique, la faute à un script cornichon qui nous montre des Allemands construire un bombardier en assemblant des pièces préalablement stockées dans des caisses, en kit. C’est dommage car le méchant allemand échappe au cliché du type cauteleux, glaçant ou visqueux : c’est juste un beau mec. BACKGROUND TO DANGER, malgré Peter Lorre et Sydney Greenstreet, n’est guère plus convaincant et George Raft a l’air de s’être trompé de film. Nettement plus intéressant en revanche est (retour à Errol Flynn)UNCERTAIN GLORY qui met en sourdine la veine sérialesque qui réussira surtout à SABOTAGE A BERLIN. UNCERTAIN est plus méditatif, moral. Si SABOTAGE A BERLIN s’en remettait à Dumas, UNCERTAIN convoque Victor Hugo à travers le personnage superbement incarné par Paul Lukas, qui serait une sorte de Javert, mais en plus sympa.
Errol Flynn et lui forment un beau duo, racé et touchant. A redécouvrir..
If I may depart from the subject of aspect ratios: I note that the U.S. law enforcement authorities ( imagine the Staasi run by a combination of The Ritz Brothers and The Three Stooges with field agents cloned from Barney Fife)have attempted once again to collar Roman Polanski, this time in Poland, scene of many a (to borrow a phrase from Philip Roth) « regularly scheduled pogrom ». But these same authorities are incapable of preventing a twice deported career felon, with criminal records in both the U.S. and Mexico, from crossing the border illegally once more, and this time to succeed in knocking off two California’s sheriff’s deputies. And then there are those thirty Guantanomo detainees paroled into the ISIS work release program. As Odon von Horvath wrote, « nothing gives such an impression of infinity as huaman stupidity ».
That’s « human », not « huaman ». You see, another example. And yet another example is Odon von Horvath’s taking shelter under a large tree during an electrical storm. Big mistake.
Je viens de voir Terror in a Texas Town: du grand Joseph H.Lewis! Par contre dans les bonus de Bertrand Tavernier et Patrick Brion, aucune mention de The Big Combo son autre chef d’oeuvre ( merci John Alton) avec Gun Crazy. Etonnant non?
Lisez-donc toutes les conversations de ce blog. Les bleus sont les bienvenus, m’enfin quand-même, on en a parlé des tonnes de fois de The Big Combo et de Gun Crazy. Vous nous prenez pour des lapins de trois semaines ou quoi ?
Jean Aurenche racontait dans « La suite à l’écran » avoir écrit des scènes démentes pour Cyrano et D’Artagnan, où ils finissaient notamment par se battre à coups de troncs d’arbres arrachés du sol si je me souviens bien, on croirait lire un mélange d’Astérix et de Batman Vs Superman ! Il ajoutait qu’évidemment aucune de ces scènes ne furent réalisées à l’écran, mais je serais curieux de le voir tout de même.
3Coup pour coup »n’est pas un simple documentaire sur le milieu du travail en usine mais un film choc sorti en 1971 et réalisé par Marin Karmitz.Le cinéaste va suivre la lutte d’ouvrières du textile qui vont meme séquestrer le PDG un certain Boursac en réference à Boussac qui était un puissant patron du textile des années 60.L’interet du film vaut pour le jeu naturel des ouvrières venues la plupard des campagnes et ont fondées un foyer avec enfants et maris.Mais il y a aussi des comédiens et ami(es)de Marin Karmitz venuent soutenir une oeuvre empreinte de l’après Mai 68 et de La Gauche Prolétarienne.Dans le bonus Serge July ancien directeur de Libé raconte les conditions de sortie du film en février 72 et la mort d’un photographe devant l’usine Renault à Billancourt,tué par des nervis du patronat.Si on regarde depuis dans le cinéma français peu de réalisateurs à part Michel Drach(Elise ou la vrai vie)nous ont montré le travail à la chaine dans des usines ou des chantiers des etres fatigués de leurs conditions d’exploitation.Si j’oubliais Guédiguian et son film »Les neiges du kilimandjaro »en 2011.
Passez de bonnes vacances Bertrand, merci encore pour ce blog, espace d’échange formidablement riche.
Comme l’écrit justement Xavier Leherpeur dans le livret accompagnant les westerns de la collection Warner, »Le trésor des sept collines » de Gordon Douglas vaut le détour pour la mise en scène et une bonne adaptation de la romancière Leigh Brackett qui a signée entre autre: »Le grand sommeil » de Hawks, »Le privé » d’Altman mais aussi de bons westerns comme »Rio Bravo », »el Dorado »ou »Rio Lobo ».Dans « Le trésor des sept collines »on s’attache aux deux personnages qui sont au départ des vendeurs de fourrure qui vont tomber sur quelques pépites d’or.On sent dans les dialogues qu’il y a plus que de l’amitié entre ses deux hommes surtout quand Shane(Roger Moore)est bléssé légerement et soignée par un medecin alcoolique sur le déclin.Après il faut reconnaitre que le bandit mexicain est un peu caricaturé dans les comportements et les fausses attentions(un vrai fourbe)!Il est dommage que Warner ne propose que les versions originales et que l’on retrouve pas en bonus quelques reflexions ou anecdotes sur ces pépites du cinéma.
A Rouxel
Vous trouvez tout cela sur le blog. Je l’ai écrit plusieurs fois et j’ai parlé de tous les Clint Walker dirigés avec talent par Douglas
See you in september
J’avais le même a priori négatif sur LA FILLE DU PUISATIER (vu sur TF1 hier), parce que Pagnol est, comme Audiard, un auteur qui ne peut être joué que par les acteurs pour lesquels il a écrit. C’est du moins ce que je pensais avant Auteuil. Ceci dit il était peut-être le seul à pouvoir refaire entendre Pagnol sans lui faire honte. Nous verrons dans cent ans comme disait l’autre.
Pas d’accord sur les réserves de M. Brady au sujet de son jeu d’acteur. L’intérêt est justement d’habiter le personnage selon sa nature, sans chercher la concurrence comme a voulu le faire l’inénarrable Roger Hanin.
Ceci dit je n’ai jamais compris pourquoi le puisatier avait autant de filles, dont les deux tiers ne servent qu’à donner du boulot aux habilleuses.
à Emile C: mais si, il a plein de filles et est veuf, pour souligner qu’il est mal à l’aise avec cette responsabilité, il a peur des femmes, voir la scène très importante (que MA Chazel gâche un peu) avec sa fille et sa soeur, et je n’ai pas dit que Auteil était mauvais pardieu fandiddjouah la bagâsse monndié vé la pitchoune! j’ai dit qu’il manquait de force bon, votre remarque sur Auteuil tombe un peu à plat car justement Auteuil tente de faire comme Raimu, votre « L’intérêt est justement d’habiter le personnage selon sa nature, sans chercher la concurrence » ben oui, et ça ça s’applique à Kad Merad comment n’avez-vous pas pu voir ça, ah là là ces jeunes, nandidjou.
à Emile: je m’excuse, je m’explique un peu mieux sans la couleur locale: ce que je crois, c’est que Auteuil entre dans la même note que le personnage de Raimu (pourquoi pas, c’est un pater-familias autoritaire) il manque un peu de force dans l’autorité du paternel, certes, mais par contre révèle sa faiblesse, son côté perdu vis à vis des femmes mais comme Raimu qui révélait très bien aussi ce côté embarrassé qu’il masquait par la colère… et donc les deux acteurs ont abordé le personnage de la même façon. Ce que je regrette, c’est juste que Auteuil faillit peut-être un peu à faire valoir le côté fort, quand Raimu résolvait le paradoxe. Quand à Kad Merad, il a su illustrer ce que vous dites, car il ne suit pas le Felipe de Fernandel mais habite le personnage avec lui-même et c’est un coup de génie, ouf voilà!
Oui vous avez raison au sujet de Merad. Le problème est que Merad est un acteur en Toc. Comme Dujardin… comme Hanin. Bon j’arrête avec Hanin, il est âgé.
A Emile C
Et très bon dans LE SUCRE
Je voulais évoquer ici l’homme,avant l’acteur,le réalisateur ou meme le producteur qu’est Jacques Perrin.Il a toujours fait des bons choix en qualité de producteur meme si le succés populaire n’était pas au rendez-vous.Je pense à l’excellent premier film de Jean jacques Annaud »La victoire en chant »qui à quand meme obtenu en 1976 l’oscar du meilleur film étranger et qui fut présenté comme une oeuvre ivoiriènne!Puis revenons aussi sur la magnifique fresque adaptée d’un livre de Dino Buzzati »Le désert des tartares »réalisé par Valerio Zurlini.On retrouve des officiers d’une garnisan militaire qui vivent la solitude,la mélancolie et le temps qui passe jour après jour dans ce désert ou apparait un cheval blanc venu de nulle part.Le casting est de haute tenue avec les italiens:Gassman et Gemma,le suédois Von divoy,l’espagnol Fernando Rey mais surtout les français Trintignant dans le role d’un medecin,Noiret dans celui d’un general bourru et strict puis Jacques Perrin qui compose un jeune lieutenant plein d’ambition et de doutes sur sa carrière mais qui est litteralement happé par le sable du désert.J’oubliais le role ambigu et fiévreux de Laurent Terzieff qui était un grand homme de théatre.La musique douce et légère de Morricone envellope cette oeuvre magistrale qui vient de resortir avec un son et des images remasterisés.Du bon travail de restauration grace aux techniques nouvelles.
A Martin-Brady:
« Qui revoit encore CHANTONS SOUS LA PLUIE, chef d’oeuvre absolu de la comédie musicale sans bailler d’ennui? » Moi, entre beaucoup d’autres je crois, et chaque fois avec un immense plaisir. J’aime beaucoup moins THE PAJAMA GAME, bien que ce doit être un des seuls films hollywoodiens à montrer l’intérieur d’une usine ( je n’ai pas d’autres exemples en mémoire ).Toujours dans le domaine de la comédie musicale, je ne comprends pas les réticences de 50 ANS au sujet de THE PIRATE, pour moi une des plus parfaites réussites du genre.
A Mathieu : pour l’intérieur d’une usine, hors musical, il y a l’usine de textile de NORMA RAE…
Oui, bien sûr, NORMA RAE, j’y ai pensé après, mais en écrivant « hollywoodien » je pensais au Hollywood « classique », dont je ne sais pas quand il se termine, mais avant NORMA RAE en tous cas. Mais NORMA RAE aussi fait figure d’exception pour son époque ( les années 70 et après ) me semble-t-il.
A Martin-Brady:
D’accord pour Jean Hagen très bien dans ASPHALT JUNGLE, mais pour moi pénible dans THE BIG KNIFE d’Aldrich ( mais je n’aime pas le film ). Pour revenir à SINGIN’, la parodie du cinéma muet est gentille mais injuste. Le swashbuckler que tourne Kelly pourrait être BARDELYS THE MAGNIFIFICENT de King Vidor, or c’est un film formidable aussi plein d’énergie et d’humour que SINGIN’. Egalement le plan ( si je me souviens bien ) montrant une bagarre de western sur les wagons d’un train: c’est le parlant qui a enfermé le cinéma dans les studios, utilisé les transparences, etc… On tournait beaucoup plus en extérieurs du temps du muet. Combien de scènes réellement tournées à New York dans ON THE TOWN, qui pourtant fait figure d’exception dans ce domaine? Il faudrait que je le revoie mais le comique pas drôle de Munshin me gâche le film. A l’époque du muet SPEEDY de Harold Lloyd ou THE CROWD de King Vidor ont été en grande partie tournés à New York.
a Mathieu
Pas du tout d’accord sur THE BIG KNIFE, beau film sur l’idéalisme corrompu, ultra aldrichien . Jean hagen souffre juste d’un surcroit d’intrigue, reliquat d’Odets mais elle est très bien et aussi dirigé très Aldrich, à la truelle…Rod Steiger campe un Louis B Mayer plus vrai que nature
A Bertrand Tavernier
Vous rappelez le matériau : c’est quand même ce qui gêne un peu dans THE BIG KNIFE, cette origine théâtrale très voyante, ces gens qui rentrent chez Jack Palance comme dans un moulin.
Mais cela reste fort. Le décor, justement, de la villa de Palance flashe notre mémoire, ainsi que ce clown triste accroché au mur. Shelley Winters est bonne aussi dans un numéro un peu en vis-à-vis de celui de Jean Hagen.
A Alexandre Angel
Mais cette théâtralité est assumée. Dépassée, illuminée. C’est le matériau, le moteur du film qui renvoie à la théâtralité de ce monde de faux semblants.
Ceci est une des dernières réponses avant septembre
Vacances et sans doute pas d’internet
Et bien bonnes vacances à vous et à tous les blogueurs !!
To Martin-Brady, But just how is BEAU FIXE SUR NEW YORK (IT’S ALWAYS FAIR WEATHER, here in ‘Murca) imperfect? It’s one of the best and bitterest of American musicals. And could I take time out here to complain about the IMDB putting Stanley Donen’s name ahead of Gene Kelly’s in the credits. You go with the original billing (unless the original billing was blacklist obfuscation). So it’s Kelly and Donen not Donen and Kelly, Lennon and McCartney, not McCartney and Lennon, whatever the proportion of the respective partner’s contribution. You don’t change precedence over your collaborator’s dead body. The American DVD’s supplements to … FAIR WEATHER have much to say about Kelly’s egomania (cutting Michael Kidd’s big solo number and only allowing Dan Dailey’s after the intervention of multiple parties and in deference to Dailey being a bigger name than Michael Kidd) but the same people who testify to GK’s arrogance also admit their awe at his talent (tap dancing on roller skates!). Baryshnikov and Nureyev are on record as awarding Fred Astaire the title of Best Dancer of the Twentieth Century, but Kelly (with the collaboration of Donen) is the greatest dancer/choreographer on film of the last hundred years. You see Kelly in that roller skate number (I LIKE MYSELF) in IT’S ALWAYS FAIR WEATHER or dancing on the newspaper up in the attic in SUMMER STOCK or, best of all, dancing with his ghost double to LONG AGO AND FAR AWAY in COVER GIRL, well, you can only laugh and weep. It’s difficult for me to imagine anyone surpassing him.
