En hommage à Pierre Schoendoerffer
23 avril 2012 par Bertrand Tavernier - DVD
Voici le texte publié sur le site de la SACD le 20 mars dernier en hommage à Pierre Schoendoerffer, disparu le 14 mars :
« Cela fait plusieurs jours que je reviens sur ce texte pour la SACD sur Pierre Schoendoerffer. Dès que j’écris une phrase, un paragraphe, malgré moi, ils passent à la première personne. Je n’arrive pas à garder le ton qui sied à un hommage objectif. Oui, bien sûr, je peux dire qu’on doit à Pierre Schoendoerffer une série de films remarquables, uniques, au ton si personnel. Des films qui s’interpellent les uns les autres, se répondent, se complètent, qui occupent une place à part dans le cinéma français. Pierre, tu étais en marge de tout. On ne te rattacha pas à la Nouvelle Vague bien que la photo de Raoul Coutard pour LA 317ème SECTION soit aussi innovatrice, révolutionnaire que celle d’A BOUT DE SOUFFLE (et que dire de celle du CRABE TAMBOUR, de ces fabuleux plans de mer) ni à ses adversaires qui appréhendaient tes chroniques de Grandeur et Servitudes militaires. Tu ne faisais partie d’aucun clan, d’aucune clique. Surtout politique. Tu m’as si souvent répété que l’homme politique pour qui tu avais le plus d’estime était Pierre Mendès France.
Revoir LA 317ème SECTION au festival de Lyon fut un très grand moment. C’est un chef d’œuvre que je mets sur le même plan que LES FORÇATS DE LA GLOIRE de Wellman et LES FEUX DANS LA PLAINE de Kon Ichikawa. Tu te souviens, Pierre, tu me parlais sans cesse de ce terrible film japonais quand je préparais le dossier de presse de LA 317ème SECTION, quand je me demandais comment contourner les préjugés d’une certaine critique, persuadée de l’idéologie d’un film qui ne pouvait selon elle être que colonialiste et militariste. Dans un article sublime de l’Observateur, Michel Cournot avait anéanti à tout jamais ces fadaises. Il parlait du son du film, de la manière dont était filmée la jungle, la Nature : « Ce film a été fait cent fois, avec une autre section décimée dans une autre guerre. Il est presque une spécialité des cinéastes américains. Pourquoi celui-ci est-il un chef-d’oeuvre ? D’abord, parce qu’il est vrai. Tous les gestes sont vrais. Tous les mots sont vrais. Tous les regards, toutes les voix, tous les bruits sont vrais. C’est le premier film de guerre vrai… Chaque détail se trouvait à sa place, dans sa lumière, dans son élan… La mémoire n’est pas une faculté donnée à tout le monde. La mémoire du réel est rare. Aussi rare d’ailleurs que la perception. Un homme a su dévisager la guerre, il a su l’écouter, et elle est là… LA 317ème SECTION est d’autre part un chef-d’oeuvre, parce que la guerre n’y est pas, comme d’habitude, démontrée ou présentée. Elle n’est pas apportée sur un plateau d’argent. Elle n’est pas soulignée, indiquée. Elle n’est pas non plus espionnée, vue de dos, comme dans les bandes d’actualités de guerre. Elle n’est pas cadrée. »
Relire ce texte (que l’on pourrait appliquer aux scènes batailles de DIEN BIEN PHU) fait remonter tant d’émotion. J’ai assisté au retour de Pierre, malade, miné par le palu. Il était aussi amaigri que Jacques Perrin, aussi épuisé que les personnages du film. J’ai suivi le montage, j’ai vu naître ce chef d’œuvre, la belle musique de Pierre Janssen et j’ai su que le lieutenant Torrens et l’adjudant Willsdorff faisaient partie de ma vie. Pierre m’a demandé de faire la bande annonce, d’en écrire le texte qui est dit par son monteur, mon futur monteur, le merveilleux Armand Psenny.
Et on ne s’est plus quitté.
J’adorais Pierre Schoendoerffer. J’aimais sa franchise, sa loyauté, sa fidélité. Je me suis battu pour OBJECTIF 500 MILLIONS, œuvre sous-estimée qu’il faudrait redécouvrir (avec à coté du formidable Cremer, un acteur génial, Jean-Claude Rolland) et qui fait partie de ces films de casses exécutés par les militaires entre LA MAISON DE BAMBOU et, version plus rose, THE LEAGUE OF GENTLEMEN. J’ai suivi toute l’épopée du CRABE TAMBOUR à travers aussi les récits de Jean Rochefort et de Claude Rich. J’ai adoré LA SECTION ANDERSON, ce très beau documentaire sur un groupe d’Américains durant la guerre du Vietnam. Tu te souviens, Pierre, de ce dîner avec Howard Hawks, grand admirateur du documentaire, qui voulait te demander de faire toute la seconde équipe, tout ce qui se passait au Vietnam, dans le film qu’il préparait. Je te revois, médusé en l’entendant décrire certaines scènes, essayant de lui expliquer qu’il n’y avait pas de camps de prisonniers (tu parlais en connaissance de cause, toi qui a été prisonnier du Vietminh), ni d’éléphants au Vietnam. Je revois ta tête quand il déclara que le conseiller militaire serait le général Westmoreland que tu ne portais pas dans ton cœur. Et cet autre dîner avec John Milius, le coscénariste d’APOCALYPSE NOW, qui était venu à Paris, à ses frais, pour adapter (pour toi au début) ton beau roman, L’ADIEU AU ROI, si conradien, tant il l’adorait. Il m’avait demandé d’organiser un rendez-vous, t’avait pris en moto et vous vous étiez cassé la gueule près du restaurant. Repas chaleureux, arrosé et inoubliable.