To Michael Rawls
It is true, It’s ALWAYS FAIR WEATHER is bitter and audacious and the many great moments are splendid : the visual are less controlled. I found the photography lacking of texture (something rare with Donen who was a superb technician and a great director. His films are more cinematic, more inspired than Kelly’s but together it was marvelous
TO Michael: l’imperfection dans BEAU FIXE, c’est plus au niveau de l’histoire ou du scénario, l’amertume est singulière et marque le film dans la mémoire, c’est l’un des rares musicals amers, ce qui le place en avant-garde. « Imparfait » n’est pas « anodin », c’est même son charme, et le charme ne jaillit pas comme par magie en-dehors de tout talent, de tout travail.
To Bertrand Tavernier: I think that when their partnership ceased, Gene Kelly and Stanley Donen were no longer great directors. In Donen’s best solo directorial credit, FUNNY FACE, he had Richard Avedon as visual consultant and Fred Astaire and Eugene Loring (a ballet choreographer whose film work also includes that major work of fifties American surrealism,THE 5000 FINGERS OF DOCTOR T) in charge of the dances. By the way, one of the specialty dancers in FUNNY FACE is Carole Eastman, who would later write the screenplays of FIVE EASY PIECES and PUZZLE OF A DOWNFALL CHILD. On TWO FOR THE ROAD, Donen enjoyed the collaboration of that great dialoguiste Frederic Raphael (« I am an American, Chicago born. »). On BEDAZZLED, he was working with a script by the comic genius Peter Cook, enhanced by the presence of Mr. Cook himself, who. alas, was a TV sketch actor not a movie actor but still a most considerable presence, and that able comic performer Dudley Moore. And Mr. Moore and Mr. Cook’s songs and music. CHARADE’s screenplay was by Peter Stone, who wrote MIRAGE, THE TAKING OF PELHAM 1 2 3. and the play and film 1776. Having not seen Mr. Donen’s work with Martin Amis (SATURN 3) or Huyck and Katz (LUCKY LADY), I can’t express an opinion of same, but they don’t seem to have made much of an impression. To Martin-Brady, You, me, and John Locke are in agreement: « There is no great beauty without some small imperfection. »
A Michael Rawls
But he chose them. He wanted to work with Avedon and Frederic Raphael thought their collaboration was a dream. Practically nothing that Peter Cook did was as good as BEDDAZZLED. Donen was a superb technician who knew how to use a camera but he was not at all at ease with Science Fiction or something than LUCKY LADY. MOVIE MOVIE is not bad. AND Ilike very much PAJAMA GAME and the songs of SEVEN BRIDES + the superb Michel Kiss choreography when they build the house
To Bertrand Tavernier, Peter Cook’s genius is much more evident in his contributions, as writer and performer, to the stage reviews BEYOND THE FRINGE (with Alan Bennett, Jonathan Miller, and Dudley Moore)and GOOD EVENING! (with Dudley Moore) and in his TV series with Moore, NOT ONLY BUT ALSO. I saw GOOD EVENING the week after it opened in Mew York in ’73 and I have never seen anything funnier, especially Cook’s improvisations when Moore fluffed a line. Both of these shows are preserved on CD, so you can hear for yourself. The video version of BEYOND THE FRINGE was filmed at the end of a several year run and evidences fatigue more than anything else. Selected sketches from NOT ONLY… are available on DVD, including Cook’s turn as Greta Garbo and the not of this earth SUPERTHUNDERSTINGCAR!,, a demolition of all those deranged British marionette shows of the sixties like THUNDERBIRDS and SUPERCAR. THE RISE AND RISE OF MICHAEL RIMMER, which Cook wrote with Graham Chapman, John Cleese, and the film’s director Joe McGrath, is much closer to the spirit of his stage and TV work than BEDAZZLED and RIMMER’s episodic structure and sour view of various British institutions predate’s Anderson and Sherwin’s O LUCKY MAN! by three years. I agree that BEDAZZLED far surpasses THE WRONG BOX and THOSE DARING YOUNG MEN IN THEIR JAUNTY JALOPIES. I haven’t seen Paul Morrisey’s THE HOUND OF THE BASKERVILLES. One has to limit one’s experiences somewhere. I agree with you on Michael Kidd’s wonderful choreography in 7 BRIDES…, most especially in the barn-raising and « Lonesome Polecat » number (that swishing ax sound). « A man can’t sleep, when he sleeps with sheep. »
To Martin-Brady, Actually it was Francis Bacon (philosopher ancestor of the great 20th century British painter) who said « there is no excellent beauty that hath not some strangeness in the proportion. » Edmund Burke wrote « that there is no beauty that is attractive without zest » and « I can recollect nothing beautiful that is not smooth ». Maybe I was the one who said « there is no great beauty without some small imperfection ». Why I dragged John Locke into this train wreck of misquotation, I have no idea. Voyez-vous en septembre, bye, bebe, au revoir
J’irai dans le meme sens de reflexion sur l’excellent film de William Wellman »Héros à vendre »qui est une pure merveille malgré sa durée trop courte à mon gout.Tous les films sortis dans la collection Forbidden Hollywood avant les pré-code mise en place durant les années 30 par les instancesgouvernementales aux Etats-unis sont des oeuvres qui nous dépeignent les injustices sociales,le racisme,la peur de l’étranger ainsi que l’homosexualité.Le personnage central qui revient de la guerre et quia acomplit un geste courageux se retrouve en prison,tout en étant innocent.Alors que la dépression sévit dans son pays il ouvre avec son jeune fils un lieu afin de nourrir la population misereuse et sans travail.Quel élan de générosité de la part de Wellman qui était un homme dur qui avait été aviateur durant la guerre et qui connut aussi la faim.
à Rouxel: dans le même sens de réflexion que?…
Que Bertrand dans un bonus d’un film que j’ai découvert récemment.
ah, bon.
A ROUXEL
ENTIEREMENT D’ACCORD
à Bertrand (ou qui sait), est-ce que vous reconnaissez Robert Parrish dans A L OUEST RIEN DE NOUVEAU dans l’écolier au 1er rang à droite tourné vers la droite (ou vers sa gauche)? Merci d’avance!
http://img4.hostingpics.net/pics/501009vlcsnap2.jpg
A Martin Brady
Je ne peux pas affirmer que c’est lui mais je n’arrive pas à affirmer le contraire non plus. Et son épouse, la délicieuse Katy, est décédée
To Martin-Brady and Bertrand Tavernier, Page 72 of the Harcourt Brace Jovanovich paperback edition of Robert Parrish’s GROWING UP IN HOLLYWOOD: « On Saturday afternoons, we [Parrish and his friend Jack McHugh] usually went to the movies…We saw ALL QUIET ON THE WESTERN FRONT five times just to catch a glimpse of ourselves in the schoolroom scene, when Lew Ayres returns from the front to visit his old schoolmaster. » Parrish’s uncredited appearance is also noted on the IMDB. GROWING UP IN HOLLYWOOD, by the way, is one of the best memoirs by a director that I’ve read. And, along with Fleischer’s JUST TELL ME WHEN TO CRY, the funniest.
To Michael Rawls
I totally agree
à M Rawls: j’ai le bouquin depuis longtemps et aurais voulu que Parrish précise sa présence dans le film mais quand on compare le profil droit de l’élève à droite au 1er rang avec le même profil de la photo de l’éd française où il tient la canne de Charlot, c’est sûrement lui à 99%. Le bouquin de Fleischer est indispensable surtout le passage de la reprise du tournage de FINI DE RIRE après Farrow, du pain béni pour un nouveau film de bio de H Hugues! RF n’y parle pas (ou très peu) des deux Stranglers, ce que je regrette, mes films préférés!
To Martin-Brady, I might go to 95 or 96 percent on your Parrish id in ALL QUIET…, but couldn’t it be possible that the kid who’s second from left in the first row is RP? If you go to youtube and type in ALL QUIET ON THE WESTERN FRONT classroom scene, you will find a high definition clip with which to play around. The Farrow/Fleischer/? HIS KIND OF WOMAN is quite entertaining and makes so little sense that it doesn’t really matter where you come in. I love Mitchum ironing his money and the interplay between Mitchum and his good buddy Russell and Big Ray Burr as the bad guy but I find Vincent Price somewhat less enchanting than Howard Hughes did. I think that THE BOSTON STRANGLER ranks among the best work of Fleischer, Curtis and Fonda.
to M Rawls: you might be right, it’s as good a bet as mine. RP didn’t mention Jack McHugh was in the scene alongside him, Jack might be anywhere in the room, but if Jack’s sitting next RP, it’s just likely it’s RP 1st row 2nd from left (and Jack 1st fr left), as it should be RP 1st row 3rd from left (and Jack full right)! So we just have now to find photos of McHugh who was in tvseries SPACE PATROL as Major Sova and in WILD BOYS OF THE ROAD as Mac! SPACE PATROL is kind of funny so… wouldn’t be to boring! I will let you know!
I’m with you about V Price on HIS KIND, he SHOULD be funny but he’s just sympathetic (« sympathique » I mean), but I simply adore this film which illustrates very well my little theory about unperfect films, HIS KIND is a gem, it’s not a chef d’oeuvre, so what? thanks, nice to hear from you!
merci pour la réponse…
A Bertrand Tavernier
De Robert Parrish, je viens de voir sur TCM les 5 dernières minutes (oui, je sais, c’est un peu chiche)de DUFFY. J’y ai perçu une décontraction ensoleillée (James Coburn, Susannah York et James Mason resplendissent) qui m’a plutôt donné envie d’en voir la totalité (d’autant que c’est un des rares films actuellement proposés par TCM que la chaîne n’a pas diffusé 1203 fois).
M’y inciteriez-vous?
A Alexandre Angel
Le film est décevant, piégé par un et un scénario trop mode, assez creux que Parrish ne sait pas comment aborder.Il aurait fallu un réalisateur plus pyrotechniquece qu’il n’était pas Le propos ne devient interessant que quand de vrais sentiments apparaissent à l’improviste, ce que Parrish sait bien filmer. Sinon je trouve le film décontracté mais plat
La photo de S. Vierny dans STAVISKY est aussi remarquable. En revanche je ne suis pas sûr que Resnais s’intéresse au personnage. Il a trouvé là le prétexte à faire un film d’époque à sa manière. C. Denner aurait été tellement meilleur dans le rôle ! Je revois le film et il n’y a rien à faire : Belmondo n’est pas à sa place, il joue comme dans un Lautner. Son dernier bon film toutefois, et ça remonte quand même à 1974.
Je tenais à saluer ici le travail de restauration et de numerisation du à Jupiter Films qui nous permet de revoir des chef-d’oeuvre du cinéma.En attendant la rentrée avec un coffret de 4 films de Claude Goretta et de »Reve de singe »de Marco Ferreri,je voulais revenir sur »Providence »sorti l’an dernier.C’est un pur film film de reflexion sur la psychologie humaine,une oeuvre vraiment à part dans la longue carrière d’Alain Resnais.Les 7 césars obtenus sont mérités amplement vu la force du film au niveau pictural.L’interprétation de Dirk Bogarde,John Gielgud ou David Warner est prodigieuse ainsi que la narration de l’histoire par cet écrivain alcoolique qui met en scène des personnages de sa vie familiale.La fin du film est d’une grande poésie avec un mouvement de caméra qui tourne en nous montrant les arbres de la propriété,le vent qui souffle rythmée par une musique douce et légère.C’est du grand art.Signalons également le doublage qui est parfaitement soigné au niveau du choix des voix(François Périer,Claude Dauphin,Gerard depardieu,Suzanne Flon….).
A Rouxel
Oui mais la VO est pas mal aussi. Comme le déclarait Leslie Howard dans PIMPERNEL SMITH à l’officier Allemand proclamant que Shakespeare était allemand : « Vous devez reconnaitre que la traduction n’était pas mauvaise »
Feu Kadhafi prétendait lui que Shakespeare était arabe et s’appelait en réalité Sheikh Zubeir. A l’origne de l’histoire il y un canular inventé par un écrivain satirique libanais du XIX° siècle qui a été pris au sérieux par un érudit irakien puis par Kadhafi, un peu comme BHL avec Botul.
Une oeuvre à part et en même temps un film où tout Resnais semble être condensé: inventivité narrative,beauté plastique,sens de l’espace hallucinant et hallucinatoire ( les fameux décors à géométries variables inventés par J Saulnier , complice toujours prêt à réinventer le monde pour Resnais), direction d’acteurs subtile ( D Bogarde est extraordinaire comme tout le reste de la distribution) , rencontre entre Culture et culture populaire (via Lovecraft, qui mieux que Resnais eut pu de manière crédible mettre cet auteur en vedette souterraine d’un film sur la création?).
Bref, il est impossible de ne pas être conquis et bouleversé par tant de tranquille audace.