Il y a donc tous ces souvenirs et tant d’autres. Il y a ces films que je vais revoir comme L’HONNEUR D’UN CAPITAINE. Il y a LÀ-HAUT, film fragile, de fêlures et de mélancolie avec un personnage de femme dans un rôle moteur et qui m’avait beaucoup touché par tout ce qu’il disait en creux. Et cette magnifique adaptation de TYPHON de Conrad que Harvey Keitel voulait tant jouer. J’ai essayé de te donner un coup de main, après Daniel Toscan du Plantier mais nous avons échoué. Enorme regret. Quelle belle adaptation tu avais écrite. Et cet hommage à Conrad constituait la vraie clé pour comprendre, apprécier ton œuvre.
Tout cela est tellement fort, tellement vivant que je ne parviens pas à accepter ta disparition, à écrire ce texte au passé. Tu es comme le Crabe Tambour et Willsdorff : tu survis à tout et je t’imagine quelque part entre la brousse et ta chère Bretagne, dialoguer avec Wellman et Fuller et Roman Karmen, ce cinéaste russe que tu avais rencontré au Vietnam. Et éclater de rire en parlant de l’enfer, du diable, en inventant une kyrielle de proverbes et de dictons tout en refaisant sur une carte avec Lucien Bodard et Edouard Behr les derniers combats de la guerre du Vietnam. »
Pour oublier cette disparition qui s’ajoute à celle de Michel Duchaussoy que j’avais dirigé dans LA VIE ET RIEN D’AUTRE où il était formidable (« Alors Dellaplane, toujours dreyfusard ? « ) et que je viens de voir royal en Mitterrand usé, matois, roublard dans l’AFFAIRE GORDJI du talentueux Guillaume Nicloux (revoyez UNE AFFAIRE PRIVÉE et CETTE FEMME-LÀ), je voudrais signaler quelques beaux film. Et tout d’abord des documentaires, genre que pratiqua Pierre Schoendoerffer.
DOCUMENTAIRES
A l’occasion de la sortie du poignant VOL SPÉCIAL de Fernand Melgar, j’écrivais :
» Commençons par le scandale puisque scandale il y a eu. Lors d’une conférence de presse qui suivait le palmarès, au festival de Locarno, le producteur Paolo Branco traita VOL SPÉCIAL d’œuvre fasciste. La raison de ce qualificatif ? Elle est très simple pour Branco. A aucun moment, selon lui, Fernand Melgar ne juge, ne questionne les gardiens du Centre de rétention, qui s’occupent de tous ces étrangers en voie d’expulsion, sur le bien fondé de leur travail. Il ne les pointe pas du doigt, ne leur accole aucune épithète et ne les dénonce pas.
Comme le note Edouard Waintrop : « Et vlan!
C’est ainsi que ce film excellent, disons le tout de go, et absolument pas fasciste, a été labellisé par un homme que l’on a connu plus fin analyste… »
Oublions donc la polémique et regardons le film. Qui est remarquable. Il est vrai que comparé aux descriptions qu’a donné la Cimade des centres de rétention en France et du traitement qu’on inflige à tous ceux qui y sont détenus, l’institution que décrit Melgar, sans un mot de commentaire, a l’air d’un cinq étoiles. Personnel attentif, compatissant, humain, nourriture abondante, cuisinée par les futurs expulsés, propreté et hygiène des lieux, possibilité de faire un peu de sport dans des enclos grillagés. C’est vrai qu’on a des leçons à prendre.
Mais au delà de la premières impression, un malaise insidieux s’installe. Tout d’abord, contrairement aux grévistes de la faim que j’ai filmés dans HISTOIRES DE VIES BRISÉES, plusieurs, parmi ces étrangers ne semblent pas avoir commis de délit, de crime… Ici, on les expulse « simplement » (si j’ose dire) pour des raisons administratives plus ou moins obscures ou oiseuses, parce qu’ils sont sans-papiers. Et ces prisonniers dont beaucoup travaillent ou vont obtenir un emploi et qui refusent l’expulsion, attendent le vol spécial qui doit les déporter. On les découvre peu à peu, on découvre leur histoire, leur vie, leur personnalité. On rentre en empathie avec eux.
Et peu à peu le décor s’impose, prend toute sa forces. Ces couloirs grillagés où déambulent les détenus comme des rats de laboratoires. Ces portes qu’on ferme à clef. Cet univers qui devient de plus en plus oppressant et que Melgar filme sans jamais le dramatiser, souvent en plan large, sans ajouter le moindre commentaire musical (on entend juste les chansons que jouent les prisonniers ou qu’ils écoutent). On a toujours l’impression d’être au milieu des personnages, avec eux, à leur écoute. On apprend leurs histoires complexes, douloureuses. La caméra ne les juge pas, ne leur donne pas de leçon, les laisse vivre.