Rien à voir: je viens de revoir La vie et rien d’autre ce soir avec ma femme qui ne l’avait jamais vu et nous avons été bouleversés par le récit si tendu et en même temps si vital.L’écriture est superbe ( on sent une époque folle où tout se télescope vie/mort, fête/deuil, office religieux/fête paienne, honneur/vilennie) et le travail sur les décors incroyables nourrit de manière concrète, matérielle cette coexistence.Et vos acteurs!!! De l’impérial , tellement subtil Ph Noiret à une frémissante S Azéma en passant par F Perrot dépassé par les événements ou Duchaussoy raide et militaire sans oublier MBarrier que je crois revoir sur le marché d’Avallon il y a bien des années…et cette musique virtuose d’Oswald d’ Andrea qui se nourrit du souvenir d’une guerre pour mieux signifier l’importance de la vie ( elle se met dans l’oreille comme l’avait fait aussi la musique de India song de Duras) Quel beau film, Bertrand,quel beau film… merci.Je sais que normalement ce n’est pas la vocation du blog que de parler de vos films mais là cela s’imposait.
A Ballantrae
Mille fois merci. C’est bien de parler de la musique que personne ne signala et de la chanson écrite par jean Cosmos (qui s’amusa à en écrire 5 dans CAPITAINE CONAN). C’était le rôle favori de Noiret
Et je comprends que Ph Noiret ait pu placer très haut ce rôle.Ma femme me disait qu’elle ne l’avait jamais vu ainsi et trouvait qu’il pouvait ici jouer sur des variations infimes aussi bien que sur des contrastes.Le changement de son expression à maints moments relève du miracle alchimique del’acteur: qd il s’écrie « les salauds, les salauds », qd il chante pour fuir S Azéma, qd il n’arrive pas à dire « je vous aime » et prononce un « je vous écoute » terrifié…tout cela est extraordinaire et devrait être montré dans des cours d’art dramatique).
Quant à la puissance émotionnelle de la séquence finale avec cette lettre magnifique ( écho de ce choix stylistique dans La princesse de Montpensier) elle emporte tout sur son passage et pour longtemps.
Quant à la musique , je lui trouve des liens avec les plus belles partitions de M Jaubert mais cela reste du O de Andrea, à savoir un musicien de cinéma rare et précieux.
De toutes façons, il faudrait saluer tout le monde tant les talents semblent avoir convergé pour donner le meilleur: photographie ( comme éteinte, bleutée à la manière des uniformes sans tomber dans le cliché du monochrome), décors ( extraordinaire appropriation des lieux civils pour des fc militaires moyennant de petites cloisons vues de manière incroyable en légère plongée, et cette usine prête à « repartir » miraculeusement épargnée selon l’accord donnant donnant).
Oui , vous avez réalisé bon nombre de films magnifiques et La vie et rien d’autre compte parmi les plus forts.
LA VIE c’est quand même le film où Noiret a abordé un registre de héros viril « à l’américaine » qu’on ne lui soupçonnait pas! Notre Noiret avait là des accents de gros costaud johnwaynien! Incroyable! Accents bien sûrs tamisés par les remarques de ballantrae sur ce que PN fait passer sur sa peur des femmes (et là on est plus avec John Wayne, quoique… John T Chance…).
Mon cher Ballantrae, je suis entièrement d’accord avec vous sur LA VIE ET RIEN D’AUTRE que je considère comme étant le film le plus important de notre Tatave national…(juste avant « Les salauds ; les salauds ! » je garde depuis toujours dans l’oreille le « Mais nous n’arrêtons pas de nous taire !!!… » dit par le même Noiret…) M’enfin quand-même … vous avez eu un prix sur le cirage ou bien ??? A vous lire on se serait cru dans un Chabrol. Allez, c »était pour le plaisir de vous chambrer… Salutations.
Sacré Sullivan… non je ne cire pas malgré les soldes en tous genres y compris sûrement sur le cirage.En revanche, j’admire naturellement les (vrais) créateurs car ils me semblent bien plus admirables que des politiques ( à qqs visionnaires près) et que les puissants de ce bas monde: eux nous amènent ailleurs, font appel au meilleur qui se cache en nous, trouvent le moyen de faire comprendre le monde, de le rendre habitable.
je remplace « gros costaud waynien » qui n’est pas très heureux par « héros viril waynien » qui est quand même plus correct pour la mémoire de Noiret!
Je préside un petit ciné-club, au cinéma de la ville de Lavaur, dans le Tarn, à une quarantaine de kilomètres à l’Est de Toulouse. Nous avons le plaisir de projeter demain soir jeudi 11 octobre « La vie et rien d’autre ». C’est une chance de trouver ici matière à réflexion et à alimenter nos discussions. Je vous espère en bonne santé. Bien cordialement (ladulcine.org)
a Damien Aubenton
Merci beaucoup. Tout va bien
Moi qui habite Toulouse,j’aurais pu venir si j’avais eue l’information plutôt.Enfin c’est partie remise comme on dit.La prochaine fois n’hésiter pas à nous informer à l’avance.
Canal + diffuse en ce moment MARIUS et FANNY adaptés par Daniel Auteuil. La mise en chantier du film m’avait fait grimacer d’un côté, en souvenir du mal que Roger Hanin avait pu faire à Pagnol, eh bien je suis fort agréablement surpris par le résultat ! La qualité du film tient d’abord de l’interprétation, Auteuil, Personaz, Daroussin, Russo, se sont approprié les personnages sans chercher l’hommage ou l’imitation et Marianne Chazel en Honorine est réellement étonnante. J’avoue aussi que la jeune fille qui incarne Fanny, malgré quelques excès lacrymaux, est une bien meilleure comédienne que ne l’était Orane Demazis. D’autre part Auteuil ne cherche pas à faire du neuf avec du vieux, recréant l’atmosphère du port exactement comme on le faisait dans les années 30. On se croirait dans un décor de Trauner pour un film de Carné ou d’Allegret, d éplus éclairé comme pour du noir et blanc. Une preuve qu’on peut puiser dans le patrimoine quand on a l’intelligence et le talent de se placer à la bonne hauteur. Il n’y a aucune raison pour que cette trilogie ne soit pas réinterprétée jusqu’au bout. j’attends CESAR de pied ferme.
A Emile C
Je suis d’accord
à Emile C: c’est intéressant est-ce qu’on peut dire la même chose de LA FILLE DU PUISATIER? Par contre on ne peut pas être meilleur que Orane Demazis, on peut voir le personnage autrement, et livrer autre chose, oui (Bertrand a dit la même chose dans une autre chronique et je m’étais insurgé!). Bon on verra.
tiens! j’ai encore dit une connerie, apparemment! mais c’est pour l’honneur d’Orane alors, ça va!
(ou alors c’est un bug)
oui c’est ça, c’est un bug, tu vois Orane, les remous que tu provoques encore! je t’aime
ça va être un peu énigmatique là-dessus. Sinon, j’ai pris LA FILLE DU PUISATIER à ma médiathèque, cher Emile, afin de reprendre le dossier Auteuil-Pagnol à 0 et dans l’ordre après: MARIUS etc. merci
A MARTIN BRADY
C’EST MOINS BIEN PARCE QUE LA DEUXIÈME PARTIE EST TROP SENTIMENTALE. Il Y A DEUX SCÈNES MEMORABLES ENTRE AUTEUIL ET DAROUSSIN sur ce que c’est qu’un métier. Sabine AZEMA est très drôle au début
à Bertrand: ah, ok, merci, de toute façon avec des acteurs pareils on doit pas pouvoir s’ennuyer!
Apparemment Daniel Auteuil à tournée Les 3 films à la suite,pourtant »César »n’est pas sortie sur les écrans au cinéma.Je pense qu’il sortira directement en dvd à la rentrée comme on se plait à dire.Il faut rajouter que les deux volets n’ont pas rassemblé grand monde en salles.
sur LA FILLE mon impression est mitigée: Auteuil manque sans doute de force pour jouer ce patriarche autoritaire, mais Kad Merad a trouvé une solution subtile pour faire autre chose du personnage de Felipe (après Fernandel il fallait le faire!): c’est simple, il est absolument formidable, toujours dans la note pas un faux-pas! Darroussin est prodigieux, capable d’une mesure dans l’élocution, dans la retenue impressionnantes, dés sa première apparition, à le voir un peu voûter sa stature sans exagérer, plisser les yeux, il est le boutiquier à 100% et je l’imaginais déjà (alors que c’est une scène de rue) en train d’examiner un livre de comptes. Azéma a un rôle très ingrat et je lui tire mon chapeau de l’avoir assumé aussi justement. Je félicite aussi Auteuil (ça va le faire rougir) d’avoir restitué la scène du roman écartée par Pagnol dans son film, de l’aveu de la fille à son père, car ça donne une scène très frappante entre Astrid Bergès-Frisbey et Auteuil dans laquelle le détail des mots est à la fois succulent, épais, touchant et surtout, grave, c’est pas rien! bon, maintenant, pas de temps à perdre: MARIUS!
Désolé , un hors sujet va suivre:
Un film qu’il faudrait vraiment restaurer au vu de la qualité délavée des couleurs de la copie MK2 comme Potemkine: le sublime Dersou Ouzala de Kurosawa qui mériterait de retrouver ses verts, ses complémentarités bleu/jaune ou beige pour les scènes hivernales.Même mon gamin de 7 ans qui adore le film s’aperçoit qu’un truc cloche avec cette matière marronnasse qui imprègne le film.
Le film aura 40 ans l’an prochain.L’institut Lumière ne pourrait-il entamer des tractations avec le distributeur russe qui laisse le matériau se détériorer de manière je l’espère rémédiable?
Un commentaire à propos de TERREUR APACHE, le roman de W.R. BURNETT que je viens de lire avec beaucoup de plaisir. Je n’ai pas vu ARROWHEAD qui est tiré du roman mais au cours de ma lecture je n’arrivais pas à imaginer une adaptation du livre dans le contexte du western des années 50. Et je me suis dit que c’est Clint Eastwood ( période JOSEY WALES ) qui aurait pu à la fois comme acteur et comme réalisateur rendre le ton du livre, un Clint Eastwood qui se souviendrait de Hawks ( pour l’évocation de l’amitié entre Grein et Reb, l’humour de celui ci, la truculence des personnages secondaires ). Le ton du livre et aussi ses ambiguités, car ambiguités il y a. Le récit adopte le point de vue de l’éclaireur Walter Grein, et Burnett n’est pas Grein, qui est lui même un personnage complexe et contradictoire, mais parfois on sent une identité de vue entre Grein et Burnett. Burnett a lui aussi une vision essentialiste des Indiens notamment au travers du personnage de James Eagle, éclaireur d’origine Apache recueilli tout bébé et élevé pendant vingt ans par un couple de Blancs. Pourtant c’est un éclaireur presqu’aussi accompli que le vieil Apache Dutchy, à croire que ces qualités sont innées et ne s’apprennent pas par une longue expérience du terrain. A la fin du roman, Eagle, qui a rejoint le rebelle Toriano pour le convaincre de se rendre ( mais un doute subsiste sur ses intentions ) est touché par une balle et mourant.
Eagle: -Je voulais partir…Au Mexique. Médecine faible.
Grein: -Voila que tu te mets à parler comme un Apache, Eagle.
Eagle: -C’est ce que je suis.
Grein: -Il t’a fallu du temps pour le comprendre.Tu étais le meilleur éclaireur de la réserve après Dutchy.
Il y a là une façon de ramener les gens à leur origine, de réduire l’identité à la race, avec en plus un coté je-vous-l’avais-bien-dit qui me gêne, pour ne pas dire plus, qu’on retrouve ailleurs dans le roman, et qui me fait penser à la façon dont Sirk traite le personnage joué par Susan Kohner dans IMITATION OF LIFE ( ce qui ne m’empêche pas de beaucoup aimer ce film ).
De même le discours : » soyez bons avec eux et ils prendront ça pour de la faiblesse, ils ne comprennent que la force. Ils sont fourbes et menteurs etc… » répété plusieurs fois, tout à fait logique dans la bouche de Grein, on ne peut s’empêcher de penser que c’est aussi la vision de Burnett. C’est le discours de la force occupante, partout et toujours. A partir du moment où vous subissez une occupation vous devenez fourbe et menteur, ce n’est pas une question de nature mais de situation. Je suppose que les Allemands trouvaient les Français fourbes et menteurs pendant l’occupation. C’est une question de point de vue. Quand Burnett écrit un roman sur la lutte entre Irlandais et Anglais avec CAPTAIN LIGHTFOOT, que je n’ai pas lu et dont Sirk a tiré un très beau film, il adopte le point de vue des Irlandais. Mais du point de vue des Anglais, les Irlandais étaient aussi fourbes, menteurs, superstitieux, violents et crasseux que les Apaches d’ADOBE WALLS, et ils devaient avoir leurs raisons pour le penser.( Le » Voyage en Angleterre et en Irlande de 1835 » de Tocqueville décrit et analyse magistralement la situation ).
Mais je sens que je donne une image inexacte du roman. Car Burnett contredit, relativise, ironise aussi( à la manière de Montesquieu qui écrit dans » l’Esprit des lois « : » Une preuve que les nègres n’ont pas le sens commun, c’est qu’ils font plus de cas d’un collier de verre que de l’or, qui chez des nations policées, est d’une si grande conséquence » ) et donne beaucoup d’épaisseur et d’humanité au personnage de Grein. Mais quand il revient à son discours essentialiste et populiste, ça devient pénible ( surtout dans le contexte actuel ), dès qu’il s’en éloigne et le contredit, ça devient passionnant. Comme chez Eastwood justement.
A Mathieu
Et il compare les Apaches aux guerriers Spartiates dans son epilogue qui relativise le propos. Mais franchement, je ne vois pas ce que les dialogue entre Eagle et Grein a de réducteur. Grein lui fait un compliment indiquant qu’il était le meilleur dans sa catégorie. Et Burnett dans d’autres romans, prend le parti des Apaches ou montre ce qu’ils ont perdu en étant colonisés. Je trouve qu’il y a une réelle complexité due au fait qu’il refuse les idées générales.
Sur les Apaches, il y a un petit livre d’un certain Cozzens qui prend le net parti de donner de ce peuple une image tout simplement diabolique.
C’est « Voyage au pays des Apaches ».
Tout est fait pour épouvanter le lecteur, à quelques poussières de concession près.Jusqu’aux descriptions infernales de l’Arizona.
Quoiqu’à la limite du comique, le livre donne sans doute de vrais éléments, et le sentiment que notre compassion pour le destin des Indiens n’empêche pas qu’aucun de nous aurait pu vivre parmi eux.
Bonjour, pour les genromaniaques, donc les dingues qui aiment créer des genres et des sous-genres auxquels rattacher un film, j’ai trouvé un truc rigolo: un journaliste de The Atlantic a analysé le système d’archivage de genres ou types de film qui va servir au client de Netflix pour choisir le film qu’il va acheter avec un nombre de critères impressionnants. C’est une histoire compliquée d’algorythmes qui va aussi (petits malins) servir à stocker les goûts du public, illustré ainsi par le journaliste (Alexis Madrigal): « quand ils créent une série comme HOUSE OF CARDS, ils ne devinent pas ce que les gens veulent », ils iraient le chercher dans la base Netflix, donc. Il a créé un générateur de genres, je me suis bien amusé à cliquer pour trouver « Slashers sentimentaux » ou « Comédies musicales pour gays ou lesbiennes avec animaux qui parlent » ou le genre ultra-niche: « Drames émotionnels situés à l’époque biblique à propos d’art et de décoration intérieure » (site en anglais) mais il y a plus cocasse.
En fait, pour info, LE CAFE DU CADRAN est ou va sortir en DVD chez René Chateau.
A André Desages
Fort bonne nouvelle
Bonjour, votre article m’a donné envie de revoir « Maigret et l’affaire Saint-Fiacre » et je l’ai fait avec beaucoup de plaisir. Jean Gabin apporte à Maigret tout à la fois sa carrure, son autorité sans grand renfort de paroles, une sobriété qu’on ne lui a pas toujours connu mais essentielle dans ce personnage, et l’humanité nécessaire dans cette histoire de crime crapuleux et lâche. Même Simenon a semble t-il apprécié le Maigret personnifié par Gabin, lui qui ne jurait auparavant que par Pierre Renoir ou Michel Simon. Je trouve réussie personnellement l’interprétation de Bruno Cremer à la télévision. Pour revenir à « Saint-Fiacre », il baigne une atmosphère très mélancolique soulignée par le gros plan de Gabin dans la voiture qui conduit Maigret et la comtesse au château, puis lorsque Maigret quitte le village à la fin, comme par la musique de Jean Prodromidès. Et les dialogues d’Audiard savent rester assez sobres sans manquer d’éclat à différents moments (j’aime particulièrement la scène dans le bar où Gabin discute avec une prostituée jouée par Micheline Luccioni qui lui demande « Vous êtes de passage ? » et en regardant le serveur posté fixement devant eux, Gabin répond « C’est à lui qu’il faut demander ça… »). Et mention à tous les seconds rôles qui apportent tant aux films de cette époque : Michel Auclair en fils indigne, Paul Frankeur en toubib gouailleur, Robert Hirsch en secrétaire, Michel Vitold en curé ou Jacques Marin en chauffeur peu avenant. Seuls rayons de lumière dans cette sombre histoire, Valentine Tessier en comtesse pourtant à l’approche de la mort et Gabrielle Fontan, petite vieille dame voûtée qui tient l’épicerie dans le film et l’un de ses tout derniers rôles par la même occasion.
Bravo pur la défense de Stavisky effectivement un Resnais un peu mal aimé pour diverses raisons qui vont de l’utilisation de Belmondo à la manière dont l’Histoire est comme contournée ( Resnais ne constitue pas un dossier implacable à la Rosi, et son film n’est politique que de manière périphérique) en passant par l’impeccable élégance rétro.C’est un fort beau film qui en plus nous permet d’imaginer combien Resnais se serait (et nous aurait) régalé(s)avec des adaptations de BD comme Mandrake ou avec celle de Jean Ray.Il y a comme un parfum annonciateur de Il était une fois en Amérique avec son atmosphère nostalgique,mélancolique.
Le Lincoln de Griffith est effectivement très étonnant et recèle malgré la part de dialogue de vraies trouvailles visuelles.Je pense qu’il a été vu et revu par Spielberg avant son propre Lincoln.Le coffret est très intéressant et j’y reviendrai.Quel beau personnage tout de même! Quelle intelligence!J’ai découvert le Griffith peu après le spielberg et la complémentarité des deux est passionnante.
A Bertrand Tavernier,
Merci pour cette fournée très fournie !
Vos chroniques apportent à notre cinéphilie l’assurance que les films sont vivants, qu’ils respirent comme vous et moi. J’adore ce principe de réévaluation inlassable, de ravalement de façade de la sensibilité. C’est pour cela que , en toute logique, je nourris un faible, en parcourant vos chroniques, pour les évocations de films (français, anglais, italiens ou américains) dont l’âge permet le recul nécessaire à cette réévaluation. Tenez, par exemple, TAP ROOTS, que vous chroniquez ci-dessus : dans 50 ANS, vous le qualifiez de » très médiocre » et de » ennuyeux mélo sudiste « . La réévaluation , chez vous, est un principe connu de tous les blogueurs du coin et représente pour vous (quand elle se justifie, bien évidemment), une manière de profession de foi. L’affaire est entendue (enfin, je suppose)mais c’est la vérification in situ qui me passionne. Comme je le fais souvent, j’ai jeté un œil sur votre notice consacrée à George Marshall dans 50 ANS avant de visionner TAP ROOTS. Eh bien, en cours de visionnage, ce n’est pas que je me suis dis que vous aviez tort, c’est plutôt, et tout simplement, que je découvrais un film assez honnête, se laissant voir, agréable à l’œil, d’une belle qualité artisanale au sens hollywoodien du terme, se donnant les moyens de soigner sa sudiste iconographie et que tout cela pourrait faire l’objet d’une petite révision de copie de votre part. Vu qu’elle est arrivée et que vous m’en trouvez ravi, j’avais envie d’exprimer ce contentement et de poser la question suivante. Les films sont-ils vivants ou bien est-nous qui évoluons? Un peu les deux, mon capitaine : rationnellement, c’est la seconde hypothèse qui ressort, poétiquement, c’est la première.
A Alexandre Angel
Les deux. Et je ne me souviens plus qui avait écrit sur TAP ROOTS. Pas moi car je ne connaissais pas le film et peut être était ce un héritage de la toute première édition. Et puis quand on écrit 15 ans après avoir vu un film, les souvenirs sont parfois décalés
A Bertrand
C’est vrai que 50 ans est un ouvrage bicéphale. Pardon de vous avoir tout mis sur le dos!
A Alexandre Angel
Et nous avions récupéré des éléments critiques de Boisset que nous avons peu à peu remplacé au fur et à mesure que le livre se développait
mais les films ne changent pas! c’est pas scientifique, votre truc! c’est le contexte + nous, ce mélange est poétique aussi, d’ailleurs.
A revoir certains films que j’ai jugé sévèrement, je crois que le goût se forme: j’ai honte de dire que je n’avais retenu de BERLIN EXPRESS que le final qu’on avait trouvé naïf avec un copain. Règle absolue: ne JAMAIS se forger un avis avec qqn dés la sortie de la projection, c’est une grave erreur, on s’entraîne on s’égare… Les échanges d’avis dans les files sortantes m’ont toujours rebuté. M’étaient passées complètement inaperçues les beautés visuelles, la ballade-enquête dans la ville morte (Francfort), enfin l’immense et admirable classicisme du film (comme dans OUT OF THE PAST mais pas comme d’autres Tourneur, VAUDOU qui est sur un autre registre), j’étais aveugle, il y a 1000 trouvailles (je regrette que la longueur de la plume du chapeau de M Oberon!). Donc autre chose qui change avec le temps: le goût, et heureusement!
et la fin n’est pas si naïve que ça: elle illustre quelquechose. Enfin, j’avais oublié ou même pas VU le dernier plan: un homme marche avec des béquilles dans les ruines, ah, les derniers plans de Tourneur qui se braquent (souvent) sur un personnage secondaire! Déchirant.
Je dirais que ça tient aussi au fait que les films vieillissent. Pour donner tort à Godard qui disait « pourquoi dit-on un vieux film alors qu’on ne dit pas un vieux livre ? » Eh bien parce que les films vieillissent et pas les livres. Selon mon appréciation ce qui fait immanquablement vieillir un film c’est le jeu des acteurs. Rarement autre chose. Jamais autre chose !
A Emile C
Et certains costumes. Mais des procédés de style vieillissent (ou se coupent du public : faire gouter Racine à certains ados est aussi difficile que de les forcer à regarder un Ford ou un Ozu qu’ils trouvent ultra lent jusqu’à ce qu’ils rentrent à l’intérieur) tout autant de même que tout un style de construction littéraire, une manière d’aborder un sujet (Paul Bourget célébré comme un auteur moderne)
A Emile C
Godard, dans ce cas entérine-t-il cette notion de « vieux films » ou bien la réfute-t-il? Si c’est un constat, il a raison : on dit « je lis LE PERE GORIOT » et non pas « Je lis un vieux livre ». C’est que vous oubliez, peut-être, que ce qui fait « vieillir » les films, c’est aussi la technique. Beaucoup de gens (qui, selon les cas, vont trouver un charme désuet aux films en N&B)considèrent qu’un film qui n’a pas de caractéristiques techniques contemporaines est un film moins performant, tout bonnement, comme un vieux moteur qui fait « pouch pouch ». C’est un effet funeste (d’où mon illustration un peu radicale) de la dictature des effets spéciaux et du culte de la précipitation. De ce point de vue, le cinéma est condamné à vieillir (toujours)plus vite que les autres formes d’arts. D’où l’indispensable pédagogie qu’il faut déployer pour faire comprendre que les films peuvent vieillir comme les grands vins, et même mieux encore.
A Almexandre Angel
Ce n’est pas un vieillissement, c’est une évolution. Et le fait que la technique repousse certains spectateurs se conjugue dans d’autres domaines : la dictature du sucre et de la junk food fait paraitre fade une merveilleuse sole grillée. Regardez comment l’abus des boissons sucrées, des sodas déforme le goût de certains amateurs de vins qui n’acceptent que les crus très aromatisés de la manière la plus superficielle. Ils ne savent plus faire travailler leur palais quand cela demande un effort. MONDOVINO parle aussi de cinéma
Les films vieillissent, sans doute. Mais j’aurais tendance à penser, avec Clémenceau, que » quand on est jeune, c’est pour la vie » et que beaucoup de films qui ont l’air d’avoir vieilli étaient déjà vieux à leur sortie. Le seul film de vampires qui me fasse peur est NOSFERATU ( 1922 ), NEVER WEAKEN ( 1920 ) et SAFETY LAST! ( 1923 ) de Harold Lloyd me donnent le vertige, pas SPIDERMAN. Charlot a 100 ans cette année et sa première apparition dans KID AUTO RACES AT VENICE, CAL. a beaucoup moins vieilli que beaucoup de films plus récents, y compris de Chaplin lui même ( à propos, j’aimerais savoir qui a écrit sa notice dans 50 ANS ). Charlot s’invite dans une vraie course automobile et dérange les cameramen d’actualités venus filmer la course, en entrant constamment dans leur champ. On voit le public qui rit du culot et du sans-gêne de Charlot, sans savoir qu’il s’agit du tournage d’une comédie, la caméra du film passant pour une caméra d’actualités.
Mais il y a quelque chose qui donne un coup de vieux à beaucoup de films, notamment aux films hollywoodiens de la grande époque, c’est la musique. David Raskin et Alfred Newman ont récemment terni mon plaisir à voir respectivement APACHE d’Aldrich et THE BRAVADOS de Henry King, deux très beaux films. Mais il y en a d’autres: Waxman, Steiner, etc… Mais c’est comme les disques de Charlie Parker avec des cordes ( des cordes, pourquoi pas? mais pas celles là… ), il faut faire avec. Korngold dans THE SEA HAWK, Copland dans THE HEIRESS, Herrmann dans GARDEN OF EVIL ou VERTIGO, tout de suite on entend la différence, pourtant ce ne sont pas des compositeurs dont j’écouterais les oeuvres en dehors des films. Je viens de revoir BROKEN ARROW, beaucoup plus beau que dans mon ( lointain ) souvenir. Il y une scène où des Apaches attaquent silencieusement un groupe de cavaliers. Pas de musique, mais des chants d’oiseaux. Et tout devient beaucoup plus fort, plus présent. Fox sort MY DARLING CLEMENTINE en Blu-Ray. Malheureusement ils ne proposent pas la version » Preview » qu’on trouvait dans l’édition DVD » collector » avec un documentaire expliquant les différences entre les deux versions. Dans la version définitive, plus courte, Zanuck a supprimé des plans (ex: à la fin, Fonda regardant vers la fenêtre de la chambre de Linda Darnell ), rajouté d’autres ( le baiser de Fonda à Cathy Downs ) et pour couronner le tout, ajouté de la musique sur plusieurs scènes où Ford n’en voulait pas. Sans doute si les grands réalisateurs des années 30-40-50 avaient toujours eu le » final cut « , y compris sur le son, il y aurait beaucoup moins de musique sur leur films et elle aurait été différente.