La manière dont ils refusent cette expulsion, dont ils se heurtent à une administration polie, certes, mais totalement, froidement indifférente, abstraite, vous serre le coeur. La confrontation avec une juge qui ne veut (ne peut ?) rien entendre, rien comprendre, est un moment glaçant, terrible dans son indifférence désincarnée. Et encore plus ce dialogue avec un fonctionnaire qui se contente de détailler la procédure, de se réfugier derrière elle, qui répond article de loi quand on parle d’humanité. Il pourrait au moins refuser de faire ce travail. Non, il l’accomplit, tranquillement, doucement, sans sadisme apparent. On se dit que c’est ainsi que de braves douaniers ou policiers ont du refuser à des juifs de pouvoir se réfugier en Suisse. Avec la même politesse.
Et le découpage de ces deux séquences est exemplaire. Les cadres, précis, n’étouffent pas les personnages, ne surlignent pas les intentions, ne contiennent aucun élément de jugement. On évite les très gros plans, toutes les figures de style qui révéleraient les partis pris de l’auteur. La distance semble ici toujours juste.
Eh bien, on retrouve ces mêmes qualités dans LA FORTERESSE qui vient de sortir en DVD chez Blaq Out. Le sujet, abordé par Melgar, tourne une fois encore autour de l’immigration. Les personnes qui vivent dans ce « centre » attendent un permis de séjour et se heurtent à la même attitude, au même mélange d’attention et de respect strict des articles de loi, des codes de vraisemblance (on renvoie un Ethiopien malgré ses blessures car son récit ne paraît pas vraisemblable à quelqu’un qui ignore que des gens ont pu marcher des jours avec une jambe mutilée). Même absence de commentaire et de musique.
La série NOIRS DE FRANCE de Juan Gelas est tout à fait passionnante et devrait être utilisée dans les écoles et les collèges.
Je voudrais signaler le coffret consacré aux documentaires d’Ariane Doublet (j’avais vu deux films en salle qui m’avaient impressionné). Voilà quelqu’un qui sait filmer les paysans, les ouvriers. Et celui consacré aux films de Malek Bensmail qui met à jour de manière aigüe les contradictions, les déchirures, les ombres qui hantent l’Algérie actuelle.
On parle si peu des musiciens de film que je ne peux que saluer cette collection qui nous propose des documentaires sur Gabriel Yared, Georges Delerue, Maurice Jarre. On y aperçoit évidemment l’indispensable Stéphane Lerouge qui joua, enfant, du tuba chez Jacques Hélian.
FICTIONS
D’UN PAYS L’AUTRE
Il faut saluer les éditeurs courageux, passionnés qui viennent de nous offrir un Blu-ray somptueux du magnifique, envoutant IL ÉTAIT UNE FOIS EN ANATOLIE de Nuri Bilge Ceylan et de L’ASSOIFFÉ du grand Guru Dutt, cinéaste admirable et méconnu.
Et je redis une fois de plus toute l’admiration que j’éprouve pour la magnifique trilogie d’Alex Corti, WELCOME IN VIENNA écrite de manière très autobiographique par Georg Stefan Troller et qui raconte l’odyssée de quelques jeunes autrichiens entre la Nuit de Cristal de 38 et le retour dans leur patrie soi-disant dénazifiée.
FRANCE/AMÉRIQUE
Passons au cinéma français pour dire tout le bien qu’il faut penser de la réédition par Studio Canal et Carlotta de LA GRANDE ILLUSION dans une sublime copie. J’en ai revu une heure et le début, la première scène, m’a bouleversé : Gabin qui fredonne et qui vous rend immédiatement perceptible son personnage, sa situation sociale, son rapport au groupe, la manière dont il a apprivoisé la situation. Rendre tout cela sans l’exprimer ni le dire, c’est du grand art. Je m’attarde sur cette scène, en apparence moins brillante, que les affrontements avec Stroheim, car je la trouve typique du génie de Renoir.
LCJ a eu la très bonne idée de sortir enfin RAFLES SUR LA VILLE, un remarquable film noir de Pierre Chenal (cinéaste que j’aime beaucoup), avec une belle musique de jazz de Michel Legrand (sa deuxième musique de film). Chenal utilise Vanel à contre-emploi dans un rôle de salopard tortueux et sadique et il y est génial. Piccoli est impressionnant et c’est là que Godard le remarqua et le choisit pour LE MÉPRIS. Il y joue un anti-héros absolu, un flic qu’on pourrait voir chez Ferrara ou Tarantino. Malheureusement pas de bonus.
J’ai revu avec un certain plaisir LE JOUR ET L’HEURE de René Clément. Le sujet et la forme peuvent paraître classiques mais Clément utilise diablement bien le décor (ces appartements où se terre Stuart Whitman dans son meilleur rôle avec RIO CONCHOS), l’espace, les extérieurs, dirige de manière serrée Simone Signoret. Et la scène du train reste un morceau de bravoure inoubliable.
Carlotta a eu la géniale idée de sortir enfin PORTRAIT D’UNE ENFANT DÉCHUE, le premier chef d’œuvre de Jerry Schatzberg, bouleversante dissection au scalpel (mais avec quelle compassion, quelle tendresse) des sentiments, des tourments de ce mannequin, l’un des plus grands rôles de Faye Dunaway. Elle s’y montre fragile, capricieuse, blessée, irresponsable, enfantine, narcissique, en proie au mal d’aimer. Ce film fut littéralement sauvé de l’oubli qui le menaçait (la critique américaine avait été sotte et atroce) par Pierre Rissient et je n’oublierai jamais le choc ressenti lors de la première projection à la Paramount, à Paris, quand il fallait arracher une sortie française.
Un petit saut dans le temps. En zone 1, vient de sortir SUNSET LIMITED, produit et réalisé par Tommy Lee Jones. Il s’agit de l’adaptation fidèle d’une pièce de Cormac McCarthy. A plusieurs reprises durant DANS LA BRUME ÉLECTRIQUE, Tommy Lee Jones m’avait parlé avec admiration de cet écrivain qu’il adorait, avec qui il était lié. Il avait voulu adapter MÉRIDIEN DE SANG. Il a donc demandé à Cormac McCarthy d’adapter sa pièce et on le voit, dans les bonus, très présent durant le tournage, discutant sur des nuances du dialogue avec les acteurs. L’action se déroule presque entièrement dans une pièce, décor astucieusement construit par Merideth Boswell qui donne une grande importance à la porte (ultra-barricadée) et à la fenêtre, à ce qu’on devine au-delà. Il n’y a que deux personnages et les acteurs, Tommy Lee (professeur de philo en proie à des désirs suicidaires) et Samuel Jackson (ancien taulard devenu prédicateur), se délectent des moindres nuances d’un texte tendu, souvent drôle, cocasse. Ils s’affrontent pour savoir si la Bible est le meilleur livre du monde (et sinon quels sont les autres) et dans un moment mémorable, sur le fait de prononcer le mot nègre quand on parle des détenus ultra-dangereux dans un établissement pénitentiaire. Le professeur interrompt le récit que fait le taulard en lui disant que le terme est insultant et l’autre, qui était en train de décrire comment il avait lardé de coups de surin, rentre dans une rage folle. On a vraiment affaire à deux poids lourds, deux monstres sacrés, au sommet de leur forme, qui prennent un immense plaisir à jouer ensemble, à respecter le texte et Tommy Lee Jones metteur en scène partage la même ferveur. Son travail est simple, jamais intrusif, clair, dépouillé. J’ai appris incidemment que Nicolas Saada avait voulu monter la pièce en France.
Lequel Nicolas Saada vient de m’envoyer le test comparatif entre la version VCI de REIGN OF TERROR, ce chef d’œuvre d’Anthony Mann et celle que vient de sortir Columbia sous le titre THE BLACK BOOK :
THE BLACK BOOK versus REIGN OF TERROR
Who says this blog is afraid to answer the tough questions, to boldly tackle the really burning issues of the day ?
To wit : Given that VCI Entertainment issued a not-all-that bad DVD version of Anthony Mann’s delightful French Revolution pop-noir 1948 Reign of Terror AKA The Black Book, is the new version of the Mann film recently released by the burn-on-demand Sony subsidiary Columbia Classics worth a look, let alone an investment of 20 bucks or thereabouts?
Well, we’ve delved into the question and the answer is, HELL YEAH.
The relative enthusiasm with which the VCI release was met with back in 2008 was of course relative to the fact that prior video iterations of the film looked like sock puppet theater, on account of their being quasi-bootlegs of the title which had fallen into the slough of despond known as public domain. The VCI version was made from undeniably soft materials, but transferred with care. If the magnificent chiaroscuros concocted by Mann and his most crucial collaborator, cinematographer John Alton, were clearly not all that they could be, well, they were enough to extrapolate from. Given the state of affairs concerning the film’s provenance and such, DVD Beaver reviewers Gregory Meshman and Gary W. Tooze said of the release, « This may be as good as it gets. »
This was of course before the burn-on-demand DVD marketing scheme got going. My suspicion is that some cinephile at Sony knew that the studio had some very superior materials in the vault, and that the only way to get them released would be through just such a corporate sidebar as was pioneered by the Warner Archive. Alas, Jeanine Basinger’s otherwise quite thorough Mann biography doesn’t go into how Reign of Terror got its name changed to The Black Book, but I suspect it was retitled after the independent low-budget production was picked up for distribution by Columbia.
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Commentaires (90)
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A Bertrand Tavernier
Merci pour LE JOUR ET L’HEURE que je viens de découvrir. C’est du bien bon boulot de la part de René Clément. L’oeuvre est assez prenante, on sent l’angoisse de ceux qui savent qu’ils peuvent être pris d’un instant à l’autre. Simone Signoret est d’une grande beauté, déjà fragile, et puis, oui, je ne cracherais pas sur le secret de fabrication de la séquence du train, probablement la plus bondée de l’histoire (comment la caméra peut-elle se mouvoir?).