A Mathieu
Pas tous les réalisateurs. Certains ne s’impliquaient pas beaucoup avec leurs musiciens (Hawks ne venait pas au mixage du GRAND SOMMEIL) et parfois le studio l’interdisait. C’est le studio qui voulait de la musique à tout prix et parfois les musiciens. En France dans les années 30/40 la musique est souvent de bien meilleure qualité et peu d’américains arrivent au niveau de Maurice Jaubert. Pensez aussi à Jacques Ibert Darius Milhaud, Arthur Honneger, Jean jacques grunenwald (la musique des DAMES DU BOIS DE BOULOGNE est sublime de discrétion et d’efficacité). Et d’accord avec vous sur MY DARLING : Ford là était plus intelligent, plus perceptif que Zanuck, pourtant producteur attentif et remarquable. La scène chez Ford est plus forte et l’irruption du thème qui arrive tardivement donne une beaucoup plus grande présence au personnage de Cathy Downs
à Bertrand:
Tout à fait d’accord sur la musique dans le cinéma français, la musique de Jaubert pour L’ATALANTE c’est la symbiose parfaite.
Les musiques « hollywoodiennes » me gênent surtout dans le western et aussi dans certains films historiques en costumes. Raksin ne me gêne pas au contraire ( dans mon souvenir ) dans LAURA, THE BIG COMBO ou FORCE OF EVIL. Je crois même qu’il y a une utilisation très originale de la musique dans ce dernier film, il faudrait que je le revoie ( j’ ai revu il n’y a pas très longtemps A PERSONAL JOURNEY WITH MARTIN SCORCESE … où un extrait de FORCE OF EVIL m’avait frappé par l’utilisation de la musique ). Mais la musique joue un rôle particulier dans beaucoup de films noirs, surtout les plus spécifiques du genre, ceux basés sur des flash-backs où une voix off se remémore des évenements passés. La musique devient alors l’accompagnement de cette voix, alterne évocation du passé et description de l’action présente. C’est particulièrement vrai chez Ulmer où la musique a beaucoup d’importance ( DETOUR, STRANGE ILLUSION ) mais pas seulement.
Assez d’accord avec vous Martin Brady… De fait, peut-être serait-il temps pour vous de redécouvrir HEAT, beau film d’auteur, bien ecrit, avec ses paysages urbains, sa photo dantespinotienne, ses personnages très fouillés … Allez et si j’osais… revoyez LE DERNIER DES MOHICANS du même Mann… !
A Sullivan
Qui me parait supérieur à HEAT
A Bertrand : Oui, LE DERNIER DES MOHICANS me paraît également supérieur à HEAT. Mais je clame haut et fort que HEAT est un grand polar. Ne pas y voir un renouveau du genre ou tout simplement une immense mise en scène, notamment une utilisation exceptionnelle de l’espace, me semble suspect voire malhonnête… Quant à comparer le film à une tarte à la crème … Je veux bien m’en prendre plus souvent de ce calibre-là en travers du visage. Mais là, je m’égare …
J’aime vraiment les deux qui me semblent tellement différents qu’ils n’ont pas à être comparés pour en valoriser un par rapport à l’autre.En revanche, dans le domaine du polar, Miami vice m’avait sacrément déçu et du coup me semblait assez creux comparativement à Heat ou Le solitaire.
Beaucoup d’internautes n’ont pas aimé Public ennemies et Bertrand non plus d’ailleurs or ce film m’a semblé neuf si on le considère dans le cadre précis du film de gangster rétro.La caméra numérique constituait un plus qui décapait les codes de cette ambiance 30′ comme asséchée par cette lumière si étrange qui n’appartient qu’ à notre époque.
Il constitue à mes yeux une date au même titre que bonnie and Clyde pour les 60′, Le parrain I et II pour les 70′, le Leone pour les 80′ et enfin Miller’s crossing à l’orée des 90′.
Et en plus, le temps d’un film J Depp redevient le bon acteur qu’il fut ce qui ne gâche rien…
A Ballantrae
Mais le scénario est d’une grande pauvreté
à Sullivan:
– l’évolution du goût, ça ne joue que sur une longue période, pas quand on a vu HEAT il y a un an
– vous faites suite à un sujet évoqué dans la chronique précédente
– il s’agissait de « gâteau à la crème indigeste », pas de tarte: HEAT est un film trop long
– merci pour le « voire » avant « malhonnête »! sa présence est indispensable! mais ce qu’il y a de curieux, c’est que ce mot semble s’annuler de lui-même.
A Martin Brady : Voilà, tout s’explique… Vous avez découvert HEAT il y a un an. Mais vous venez de naître ou quoi ? (pour reprendre l’expression d’un visiteur régulier de ce blog). Non, je ne vous prends pas pour un lapin de trois semaines, vous le savez bien, mais en ce qui concerne le film de Mann, on en reparle dans vingt ans, et je suis persuadé que vous aurez changé d’avis. Bon sinon, je ne donne pas dans la pâtisserie, ne m’en voulez-pas et le « suspect voire malhonnête » ne vous était pas destiné à vous seul, non mais !
A Ballantrae : tout comme vous j’aime énormément HEAT et LE DERNIER DES MOHICANS et ne faisais que donner une préférence de coeur. Ces deux films, sont certes différents de genre, mais on reconnaît le cinéaste, sans hésitation. Par exemple dans HEAT, l’ampleur de la scène de l’attaque de la banque par De Niro, Kilmer et Sizemore, leur fuite dans L.A. avec cette utilisation de l’espace exceptionnelle dont je parlais plus haut, renvoie directement dans LE DERNIER DES MOHICANS à la scène de l’attaque de la cohorte de prisonnier britanniques par les hurons dans la clairière. Quel choix d’extérieurs fabuleux !!! Quelle ampleur !! L’inspecteur Hanna (Pacino) dans sa détermination sans faille renvoie directement au Oeil de faucon campé par Day-Lewis dans LE DERNIER DES MOHICANS. Quand les deux Mohicans et et Oeil de faucon escortant les deux anglaises sont en embuscade dans un cimetière, ils savent que leurs poursuivants n’oseront pas profaner de leur pas ce lieu sacré et se savent en sécurité. Cette scène de nuit renvoie à celle dans HEAT où nos trois gangster sont en plein cambriolage, les flics sont en planque, à deux pas, silencieux… jusqu’à ce qu’un maladroit fasse du bruit en cognant son arme contre les parois du container dans lequel ils sont planqués, alertant du coup De Niro qui était en vigie… Anthony Mann dans HEAT, entièrement tourné en extérieur, me rappelle par son audace, celle d’un Dassin dans LA CITÉ SANS VOILE… Dans LE DERNIER DES MOHICANS, Mann me rappelle par son utilisation de l’espace, la manière d’un Walsh dans certains de ses films, notamment SASKATCHEWAN…
Enfin bref. Quant à PUBLIC ENNEMIES, je ne suis pas du tout d’accord, ce film n’arrive pas à la hauteur de ceux que vous citez. Je préfère de loin le DILLINGER de Milius avec Oates et même celui de Max Nosseck avec Laurence Tierney. Pour l’utilisation de la vidéo, je trouve que Mann a fait plus fort dans MIAMI VICE, même si le film est décrié.
« Anthony Mann dans HEAT » –> Lire Michael Mann bien-sûr.
à Bertrand:
D’accord avec vous concernant le BLOB avec Steve McQueen, je garde par contre un bon souvenir du remake assez spectaculaire de Chuck Russell (et je serais curieux de voir la version de Larry Hagman).
à Ballantrae:
PUBLIC ENEMIES me parait un peu inégal et hésitant dans sa narration, même si j’avais apprécié certains aspects comme l’utilisation du numérique, l’ouverture ainsi que la dernière demi-heure du film, quand l’étau se resserre autour du personnage de Dillinger…à revoir néanmoins.
On attend toujours des éditions Blu Ray/Dvd de THE KEEP/LA FORTERESSE NOIRE et de la première réalisation de Mann le téléfilm THE JERICHO MILE/COMME UN HOMME LIBRE…
à Sullivan: mais enfin et vous tous: vous voyez méthodologiquement les films dans l’ordre de leur sortie ou quoi? un peu de désordre temporel par le diable! et les vieux films qu’on a loupés, pas question de les découvrir, alors? Et vous qui ne venez pas de naître, vous avez vu DEATH CURSE OF TARTU? Hein? Alors! je vois qu’on fait déjà moins le malin, là, hein? eh eh eh eh…
A Bertrand : THE DEVIL THUMBS A RIDE existe bien en DVD, un zone 2 espagnol, sous le titre AMENAZA DIABOLICA. A noter que l’Espagne propose un nombre incroyable de titres U.S. jamais édités chez nous…
à Sullivan: ils sont pas sympas, ces Espagnols (et ces Italiens et ces Allemands) jamais de stf semble-t’il?!
Parfois sur des éditions catalanes on a des vostf (exemple THE BLACK WINDMILL de Siegel ou PENCER’S MOUNTAIN de Daves…)
SPENCER’S MOUNTAIN…
La valeur MAIGRET TEND UN PIEGE se confirme avec les années. S’il n’a pas trop pris de poussière c’est sans doute à cause de son de ce personnage de tueur en série inconnu dans le cinéma policier de l’époque, Simenon oblige, lequel, sauf omission, n’a jamais écrit sur le milieu. Tout ce qui concerne l’interrogatoire de Jean Dessailly dans le commissariat se démarque également des habitudes du polar français (André Valmy au second plan qui mange un sandwich) c’est le genre de plan qu’on pourrait trouver chez Becker et pour une fois Delannoy a bien dirigé ses acteurs.
A signaler que Ciné Classics diffuse en ce moment un Delannoy méconnu intitulé LA PEAU DE TORPEDO, 1969. Jean Jacques Bernard qui présente le programme rappelle que Delannoy fut attaqué à cause de ses mises en scènes trop comme il faut, mais personnellement ce n’est pas ce qui me gène chez lui. Delannoy était un piètre directeur d’acteur, Morgan est presque toujours insupportable chez lui, et je me souviens du supplice subit par la vision des Sultans où Louis Jourdan et Lollobrigida sont épouvantables. Torpédo est un film dont on ne sait pas trop quel en est le sujet, hésitant entre le film d’espionnage, l’histoire d’amour, le film criminel ou le film de cavale. Il mélange tout ça sans trouver les bons dosages mais se regarde tout de même avec plaisir et sans ennui. Stéphane Audran tue son mari parce qu’elle croit qu’il la trompe mais c’est en réalité un espion traqué par la police. A partir de là les flics traquent la meurtrière en même temps que d’autres membres du réseau. On se mélange un peu les pinceaux mais on a droit à quelques bonnes séquences. Un cambriolage sudoripare et silencieux très melvillien, des cascades automobiles très Remy Julienne, des assassinats d’espion très James-Bondesques, et une Stephane Audran qu’on pourrait croire chez Chabrol si on prend le film en cours sans savoir de quoi il s’agit. Sa relation avec Frederic de Pasquale est en effet très chabrolienne. Personnellement le premier intérêt que je trouve à revoir ce cinéma de papa, souvent périmé, souvent ringard, mais pas toujours, c’est son côté documentaire parce que souvent filmé dans des quartiers de Paris qui aujourd’hui n’existent plus. Le cinéma de Grangier a par exemple pris un grande valeur documentaire, mais pas ce Maigret-ci, entièrement tourné à Boulogne. En ce qui concerne Delannoy, au sujet duquel la plupart des opinions des cahiers seront toujours valables, il mérite qu’on fouille tout de même dans sa filmo. J’y ai récemment trouvé LE GARCON SAUVAGE, qu’on pourrait presque attribuer à Duvivier.
A Emile C
Entièrement d’accord encore que dans la MINUTE DE VÉRITÉ que m’avait signalé Jean Claude Brisseau (qui a un faible pour LA SYMPHONIE PASTORALE), le ton du film, le jeu des acteurs et surtout de Morgan, frappe par sa sobriété . Je cherche à revoir le GARÇON SAUVAGE. AUX YEUX DU SOUVENIR est en revanche accablant d’ennui plombant. Signalons toutefois que Gaspar NOE défend fanatiquement les AMITIÉS PARTICULIÈRES
Je vous trouve bien indulgent pour Delannoy qui de tous les cinéastes ayant tourné dans les années 50, est peut-être celui qui mériterait le plus les critiques sur la » qualité française « , contrairement à Clément par exemple dont GERVAISE est souvent cité comme exemple d’académisme alors que je le trouve très inventif et très crédible dans la reconstitution. L’AFFAIRE SAINT-FIACRE est le plus visible des Delannoy que j’ai vu ces dernières années, mais ne vaut pas le roman qui est un des premiers Maigret ( et se situe donc à une époque bien antérieure au film ), un des meilleurs aussi ( de ceux que j’ai lu ). j’ai trouvé LES AMITIES PARTICULIERES ( vu à la télé il y a quelques années ) académique, sans style, platement illustratif. Il y a quand même un gosse qui se suicide là-dedans, ça devrait nous remuer un peu plus.