A Alexandre Angel
Très belle séquence en effet qui m.a marqué et à laquelle je rends hommage dans LAISSEZ PASSER
A Bertrand Tavernier: j’ai vu enfin Rafles sur la Ville suite à votre conseil et je l’ai pas regretté! Je suis d’accord sur le personnage du flic joué par Piccoli, qui est fait autant de mal que de bien, qui en fait est un malade, un salaud et un flic compétent tout ça en un seul noeud de vipères! Je m’attendais à le voir protester de son innocence suite aux accusations de son chef (Brochard) à la fin et son silence révèle bien le personnage, son complexe d’infériorité, son obsession de séduire et de dominer, son mépris pour les autres, personnage curieux et très moderne (moderne ou plutôt irrespectueux du cliché du flic pourri habituel, et jusqu’à aujourd’hui!), même son sacrifice final est encore un moyen de surpasser les autres! Donc, le rappel que ça fait par rapport aux flics futurs style Ferrara est juste même si chronologiquement il est antérieur! Ceci dit, je pense plus au flic marseillais de Police de Pialat! (qui d’ailleurs, n’est pas décrit du tout comme un salaud mais ça pourrait être lui!). A part ça, Vanel est absolument, sublime, ce type pouvait exprimer tant de nuances, incroyable.
A Martin Brady
Vous avez raison et voyez les autres Chenal : L’HOMME DE NULLE PART chez René Chateau (qui vient de sortir aussi CRIME ET CHATIMENT), film tout à fait original, grinçant et touchant. Tout ce qu’a essayé de faire Renoir dans ELENA et loupé. Et Gaumont a sorti L’ALIBI dont Chenal contestait la fin imposée
A Bertrand Tavernier: oh, mais je les ai vus pratiquement dés que vous en avez parlé! Par contre, je voudrais revoir Le Dernier Tournant… Connaissez-vous les films argentins?
Digression absolue:
je signale le passage sur cinéclassik de Le shériff ne pardonne pas (Deadly trackers)d’un certain Barry Shear avec le grand Richard Harris.Pas un grand film c’est sûr malgré qqs beaux plans et une certaine cruauté de ton.
En revanche, il s’agit du fantôme d’un film de Fuller qui pensait tenir là l’un de ses meilleurs.Sujet fort,ambiance parfois fullerienne, casting très inégal ( l’actrice il est vrai n’est pas terrible comme le dit SF), décors souvent très intéressants, effets visuels très 70′:une curiosité très anecdotique.
Curieuse et scandaleuse errance de Sam Fuller dans les 70′, lui qui avait encore tant à faire et qui dut affronter une sorte de retraite anticipée jusqu’à la résurrection momentanée via The big red one (dont il existerait dans les tiroirs de la Warner une version de 4h 30: on est encore loin de la version intégrale avec le montage rallongé du DVD) et de white dog.
Je signale chez Allia le très beau bouquin autobiographique de S Fuller: Un troisième visage ( 20 euros-662 pages- qualité d’impression des photos semblable à celle des bios de l’Institut Lumières)
A BALLANTRAE
Le film avait été commencé par Fuller mais les rushes furent jugés – à tort ou à raison – catastrophiques. Je ne sais pas ce qu’il reste de lui. Et il avait accepté l’actrice. Tous les films de cette époque sont très mauvais, incroyablement plats et mal joués : SHARK, (même si on tient compte du remontage) LES VOLEURS DE LA NUIT, SANS ESPOIR DE RETOUR. Je garde juste le souvenir d’un épisode de télé avec des images fortes qui se passait aux Philippines. Les deux derniers bons Fuller sont WHITE DOG et BIG RED ONE. Comment expliquer ces echecs : perte des racines, mauvais choix de sujet, vieillissement, goüt qui se détériore ou devient démodé. Et je ne veux pas lire son livre. J’ai trop connu Sam (Pierre Rissient est l’artisan de sa résurrection en sortant distribuant SHOCK CORRIDOR dont nous etions les attachés de presse. Il ne l’avait pas du tout terminé et je me demande dans quelles conditions il a été achevé. On m’a cité un ou deux passages qui m’ont paru martien
Vous me surprenez au plus haut point car je ne vois pas de vraies ruptures par rapport aux entretiens avec N simsolo ou à ceux que j’ai pu voir à la TV…mais vous êtes sûrement très bien renseigné!!!
Scorsese dit en avant propos tout le bien qu’il pense de l’ouvrage.Par ailleurs, l’introduction est signée Christa Lang Fuller sa dernière épouse.Je crois deviner votre allusion: elle joue un beau rôle mais bon…de là à dire que ce serait surtout son oeuvre???
A part cela, il est vrai que hormis Big red one et White dog, les derniers Fuller ne sont pas bons mais il y a ces deux titres là qui sont de la même trempe que Shock corridor, Naked kiss, Merrill’s marauders,Pick up ou Park row!!!
A BALLANTRAE
NAKED KISS est un film formidable au début et à la fin et assez inerte et révélateur des problèmes de Fuller dans toute sa partie centrale, mal écrite et statique. Et aussi mal jouée par l’acteur principal
Je ne suis pas trop d’accord avec votre jugement assez dur concernant Naked kiss: certes Fuller joue sur le fil du rasoir du ridicule, du mélo et se permet des changements de registre à vue assez brusques…mais il n’en demeure pas moins qu’il continue ainsi ce cinéma en liberté qu’il prisait tant, se souciant moins de la bonne tenue d’ensemble du film que de ses pics émotionnels.Fuller n’est pas totalement inconscient je pense de ce risque du grotesque :à la manière du Hugo de la préface de Cromwell, il l’intègre dans une dynamique où il côtoie le sublime ce qui crée des dérapages étranges, des moments où l’émotion est à son comble mais après tout, Naked kiss me semble plus sûrement le mélo de fuller qu’un policier de plus dans sa carrière.La scène où C Towers fait chanter les enfants handicapés est assez étonnante et m’a fait penser à une scène similaire dans le remake An affair to remember de Mac Carey: la corde sensible est sollicitée, surlignée même mais avec une assurance telle que le spectateur même conscient des intentions « se fait volontairement avoir ».Dans le Fuller, la ritournelle prend une dimension encore plus tragique qd elle réapparaît en fond au moment où l’héroine comprend qui est son futur époux et l’émotion qui surgit alors me semble d’une violence intenable: la scène qu’on aurait pu juger trop mélo prend des accents tragiques intenses.Quant à l’acteur, il ne m’a pas semblé si mauvais, juste un peu terne mais il y a pléthore d’acteurs ternes ou cabotins dans nb de films contemporains de Naked kiss ne seraient-ce que les westerns de Ford et Walsh ou encore les Corman/Poe ( en excluant du lot le grand Vincent Price qui surnage dans des distributions pas fameuses).
petit témoignage personnelle au sujet de Pierre Schoendoerffer.
je n’ai personnellement vu peu de films de Mr Schoendoerffer, la 317ème section, là haut un roi au dessus des nuages, une partie du crabe tambour c’est à peu près tout il me semble. il me semble aussi que j’ai vu dien bien phu mais n’en suis plus très certain. donc j’ai vu ces films et à chaque fois il y a comme un style très particulier, une ambiance indéfinissable qui se dégageait, une vision complexe du rapport de l’homme à la guerre et à la nature. j’ai du mal à exprimer mon ressenti mais je retrouve un peu ça dans le cinéma de Malick. je suis presque certain que ces films ont influencés Malick pour the thin red line.
Je viens de lire l’échange entre JC Freycon et Pascal Minette sur l’antisémitisme et la chasse version aristo…bon, je crois qu’on peut être un militant visant la dénonciation de ces deux problèmes ( ( pour un engagement lié à la tolérance ou à l’environnement) tout en comprenant le décalage historique qui nous rend cela difficile à appréhender!
Le problème principal, c’est celui de la création jugée sous l’influence de ce qu’on sait du créateur. On a parlé de Ford et d’Hemingway, mais c’est vrai pour tous les autres. On ne devrait jamais savoir qui se cache derrière les oeuvres car on ne lirait sans doute plus rien et n’irions plus voir de films…C’est vrai aussi pour les acteurs, actrices et autres artistes. C’est injuste, mais on leur pardonne difficilement de n’être pas comme on les imagine ( aime-t-on autant les Fleurs du Mal quand on est tombé sur la photo aux traits affligés de Baudelaire ?)…Cependant, il faut reconnaître qu’on peut aussi être agréablement surpris et aimer une oeuvre moyenne parce qu’on a de la sympathie pour l’homme qui l’a créée. Bon, bien difficile, cette question…
Minette Pascal
Elle doit se poser et s’oublier. Ce qui compte ce sont les oeuvres. On peut déplorer la conduite de Racine et être ébloui par ses vers. La conduite, le caractère du créateur ne peut nous interesser quand quand il influence en bien ou en mal, le contenu, le ton d’une oeuvre, quand il nous donne des clés supplémentaires. Je trouve quant à moi que les convictions même passagères, changeantes de Renoir expliquent la force, l’originalité de TONI, de LA REGLE, DU CRIME, de LA GRANDE ILLUSION. A ce moment là, il absorbait son époque. A contrario, il semble déconnecté, vidé dans des films comme ELENA et surtout le terrible DEJEUNER SUR L’HERBE (mais beaucoup moins dans LE CAPORAL EPINGLÉ)
Racine; Corneille aussi : j’adore Horace, par exemple, dont la morale finale sonne pourtant comme une basse flagornerie à l’endroit de Richelieu, à une époque où celui-ci donnait à qui-mieux-mieux dans la repression et les exécutions. Il reste ces brillants alexandrins et surtout un climat et des ingrédients qui ne sont pas sans rappeler…un western !
« La photo aux traits affligés de Baudelaire »? Magnifique et terrible, elle attire à lire ses oeuvres, je choisirais un autre exemple. En tout cas, pour moi, c’est l’oeuvre avant tout, si elle m’intéresse, je veux bien lire un écrit sur l’auteur, mais après. La conduite « profil bas » de Ford, très prudent quant au maccarthysme (il l’abhorrait mais s’inclinait prudemment) ne me perturbe pas pour revoir La Poursuite Infernale, après: il était plus proche de Harry Carey Jr par exemple, que de Bond ou Wayne les réacs, source: La Compagnie des Héros de Carey Jr et le magnifique McBride déjà cité ici. Si on devait se laisser gâcher le plaisir d’admirer des films en s’intéressant aux zones répugnantes éventuelles de nos créateurs, ce serait quand même pervers, y’aurait plus qu’à lire Hollywood Babylon ou le bouquin dont qqn parlait récemment ici.