A Mathieu
Il ne s’agit pas de delannoy dont la plupart des films sont aseptisés, ripolinés et correspondent parfaitement à la définition de qualité française dans ce qu’elle a de glacé et d’impersonnel. Mais il y a des titres qui échappent à cela MAIGRET TEND UN PIÈGE, dans mon souvenir LE GARÇON SAUVAGE et en partie PONTCARRAL. MACAO était regardante tout comme sa version du BOSSU. Quelque films n’intéressent que par leur sujet : DIEU A BESOIN DES HOMMES où Delannoy parvient à anesthésier à coup de contre plongées le beau scénario d’Aurenche et Bost. Mieux vaut oublier le sinistre CHIEN PERDU SANS COLLIERS et LA PRINCESSE DE CLÈVES
à Emile C: j’ai rien à dire sauf que je suis d’accord avec vous pour ce MAIGRET, formidable, et ST FIACRE aussi, malgré son décor provincial. Je me régale des décors parisiens dans les Grangier les Constantine, dans CET HOMME EST DANGEREUX, on voit derrière Lemmy Caution grimé en fonctionnaire dans la rue une enseigne « Abats en Gros »! Génial, juste avant que Colette Déréal le félicite pour son déguisement, ce à quoi il répond « Et encore tu m’as jamais vu en danseuse nue! »! ben finalement j’avais qqch à dire elle est bonne celle-là!
A Bertrand Tavernier : en quoi trouvez-vous CHIEN PERDU SANS COLLIER sinistre ?
A Edward
Je pense que c’est un film que la mise en scène rend paternaliste, faussement audacieux. Je sais que truffaut est encore plus violent et mes souvenirs sont lointains mais j’avais trouvé le film guindé sur un sujet qui était brulant
Merci. Paternaliste ? Sans doute sent-il un peu l’eau bénite (la filmographie du réalisateur est en accord!). Audacieux, certainement pas. J’ignore s’il avait cette prétention. Le jeu des enfants est excelllent et Gabin est tout en retenue. Le sujet me paraît original pour l’époque et traité avec âpreté. Impression erronée ? Le côté guindé m’a en tout cas échappé. Dalban en funambule n’a vraisemblablement jamais été autant à contre-emploi, sans que cela deserve le propos. J’ai le souvenir que Truffaut vomissait Delannoy de sorte que son jugement me semble fortement sujet à caution.
Bonjour à Bertrand Tavernier et aux blogueurs
J’ai été moi aussi déçu par THE MURDERER, très vanté par un ami, car un truc un peu malhonnête vis à vis du spectateur se passe sur l’écran : le héros est, au début, une créature filmique pitoyable et ultra-réaliste, un loser sordide promis à une fin désespérée. Et l’on attend, même sous l’angle du cinéma de genre (ici, le polar asiatique)le point de vue, aussi noir qu’il puisse être, de celui qui constate et dénonce. Or, sans aucune justification scénaristique et contextuelle, ce personnage devient une espèce de héros de mangas qui, à trois ou quatre reprise en cours de film, échappe, au mépris de la vraisemblance (les invraisemblances évoquées par BT) à des poursuivants nombreux, acharnés et surarmés. Un peu comme Buster Keaton dans COPS ou FIANCEES EN FOLIE. Il y a là quelque chose d’un contrat tacite avec le spectateur qui n’est pas respecté. C’est dommage.
To Bertrand Tavernier, It’s actually Peg LaCentra singing for Ida Lupino in THE MAN I LOVE. That is Lupino’s own voice in ROAD HOUSE. My source for this information is an immensely useful book by Alan Warner called WHO SANG WHAT ON THE SCREEN, which you should obtain forthwith. And that’s Robert, not Alan, Alda as the gangster in THE MAN I LOVE (« Is he his father or his son? » « He’s his father. » -Harold Pinter, BETRAYAL).
Sondheim’s « tres belle musique » for STAVISKY has never been released on an American label CD (there was RCA LP) and the CAM Soundtrack Encyclopedia version could not be found alongside more obscure titles like LES SEINS DE GLACE and LA BUGIARDA in the music section of Barnes and Noble stores back before DARK AGES II moved in. Or is that LES SEINS DES GLACES?
To Michael Rawls
In fact I knew it. I just remembered that Edward Chodorov told me how he fought with the Fox executives to keep Lupino’s Voice. Did she sung in other films ?
To Bertrand Tavernier, ROAD HOUSE is the only film that I know of in which Lupino’s own singing voice was heard. Speaking of dubbing, is it really true that Georgie Auld dubbed Dexter Gordon’s saxaphone playing in UNCHAINED (1955)?
A Michael rawls
Yes and maybe because Dexter being in a kind of jail did and could not have anymore his musician card…
Richard Williams était un acteur génial effectivement. Il aurait fait un tabac dans le cinéma américain des années 30-40, pourquoi pas dans un film noir ou dans une comédie de Hawks. Il aurait pu être une star, un mélange entre Cary Grant et James Cagney. C’est vraiment dommage de mourir juste après son premier grand rôle mais au moins il aura accompli quelque chose sur cette terre avant de la quitter. Et il faut dire que Capra était un des meilleur directeur d’acteur de tous les temps.
Oui, L’image manquante est un fort beau film et R Pahn l’indispensable témoin de ce génocide atroce et ce avec une retenue, un sens du dispositif qui égalent aisément -on ne le dit pas assez- le Lanzman de Shoah ou le Ophuls de Hotel Terminus.
N’oublions pas dans ce magnifique travail d’analyse ( oui, l’émotion n’est pas assenée , elle sourd de choix qui s’adressent autant à l’intelligence qu’au coeur , ce qui me semble indispensable face à un tel phénomène)entrepris depuis qqs années le volet glaçant qu’est Duch, portarit d’un bourreau ordinaire qui n’a rien à envier au travail d’ H Arendt sur l’horreur « quotidienne », normative et pouvant coincider avec la culture.
Autre cinéaste important que Wang bing qui aborde sur un mode différent de Still life la mue spectaculaire du paysage chinois avec les dommages humains collatéraux que cela suppose.Ampleur d’un film fleuve qui dépasse la simple notation documentaire pour aller vers des contrées zoliennes!
Du même Wang Bing, je ne saurai trop conseiller, malgré sa dureté extrême, Le fossé: une analyse implacable de la Révolution culturelle qui n’a rien à envier aux horreurs du génocide cambodgien tant l’humain a été piétiné, nié jusqu’au bout d’une logique terrifiante.
Quant à epouses et concubines, il fut de bon ton de le moquer notamment aux cahiekuptibles mais je vous rejoins sur ses qualités qui confirmaient avec uns scénario plus serré les qualités plastiques de Ju dou et du sorgho rouge.
J’aime beaucoup aussi deux de ses films de sabre Hero et Le secret des poignards volants, bien supérieurs à l’opportuniste Tigre et dragon mais encore une fois décriés par un pan de la critique.
De temps à autre,j’aime voir de « grandes formes » proches de l’opéra ou de Shakespeare, formellement sophistiquées(comme le dit si bien P Berthoumieu ds sa trilogie sur le cinéma américain chez Rouge profond).
On peut aimer et Wang bing et Z Yimou, et J Zhangke et J Woo.Pourquoi choisir à tout prix?
A Ballantrae : « Pourquoi choisir à tout prix ? » … Pourquoi se poser la question ! Et sinon, je pense que sans la réussite mondiale des tigres et des dragons de Lee, Yimou n’aurait pas mis en chantier dans la foulée son Hero et ses poignards…
J’ai peut être été un peu dur avec Tigres et dragon qui n’est pas dénué de qualités mais me semble un brin surévalué ( l’autre film de la période signé par ang Lee lui étant en revanche sous évalué Chevauchée avec le diable)quand on observe par exemple la tenue de certains décors, le découpage de plusieurs séquences dont le filmage manque du dynamisme inhérent au genre (cf notamment les King hu comme L’hirondelle d’or).
Je me souviens que les deux film de Z Yimou ont été minimisés au profit de Tigres et dragon sous le prétexte fallacieux que celui-ci aurait été le premier ou ang Lee a eu le flair de reprendre un genre au moment où l’Occident était enfin prêt à l’accepter.Pour ce faire, il a réussi à créer un compromis intelligent entre film d’arts martiaux authentique et version américaine du genre.Ang Lee est un très habile cinéaste sachant souvent flairer le bon moment pour s’essayer à un genre: Salé sucré, Tigre et dragon, Brokeback mountain ( très surestimé à mon avis). A l’opposé, des films comme Ice storm (retour tragique vers les 70′ et film polyphonique) ou Chevauchée …ont été peu vus et recèlent au moins autant de qualités que ses titres à succès.
Yimou est un esthète cela est certain et la beauté des scènes de combat de Hero (notamment la bagarre à dominante jaune dans la forêt ou encore l’attaque de l’école avec la pluie de flèches, le combat rêvé à fleur d’eau) comme de celles du Secret…( l’attaque dans la forêt de bambous, le combat hyperbolique de la fin) prolongent et dépassent celles de Tigre et dragon.et les films offrent d’autres beautés que ce soit les décors naturels de Hero qui montrent la diversité géographique sidérante de la Chine, la scène de danse tellement sensuelle du Secret…J’ai un peu l’impression que Yimou transcende ici son sens plastique en le dynamisant comparativement à ses débuts.
Son passage par le réalisme ne manquait pas d’intérêt: Qiu Jiu, une femme chinoise montrait un périple ds la chine contemporaine plus de vingt ans avant A touch of sin (d’ailleurs la violence est passée de symbolique à explosive, je pense notamment aux passe droits, à l’analyse du pouvoir décentralisé) mais aussi Vivre qui a été un peu oublié et montrait aussi justement que Adieu ma concubine l’évolution de la Chine maoiste.
Certes, Z Yimou est maintenant un cinéaste plus officiel que JZangKe ou Wang bing mais il fut parmi les premeirs à nous offrir, à la manière d’un Kurosawa (toutes proprtions gardées: je ne le mets pas aux mêmes sommets que le génie japonais), la preuve qu’en Asie un cinéma était sur le point d’émerger.
Je vous conseille, Bertrand, si ce n’est fait de voir en DVD City of life and death de Lu Chuan dont je parlais il y a longtemps et qui me semble tjs, après vérification, un film important sur un épisode encore méconnu ici et qui agite des requelles sinojaponaises très vives: le massacre de Nankin (20000 soldats chinois exécutés, plus de 20000 femmes violées par les soldats japonais dont bcp massacrées ou mortes à force de sévices, au total entre 200000 et 300000 victimes) et la tentative par qqs Occidentaux de recueillir ceux qu’ils pouvaient dans les zones de sécurité (250000 personnes enfermées dans 4 kms carrés mais les Japoa,is venaient se servir en « filles » ).Parmi ces schindler de Chine un dénommé john Rabe employé de Siemens et membre du parti nazi est parvenu à sauver qqs milliers de civils tt comme Minnie Vautrin une missionnaire américaine.
Le film est parfois d’une dureté extrême mais nécessaire à mon sens face notamment aux révisionnistes japonais tout aussi désolants que ceux qui polluent la pensée européenne.
Ce n’est pas un film dossier enfin mais un film formellement impressionnant doté d’un photo impressionnante, d’un sens de l’espace aussi admirable en extérieurs qu’en vase clos, d’acteurs dirigés de manière très juste et son écriture est serrée et percutante.
Le cinéma chinois n’a pas fini d’étonner.Je n’ai pu voir encore Black coal.Qui l’a vu? J’ai envie consécutivement au superbe Touch of sin mais l’an passé un autre film chinois vanté ici et là m’avait un peu atterré: People mountain, people sea…Des avis seraient les bienvenus.
a Ballantrae
Dès que je peux, je vais suivre votre conseil. Je n’ai pas vu CITY OF LIFE AND DEATH mais divers romans recréent ce terrible épisode
A Ballantrae
D’accord sur CITY OF LIFE AND DEATH que j’ai trouvé meilleur que ce que j’en attendais : spectaculaire sans sacrifier au spectacle, dur sans excès ni complaisance, séduisant plastiquement sans joliesse, ni coquetteries. On pouvait craindre également de voir les Japonais vociférer et éructer comme ils le font eux-mêmes dans leur propres films (de sabres, souvent) or ils commettent les pires atrocités dans le calme (la petite fille défenestrée), ce qui est plus effrayant encore. Très beau travail sur le son également. Le film réussit le prodige de ne jamais être pesant malgré le sujet. Impressionnant, c’est le mot, au sens primitif même d’impression sur la mémoire.
A ballantrae : j’ai vu BLACK COAL qui m’a un peu déçu. La revue positif en faisait sa couverture du numéro de juin, ce qui m’avait encore plus incité à le voir. L’intrigue est on ne peut plus foutraque, du coup ne reste que la forme. Deux ou trois scènes à retenir de ce côté (je ne détaille pas pour ceux qui ne l’ont pas vu) et qui feront tout de même un film dont on garde le souvenir. Mais il faudra que je le revois un jour pour confirmer ou infirmer ce jugement à chaud.
Certains films chinois sont effectivement de vrais petits chefs d’oeuvre (sans remonter trop loin DETECTIVE DEE, STILL LIFE par exemple et je n’ai pas vu encore TOUCH OF SIN…) mais une certaine mode place certains bien plus hauts qu’ils ne sont… THE GRANDMASTER de Wong Kar-Wai (qui rentre c’est vrai dans le sous-genre des films hongkongais) est par exemple d’une grande maîtrise technique et plastique mais il m’avait laissé assez froid (contrairement à son chef d’oeuvre IN THE MOOD FOR LOVE).