La photo de Baudelaire est « magnifique » pour vous. Je voudrais qu’elle porte ainsi tout le monde vers les sublimes poèmes de l’auteur mais je doute franchement qu’elle ait ce pouvoir. Trouvez-vous vraiment qu’il est « pervers » de s’intéresser de près aux hommes qui font les oeuvres ? ça me semble plutôt naturel, comme il est naturel de vouloir en savoir plus sur les gens en général. De la saine curiosité, plutôt, mais bien sûr à ses risques et périls. Simplement, si l’on est déçu,autant mettre tout ça à la corbeille et profiter des oeuvres, comme B.Tavernier et vous-même le dites.
A Minette Pascal: décidément, vous adorez les discussions contradictoires! Nous tournons en rond, franchement qui va être rebuté à lire les poèmes de Baudelaire parce qu’il a vu sa photo en premier? Quelqu’un d’un peu léger, sans doute… On était parti de la vie privée de certains créateurs dont certains aspects de celle-ci peuvent rebuter, et nous voilà avec leurs photos, maintenant! Vous y allez un peu fort, non?
Et oui, lire Hollywood Babylon ou les potins sur les pittoresques et croustillantes frasques des gens du cinéma, c’est un peu pervers, je ne faisais que montrer là le côté noir de l’intérêt qu’on peut avoir pour le créateur par rapport à ses oeuvres! Mais je crois que je me suis mal exprimé?
Et ne m’opposez pas que vous détestez les discussions contradictoires, ou j’éclate en sanglots!
Amicalement…
Quel rôle peut jouer une photo dans la lecture de poèmes?
Par ailleurs, cette photo est touchante à mon sens et ne me dérange pas:elle me regarde apr delà les siècles et me rappelle que ces textes sublimes ont été conçus par un être humain. Ce n’est pas la « touche » particulière d’un Céline qui m’intéresse mais ses romans, ce n’est pas la tête ou la voix d’Artaud qui me dérangent le plus mais ses poèmes…
Tout cela est de l’ordre du bonus, comme un additif à la découverte d’une oeuvre.
Connaître la bio, lire des critiques, des documents vient pour ma part a posteriori et non a priori.Il faut plonger et en se séchant on en apprend tranquillement plus sur celui qui nous a invité à nager dans son oeuvre!
A Martin-Brady : discussions contradictoires ? C’est presqu’un pléonasme, ça, non ? « Qui va être rebuté par la photo de Baudelaire ? » Pas vous en tout cas, mais je ne jurerais pas qu’elle n’en décourage pas d’autres. Moi, je connaissais les poèmes avant et j’avoue avoir été consterné par la photo. Mais vous avez raison, j’aurais pu prendre un tas d’autres exemples moins extrêmes et tout cela nous éloigne des films dont il est question ici. Pardon.
A Minette Pascal: « no hard feeling » comme dit Colorado à JT Chance dans Rio Bravo, mais une photo montrerait-elle son créateur à l’état de loque humaine, en quoi celà devrait-il nous influencer? Vous avez raison, les films avant tout!
A Martin-Brady : l’affichage de la souffrance m’a toujours un peu dérangé dans les oeuvres ; c’est purement personnel et je respecte qu’on l’aime ,au contraire. Je n’ai jamais pu supporter, par exemple, les interminables larmes de Jacques Brel dans son « ne me quitte pas ». Pour revenir aux films, je rends plutôt grâce à la pudeur ou à une façon suggérée ou originale d’exposer la tristesse , le désespoir et la douleur. Une fois de plus, on va prendre Ford en exemple, lui qui arrive toujours à exprimer les sentiments extrêmes autrement que par des gros plans prolongés (je recite l’accablement du petit Huw de « Qu’elle était verte ma vallée », bouleversant en étant filmé de loin et de dos… les larmes, les hoquets ou les grimaces de désespoir en gros plan me font plus souffrir que m’émouvoir et trahissent, artistiquement parlant, un certain manque d’imagination, non ? En musique (je crains d’être un peu long), j’admire la manière dont Verdi arrive à nous remuer dans des tonalités majeures et moins le mineur de Puccini qui semble nous inviter tout de suite à aller chercher les mouchoirs… Encore une fois, c’est moi, et ça ne vaut que ça…
Je ne comprends pas que Pierre Schoenderffer ait si peu tourné au final: se refusant aux phénomènes de groupes, il était certainement « à part » dans la profession , peu enclin à certaines façons de faire…mais tout de même le sujet de L’adieu au roi ou une adaptation de Conrad (surtout après Apocalypse now),cela pouvait apporter au cinéma français le grand film d’aventure qu’il attendait!
Le père militaire d’une amie me disait naguère que Schoenderffer avait compris une part invisible de la guerre et comme le disait cournot que son cinéma était vrai plus que réaliste, ce qui est encore plus précieux…
Bon courage, Bertrand, après tous ces hommages à des artistes/amis disparus,et merci de faire revivre tous leurs talents avec chaleur et force.
A Ballantrae
Il y a beaucoup de raisons au petit nombre de films tournés par Piere Schoendoerffer : lPierre était quelqu’un qui prenait beaucoup de temps pour se décider, écrire, se documenter. Ses sujets demandaient sinon des budgets importants du moins un réel investissement des producteurs (obligation de tourner très loin). Il vivait dans son coin et avait peu de rapports avec le monde de la production en dehors de Georges de Beauregard et ensuite de Daniel Toscan du Plantier. Ses sujets paraissaient difficiles à financer. L’ADIEU AU ROI demandait des capitaux américains donc des contacts aux USA qui font défaut à la majorité des producteurs français
Le producteur est décidément une figure importante au cinéma…sans un grand producteur un peu fou, que de grands films nous ne pourrions voir.