Dans le cinéma asiatique contemporain, je suis beaucoup plus bluffé par le cinéma sud-coréen où des scénarios solides à forte empreinte sociale prennent aux tripes (dans des genres différents THE CHASER, POETRY…)
Comme plusieurs d’entre vous, j’avais été légèrement déçu par THE MURDERER de Na Hong-jin alors que son film précédent THE CHASER m’avait complètement emballé. En revanche j’avais vraiment pris mon pied en allant voir un film sorti en salle deux semaines avant THE MURDERER en juillet 2011 (c’était assez marquant, les 2 films ayant été en même temps à l’affiche) : J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE de Kim Jee-woon (le réalisateur de 2 SOEURS, A BITTERSWEET LIFE et LE BON, LA BRUTE ET LE CINGLÉ) qui confirmait là un véritable talent sans complexe. Un nom qui compte parmi les sud-coréens en activité.
à D Doussin: c’est exactement ce que je pense de GRANDMASTER dans lequel la perfection technique m’a tellement refroidi, j’ai senti une telle volonté d’en mettre plein la vue au niveau plastique que j’ai rien compris à l’histoire ni pourquoi tous ces gens se filent des claques avec un tel sérieux, ni en quoi c’est supposé être profond, pourtant j’aime l’action! Trop de perfection nuit! on ne peut pas soigner chaque département de la production d’un film et croire que la somme des réussites va forcément produire la réussite du film en question… bref j’ai pas compris en quoi le héros était un type extraordinaire.
ça pose une question, celle du film parfait, un film doit-il être parfait? en ce moment, je me tape une série de petits budgets de la RKO, hier CAT PEOPLE, certains ne sont pas des chefs d’oeuvre mais leur force de suggestion (le film continue dans la tête) est supérieure, et admirable. Et les moments réussis sont grandioses, vivent les films imparfaits, comme la vie! Qui revoit encore CHANTONS SOUS LA PLUIE, chef d’oeuvre absolu de la comédie musicale sans baîller d’ennui? (aïe je vais me faire engueuler tant pis).
Hola Martin Brady
J’ai encore revu pour la 15ème fois CHANTONS et j’adore toujours cela même si je le connais par coeur. Et si j’adore pas mal de scènes de BEAU FIXE, les défauts me gênent à commencer par la photo et la sous utilisation de Charisse
par exemple je préfère l’imparfait BEAU FIXE SUR NEW YORK à CHANTONS mais ça doit être maladif…
(et franchement, à la petite Reynolds autour d’un canapé, je préfère de loin Cyd Charisse sur un ring de boxe!) mais UN JOUR A NEW YORK, c’est formidable (et parfait) bref.
A Martin Brady
Un Jour a New York ? Kathryn Grayson ? moi j’adore GIVE A GIRL A BREAK, PAJAMA GAME, FUNNY FACE (pas beaucoup DAMN YANKEES) et LES 7 FEMMES DE BARBEROUSSE
à Bertrand Tavernier: non, UN JOUR A NEW YORK c’est ON THE TOWN (Donen+Kelly), vive Alice Pearce! C’est le seul musical que je peux revoir sans y déceler la moindre mièvrerie et il est techniquement irréprochable (voir la lumière des premier plan et dernier!). D’accord pour PAJAMA GAME pour la pêche de Doris Day, après je suis incapable de revoir CHANTONS après les 10 1ères ‘ (« Dignity, always dignity »), je ne comprends pas Debbie Reynolds, cette actrice me reste totalement étrangère. Pour BEAU FIXE, c’est vrai que le scope ne convient pas, et que Cyd surgit là-dedans en personnage secondaire mal intégré, c’est bien un film imparfait mais séduisant, telles certaines femmes singulières! j’avoue que 7 FEMMES ne m’a pas plu et GIVE A GIRL est charmant dans sa simplicité, tiens ça me donne envie de revoir MOVIE MOVIE! Jamais vu FUNNY FACE.
à Betrand Tavernier: pour Donen, j’ai jamais été foutu de voir ARABESQUE: dans 50 (futur 100), un auteur sur 2 le place au-dessus de CHARADE, ce qui signifie que l’autre auteur sur 2 pense que ça doit être pas mal! J’ai loupé ce film depuis 40 ans, curieux! je vais réparer cette erreur vite! merci si vous avez un avis…
Oh bah non alors Martin-Brady que diable!!!
Comment peut-on bailler d’ennui devant SINGING ???
Les films ne sont pas forcément intouchables mais SINGING IN THE RAIN, c’est le cadeau fait au spectateur par excellence : scénario brillant, beaucoup d’humour, décors variés et jamais « décoratifs », des chansons en veux-tu, des numéros en voilà. Seul petit bémol, l’humiliation de Jean Hagen à la fin que je trouve méchante et puérile (même si c’est une conne, c’est pas une raison) façon cours de récré. C’est peut-être la loi du genre mais on trouve ce genre de gamineries pas finaudes avec le « racisme anti-moches » d’UN JOUR A NEW-YORK.
Cela dit, Martin-Brady, là vous poussez Mémé dans les orties!!
A MBrady : Vous avez bien le droit de bailler. Il faut revendiquer le droit de ne pas aimer.
Pour CHANTONS SOUS LA PLUIE, j’ai l’expérience inverse. Je me suis mis à bailler quand on a voulu me le montrer.
Je n’imaginais pas que j’allais autant me marrer dès le début, et autant apprécier les inventions propres au genre.
Et puis, un film dont le personnage principal est…le cinéma !
Oui, là, MB, vous exagérez ! Franchement, tous les standards de Brown et Freed sont du meilleur cru : que ce soit l’entraînant et drôlissime « Make ‘Em Laugh » dans la prestation inoubliable de Donald O’Connor, le jubilatoire « Moses » pour ses rimes et son écriture étourdissante, le romantique « You are my lucky star », le rafraîchissant « Good Morning » par le trio Kelly/O’Connor/Reynolds (ne l’avez-vous jamais chantonné quand vous êtes joyeux ?), en passant par le « Broadway Melody Ballet » où on découvre les jambes de Charisse ou le magique et éternel « Singin’ in the Rain » par Kelly… et j’en passe ! Il y a aussi toutes les scènes comiques, Kelly au début avec son « Dignity, Always Dignity » qui nous emmène vers des flashbacks étourdissants, le « No No No…. Yes Yes Yes » infirmé par ce qu’on voit à l’image (le passage au parlant n’est décidément pas gagné), et puis bien-sûr la scène finale avec Jean Hagen, ridiculisée quand nos amis Millard Mitchell, Gene Kelly et Donald O’Connor font tomber le rideau dévoilant qu’elle est en fait doublée par Debbie Reynolds en coulisse, juste derrière elle, car sa voix horriblement nasillarde et aiguë ne lui permet pas de s’exposer lors du passage au parlant alors que c’était une star du muet… Bon, je ne sais pas pourquoi je raconte tout ça, c’est tellement connu, pour le plaisir sans-doute ! On pourrait même me dire : « Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme ! On pouvait dire… Oh ! Dieu !… bien des choses en somme… Alors rajoutons la perfection du film due à Donen certes mais surtout au tyran Kelly qui, monstre de travail, ne permettait pas la moindre faiblesse dans l’exécution de ses chorégraphies, et il avait raison, la perfection dans ce domaine étant de mise. N’oublions pas la photo foisonnante d’Harold Rosson bien aidé par le grand John Alton qui avait déjà bossé sur UN AMÉRICAIN À PARIS, et parmi d’autres qualités évidentes du film, citons l’histoire et le scénario mitonné par le tandem Adolph Green et Betty Comden et CHANTONS SOUS LA PLUIE reste un plaisir éternel pour les yeux, les oreilles et les zigomatiques !!
Mais ma préférence dans le domaine va au chef-d’oeuvre de Minnelli THE BAND WAGON qui faisait mentir ce qu’avait annoncé Astaire plusieurs années auparavant, à savoir son retrait du métier… et le voyait revenir au plus haut niveau artistique qui soit. Si je cite ce film, c’est aussi parcequ’il est très proche de CHANTONS SOUS LA PLUIE, ne serait-ce que par son même producteur Arthur Freed et son duo de scénariste Green/Comden (aidés il est vrai par Alan Jay Lerner et Norman Corwin…), et une histoire assez proche. Ce film est en quelque sorte un jumeau plus sérieux du précédent, mais va je trouve encore plus loin dans la qualité d’écriture et si on aime le « Broadway Melody Ballet », le « Girl Hunt Ballet » de THE BAND WAGON lui est supérieur. Quel magnifique hommage au film noir ! Et Astaire et Charisse y sont superbes, tout comme ils le sont dans l’inoubliable pas de deux dans le parc… That’s Entertainement !!
Dans le domaine des musicals, il ne faut pas retirer à Fred Astaire d’avoir eu aussi un certain sens de l’humour et de la fantaisie.
J’adore par exemple la manière décalée dont est filmée la célèbre chanson de SWING TIME « The way you look tonight » , alors qu’elle aurait pu l’être au premier degré :
Astaire est au piano dans une touchante rêverie amoureuse alors que sa belle dans la salle de bain a la tête couverte de grotesques produits de beauté. Le parti de tourner la poésie en comique est étonnament kellyesque pour l’époque.
à AA: je suis d’accord sur le personnage de Alice Pearce qui peut être considéré comme ostracisé par le scénario à cause de sa laideur, mais notez que c’est moins sa « mocheté » que son naturel et ses mauvaises manières qui sont mises en avant, j’ai fini par juger (par complaisance?) que sa grossièreté naissait de sa timidité à être affublée du statut de petite amie, et cette timidité est touchante. Elle éternue grossièrement parce qu’elle est embarrassée, j’ai vu (vécu) ce genre de comportement (on n’ira pas + loin!)! Alice Pearce évacue le film de toute mièvrerie, danger qui guette tout musical des 50 (pendant ses moments à elle) mais on peut voir son personnage autrement et d’un point de vue négatif, c’est vrai.
Vous convenez avec le personnage de Jean Hagen et son humiliation publique que CHANTONS montre ses failles (par ailleurs, Hagen est formidable, je l’adore dans CHANTONS mais cette scène est une grossière erreur), j’y ajoute les chansons sirupeuses (pour moi crispantes) de déclarations d’amour de Kelly à Reynolds « you were meant for me » ou « you are my lucky star », ce film est un mélange de bon (le début, merveilleux) et de mauvais, mais le problème c’est Debbie Reynolds qui apporte au film une hygiène puritaine, une santé WASP de femme virtuellement enceinte d’où la moindre possibilité d’érotisme est lâchement refoulée, bref elle est bien en-dessous de la vérité de Charisse, Hayworth, et même G Rogers qui m’a fait hurler de rire dans les Astaire, et d’autres, comme c’est l’actrice principale ça fait beaucoup!
Je retire « baîller d’ennui » pour remplacer par « se crisper » si vous voulez, no hard feelings, right? récupérons la grand-mère!
à Sullivan: bravo pour l’érudition et l’enthousiasme.
J’ai un peu exagéré avec « baîller d’ennui » mais j’ai vu ce film deux ou trois fois et je n’y arrive pas, le virus Reynolds, sans doute. Les scènes de comédie stricte sont les meilleures, et la perfection technique même de la scène du canapé ne me convainc pas, par contre O’Connor grimpant aux murs!…
à MP: Astaire était un acteur merveilleux, sur le même terrain que Cary Grant et dans les scènes de comédie, il était aussi bon.
A Martin Brady : CHANTONS SOUS LA PLUIE est pour moi un refuge, une sorte de « CABIN IN THE SKY », un film qui m’amène de l’émotion quand je me sens dur, renfermé, insensible, qui m’apporte des larmes de joie, qui me fait rire… en un mot : un film qui me réanime quand j’en ai besoin. Alors on peut le dire, oui, je suis enthousiaste !!! Et le couplet sur Debbie Reynolds et son « hygiène puritaine, une santé WASP de femme virtuellement enceinte d’où la moindre possibilité d’érotisme est lâchement refoulée »… Ne pourrait-on dire la même chose de Judy Garland dans LE MAGICIEN D’OZ, LE CHANT DU MISSOURI et d’autres titres ?? Elle n’est pas bien sexe non plus, et ne dégage pas plus d’érotisme charnel à la Charisse ou à la Heyworth, que la petite Reynolds… Non… là, il s’agit de talent et basta cosi !! On parle de comédie musicale là, pas de film noir, de drame érotique ou que sais-je… Dans un musical, la musique, les paroles et la chorégraphie priment. Et dans CHANTONS SOUS LA PLUIE, à ce niveau-là, comme à d’autres niveaux, on atteint la perfection absolue, pour reprendre le terme que vous avez bien voulu concéder en début de discussion, même si j’ai bien compris que c’était pour vous un qualificatif que vous ne validiez pas.
A MinettePascal : Mais… l’aérien Astaire était pétri d’humour et de fantaisie !! Et peut-être tout autant, à mon sens, que son alter ego terrien, Kelly. Il faut effectivement le revoir dans les 9 titres produits par Pandro S. Berman à la RKO de 1933 à 1939 avec Ginger Rogers… Il n’y a pas que dans SWING TIME qu’il est léger, revoyez toute la série ! Je pense notamment à TOP HAT et ses dialogues avec le magnifique Edward Everett Horton, quel duo, j’en pouffe rien que d’y penser… ! Mais on pourrait se souvenir également de SHALL WE DANCE et la scène en patins à roulette, ou celle où Astaire imite l’accent russe se faisant passer pour « l’entreprenant Monsieur Petrov ». Je revois également la scène drôlissime où il balade une dizaine de chiens sur le pont d’un paquebot de croisière…
Simplement… Fred Astaire était l’aristocrate des claquettes et de la danse et Gene Kelly, plus râblé, avec un centre de gravité plus bas, en était le bouffon, le pitre, l’espiègle…
A Martin Brady
Merci pour Alice Pearce dont je ne connaissais que la tête (la pauvre, ….non j’ai rien dit!)et je suis fan de Jean Hagen. J’aime dans la VF de SINGING quand elle dit: » Ze les hais ces z’hommes! ». Je viens de la revoir dans LE GRAND COUTEAU d’Aldrich : elle y est sensationnelle.
Et Grand-Mère est remise..
A Martin Brady… après avoir réconcilié Grand-Mère, ergoté sur la perfection (ou non) de CHANTONS SOUS LA PLUIE… et après avoir évoqué l’érotisme torride de Cyd Charisse, que je ne vous conteste bien-sûr pas, (bien au contraire !)… je viens de me marrer en me souvenant qu’il y en a pour tous les goûts : Kelly danse avec une Charisse vert pomme alors qu’Astaire danse avec une Charisse rouge bonbon !! Et quand on parle couleur et érotisme, me revient toujours à la mémoire ce magnifique dialogue de Marielle dans LES GALETTES DE PONT AVEN (mais le portique censure du blog va peut-être faire biiipp…) :
« Je vais peindre… Je vais peindre comme un fou : tes yeux, ta bouche, ton front… ton corps… tes cuisses… ton cul. Ah oui aaah… ton cul surtout. Montre le moi. Hein ? Ah oui, montre, montre le moi. Là cambre-toi, là…Tend le bien vers moi. Ah comme il est beau. Pfouuu on dirait un Courbet, dis-donc. Quel génie il faut pour peindre ça. Quand je pense que ce mec en a peint des milliers et qu’on l’a poursuivi pour obscénité alors qu’il a peint la plus belle chose au monde, un cul. Oooh. Un cul de bonne femme. Oh il est magnifique. Je vais le peindre en vert, en bleu, en rouge, en jaune, aaah j’y passerai des jours, des nuits, des mois s’il le faut. Ahhh Nom de Dieu de bordel de merde, ah tu me rends dingue, tu me rends fou. Ah je suis fou. Oooh pose toi bien là. Ooh ton cul, ton cul, c’est mon génie. »
A Sullivan : C’est vrai et ce film où Astaire parcourt un magasin de jouets en se servant de tout.
La fantaisie et l’élégance… mais Kelly a quand même été obligé de trouver autre chose pour sortir du lot, d’autant qu’il n’avait pas le physique, comme vous le dites, pour l’élégance.
Il va un peu plus loin dans la comédie, n’hésite pas à briser l’image smart du danseur de claquettes et ne fait jamais de démonstrations neutres, toujours en se servant d’éléments du décor, des costumes, de la situation.
Au début de CHANTONS, il n’est pas loin de Laurel et Hardy.
Pour ce qui est du chant, je pense qu’Astaire avait le plus bel organe mais Kelly avait lui aussi la manière de tirer le meilleur du peu qu’il avait.
A Minette Pascal
Astaire, c’est l’aristocrate, Kelly le plebeien, l’athlétique. Ce qui n’empêche pas la légèreté comme en témoigne son magnifique solo dans SUMMER STOCK et dans beaucoup d’autres films. Avez vous lu l’essai remarquable d’Alain Masson sur Kelly que j’ai vanté ici même. Il explique très bien ce qui a uni Donen et Kelly puis ce qui les a séparé et je dois dire qu’INVITATION À LA DANCE, GIGOT et autres film ne m’ont guère convaincu et qu’il a rarement retrouvé l’invention dont il fait preuve même dans des films qu’il ne signe pas. Il y a des séquences qui portent sa marque chez Taurog et autres artisans. Et Astaire détestait sa voix.
A MBrady : Oui, sans doute meilleur acteur que G. Kelly, plus fin.
Mais on adore les deux et on ne choisirait pas.
à A Angel: Jean Hagen dans ASPHALT JUNGLE est prodigieuse dans un rôle ingrat: ses trouvailles de comportements lorsqu’elle vient squatter Hayden dont elle est amoureuse, et qu’il lui dit de ne pas se faire d’illusions à ce sujet, tout ce qu’elle arrive à faire passer de gêne, d’amour frustré, d’irritation refoulée devant entre autres le désordre de la piaule, de nervosité nourrie de plein de causes dont l’une est son job de danseuse ou d’entraîneuse dont vous sentez qu’il commence à l’user moralement (elle vient de se faire virer, je crois). Ceci dit, à part son rôle secondaire d’entraîneuse dans SIDE STREET et PANIQUE ANNEE ZERO où son rôle est effacé et conventionnel, j’ai du mal à trouver d’autres bons films dans sa filmo: si, MADAME PORTE LA CULOTTE, mais elle était éclipsée par Judy Holliday, qui ouvre le film, géniale! (Hagen s’offre Tom Ewell, le mari de Holliday et celle-ci est pas d’accord, d’où coup de feu, procès, et film!).
À Sullivan: bravo! et vive Joël Séria! et Jeanne Goupil a nourri tous mes fantasmes: MAIS NE NOUS DELIVREZ PAS DU MAL, CHARLIE ET SES DEUX NENETTES, on est en plein dans la mouvance de 68!
A Bertrand Tavernier : Je lirai cet essai sur Kelly.
Astaire n’aimait pas sa voix mais c’est amusant de le voir dans son dernier musical filmé, la vallée du bonheur ( bon sang quel ratage ces chansons !), où son costume de vagabond semble un clin d’œil à la fantaisie débridée de Kelly.
A Alexandre Angel et Martin Brady : Je ne partage pas du tout votre avis sur la soi-disante humiliation publique de Jean Hagen. Déjà ce n’est pas l’humiliation publique de Jean Hagen, mais l’humiliation publique de Lina Lamont. Ça c’est dit ! Ensuite vous avouerez qu’elle le mérite bien, au-delà du fait qu’elle soit une conne, comme vous dites AA… Et je suis convaincu qu’un traitement tel que celui-là dans un cas comme celui-là ne peut être que salvateur. De plus, vous oubliez l’autre côté de la médaille : cette « gaminerie » comme vous dites, permet de sortir de l’ombre celle à qui tous les honneurs étaient dûs : Kathy Selden (Reynolds). C’est une réhabilitation en quelque-sorte. Humiliation vs réabilitation ? Tiens je vais aller revoir LA VENUS A LA FOURRURE de Roman moi…
Sullivan
Vous revoilà à écrire des cochoncetés ! Non..vraiment
à Sullivan: mais c’est surtout un moment gênant pour moi, cette révélation, j’en ai mal pour elle.
Pour la comédie musicale dans laquelle « la musique prime », je préfère penser qu’un film est un tout: ce n’est pas les bagarres et les cavalcades qui priment dans les westerns, ni les coups de feu dans les films noirs. Un musical doit s’équilibrer dans tous les domaines: les scènes de comédies qui nous charment dans CHANTONS ne sont pas musicales. En plus, certaines chansons que vous citez ne me charment pas, moi, pas ma faute. Et pour Judy Garland, désolé, votre exemple est mal choisi: elle, elle vit, elle respire, elle est physique, quand elle chante par exemple à 3h du matin avec son orchestre dans le petit bar où James Mason la découvre, et dans OZ, ses seins gonflent déjà son tablier de petite fille ce qui a posé des problèmes à la production qui ne savait pas comment les cacher… Même dans les Rooney elle est déjà physique, touchante, elle pulse! Elle est à des lieues au-dessus de Debbie, faut pas charrier, je ne parlais pas que d’érotisme je parlais de paraître vivante à l’écran! même des filles comme Vera-Ellen sont au-dessus de Reynolds, ou la superbe Ann Miller, ou… Et parlez-moi de Betty Garrett dans MY SISTER EILEEN, personnage incroyablement contrasté rien à voir avec votre petite mignonne qui cache sa culotte quand elle saute sur un canapé (geste qui donna des sueurs froides à Truffaut)! tiens! EILEEN de Richard Quine, le voilà votre chef d’oeuvre du musical si vous voulez que je vous en cite un (Bob Fosse prodigieux)! Un vrai chef d’oeuvre, rien à jeter! Votre couplet sur CHANTONS est très érudit (ce qui est bien) mais moi je dis: CONGA!
A Sullivan
Par rapport à Lina Lamont, et blague à part, la question est intéressante. Dans le vrai vie, elle aurait mérité une bonne leçon, aussi dure soit-elle, mais pas comme quelqu’un que l’on entrave dans un carcan et que l’on bombarde de tomates sur la place du village, comme au Moyen-Age. C’est un peu à ça que j’assiste à la fin de SINGING et cela me paraît révélateur d’une certaine propension qu’a parfois le cinéma américain à infantiliser le spectateur en voulant le mettre à bon compte du côté des rieurs. Je ressens cet état d’esprit chez Clint Eastwood, notamment, dans sa manière, à titre d’exemple, de brocarder, dans le splendide SUR LA ROUTE DE MADISON, la stupidité des (grands)enfants de Meryl Streep, même s’ils se dédouanent in fine. Devant leur puritanisme caricatural, n’importe quel spectateur se sent, à bon compte, plus intelligent. Ce n’est pas ce que je préfère ressentir dans les films que j’aime.
A Alexandre Angel
Dans les comédies de Plaute à Molière en passant par Shakespeare certains méchants reçoivent des châtiments trop sévères et qu’on peut juger immérité. Cela fait partie du genre. D’autre part Lina Lamont a humilié elle aussi beaucoup de gens et, crime impardonnable dans le cinéma américain, refuse même d’écouter le producteur. Ne pas oublier aussi qu’un tel châtiment, vu le contexte d’Hollywood sera effacé 15 jours après sauf si elle fait un flop avec un nouveau film parlant. Il ne faut quand même pas surdramatiser son humiliation dans le contexte des années 30
A Alexandre Angel : Pardon… ça m’a échappé.
à A ANGEL: et dans GRAN TORINO, les enfants du héros sont rabaissés par faire-valoir pour celui-ci, j’aurais préféré que Clint offre la bagnole à sa fille… Il y a d’ailleurs une scène où Clint appele son fils à l’aide parce qu’il est fauché et n’ose pas lui demander de l’argent et raccroche, ce qui rattrape un peu.
A Alexandre Angel : Je comprends votre position… mais je vois la chose autrement. J’apparente cette scène où Lamont reçoit un juste châtiment (à la hauteur des nuisances qu’elle a causées), à toutes les « bonnes morts » réservées aux méchants de ces films que nous aimons, qu’ils soient d’action, western, film noir, aventure et j’en passe. Il ne faut pas oublier que le cinéma est aussi un exutoire, une manière de vivre certaines émotions par procuration. Et l’humiliation de la Lamont me fait du bien point barre, et la réhabilitation de Selden aussi.
Maintenant, si on se place dans la réalité, c’est une toute autre chose… mais nous savons faire la différence non ?
A Martin Brady : Je sais que je ne sais rien comme disait l’autre, et puis Geronimo d’abord.
Au sujet des « méchants » de théâtre et de cinéma, il faudrait les répertorier tant le sujet est intéressant, entre les caricatures et ceux qu’on n’arrive pas à détester…
Les plus intéressants sont ces derniers, car ils semblent inspirer malgré tout de la sympathie aux créateurs et même parfois être préférés aux héros.
Je suis sûr que tout le monde a un exemple ou deux.
A Alexandre Angel : Mon « Pardon… ça m ‘a échappé » était la réponse à votre « Vous revoilà à écrire des cochoncetés ! Non..vraiment », ça ne vous aura pas échappé…
A Sullivan et à Bertrand
Sur CHANTONS SOUS LA PLUIE, j’exprimais juste une petite gène qui m’a fait extrapoler sur une certaine tendance à la désignation facile dont on abuse dans certains films. Et j’ai pensé à Clint Eastwood (voyez un peu le grand écart)chez qui j’ai cru constaté cela jusque dans ses films les plus récents. D’où mon accord avec Martin-Brady sur GRAN TORINO. J’ai aussi un problème avec la famille d’Hillary Swank dans MILLION DOLLAR BABY, envers laquelle j’ai ressenti le mépris de Clint Eastwood.
à AA: dans 1000000$ ça me gêne pas car la famille est vraiment secondaire, elle est là plus surtout pour mettre en avant la naïveté de H Swank, ce n’est pas un mépris que j’ai deviné mais plus un regard noir, en plus, c’est bien vu. Et on ne revoit jamais cette famille passé cet épisode, les enfants dont on parlait revenaient dans le film, bon.
J’ai bien saisi les arguments fouillés de Sullivan et Bertrand pour la fin de CHANTONS, mais pour moi c’est tout simple: cette scène me met mal à l’aise, c’est tout. En fait c’est je crois, parce que le personnage de Lamont est là trop chargé, trop c’est trop, c’est un problème d’écriture de scénario, une petite faute de goût!
à Martin-Brady: et voilà vous êtes incapable de vous arrêter sur un sujet, c’est terrible ça! Et en plus vous êtes complètement schizo, et ça c’est grave! en plus on comprend rien à ce que vous racontez!
L’affaire Saint-Fiacre reste mon « Maigret » préféré car il est un de ceux qui humanisent le mieux son héros. Le style du livre est aussi à déguster, à la fois simple et distillant le mystère avec une finesse que le film aurait pu parfois reprendre.
Dans ce petit village plein de souvenirs, le commissaire a l’air encore plus grand et rayonnant. Et le spectateur y retrouve fatalement son petit village à lui.
Sur LE FIER REBELLE, j’avais lu beaucoup de critiques mitigées mais j’ai été saisi par la force émotionnelle du scénario et de son traitement.
Ce film m’a semblé porter très haut le classicisme de sa conception.