Pour des chefs d’oeuvre mutilés, combien de chefs d’eouvre intacts défendus contre la politique du chiffres et les normes usuelles.
De Beauregard a fait très fort, Dauman fut très bien aussi.Même si décrié et caricaturé, Toscan était un vrai producteur culotté et un brin visionnaire.
La production a évolué, le paysage du cinéma français aussi et je crains que ce ne soit pas dans le bon sens.
Aux USA, je crains que la situation soit encore pire et ce n’est pas Weinstein malgré qqs bonnes initiatives (et des tripatouillages indignes aussi!) qui contredira cette tendance lourde.
A Ballantrae
De Beauregard n’était pas un producteur au sens précis du terme. Il se mélait très peu, pas du tout du scénario, ne venait pas au montage. C’était un aventurier qui fonctionnait à l’amitié ou au moins à l’entente amicale. Et il pouvait intégrer certains paramètres notamment concernant Schoen (temps très long pris par l’écriture, retard pas au tournage, entourage de Pierre qui le protégeait le mieux possible). Il y a toujours de très bons producteurs mais le nombre des distributeurs, des guichets s’est terriblement, dramatiquement réduit
J’ignorais cela et tenais compte de ses choix judicieux uniquement.
La question de la distribution pose de + en + pble et ce n’est pas l’avènement du numérique tel qu’il est parti qui va résoudre les pbles…je crains même au vu des avanies que nous connaissons chez nous que cela accentue la concentration de la diffusion entre des mains peu recommandables sans plus value pour la salle ou le spectateur et afortiori pour le vrai créateur dont les films seront diffusés avec une difficulté croissante.
Epoque bizarre sur bien des plans.Pour en rester à la cinéphilie, il faut continuer à encourager les salles malgré le DVD car c’est là que vit d’abord le cinéma: sans elles le vivier se tarira quoi qu’on en dise!
Monsieur Tavernier,
Mon frère et moi sommes devenus spectateurs assidus de cinéma en même temps que paraissaient sur les écrans vos premiers films. Collégien et lycéenne à l’époque, nous avons découvert et aimé L’Horloger de Saint Paul, Des Enfants gâtés, Le Juge et l’assassin, Que La fête commence… au fur et à mesure de leurs sorties. J’aimerais offrir à mon frère une rétrospective de votre oeuvre. Quand (ou où ?) verra-t-on publier en coffrets de DVD un florilège significatif de vos films ?
Merci à vous pour votre oeuvre cinématographique si puissamment originale et si obstinément juste, et pour toute votre passion à transmettre le cinéma.
A.O
Je n’aime pas répondre à ce genre de questions sur mon blog qui n’est pas un moyen de promouvoir mes films. Mais, vu la gentillesse du message, je peux vous dire qu’il il y a 2 coffrets, édités par Studio canal, un des films avec Noiret et un de tous les autres films jusqu’à HOLY LOLA. LA FILLE DE D’ARTAGNANT, DANS LA BRUME ELECTRIQUE, LA PRINCESSE DE MONTPENSIER et MISSISSIPPI BLUES sont édités à part. Tous sont trouvables à la FNAC ou sur Amazon FR
Merci pour votre soutien
Je trouve seulement votre réponse. Merci à vous. La commande est faite, mais les coffrets ne sont pas si faciles à trouver.
Et merci encore pour cette malle aux trésors.
Bonjour Bertrand,
Comme vous, je pourrais me passer en boucle l’ouverture de LA GRANDE ILLUSION, une leçon de synthèse où génie rime avec simplicité. Et puis ce panneau dans un coin dont le texte met en joie pour la journée : « L’alcool tue, l’alcool rend fou. Le chef d’escadrille en boit ». Un temps, j’en avais fait une copie que j’avais affichée dans l’escalier de mon immeuble jusqu’à ce que quelqu’un l’enlève (jamais su il s’agissait d’un pilote ou d’un pilier de zinc). ;P…
Question synthèse parfaite, j’ai beaucoup apprécié la dernière phrase de Cournot sur la guerre telle que la montra Schoendoerffer dans sa magnifique 317ème SECTION : « Elle n’est pas cadrée. » Ensuite, tout ce que vous écrivez sur votre ami me fait m’en vouloir d’avoir eu un peu de mal à entrer, récemment, dans OBJECTIF 500 MILLIONS, malgré Cremer et Jean-Claude Rolland, acteur dont la brutale disparition fut un gâchis. Il avait la classe et l’intensité des plus grands.
RAFFLES SUR LA VILLE, souvenir lointain dont j’ai gardé le sacrifice final de Piccoli. Une idée qu’on aurait bien vu chez Fuller ou Aldrich.
Pour finir, très envie de revoir PORTRAIT D’UNE ENFANT DÉCHUE, découvert avec grand plaisir lors d’une reprise en salle dans les années 80. En lisant le début de la filmographie de Schatzberg (je connais mal la suite), un mot s’impose : respect. Bon, j’avoue aussi que la Faye Dunaway première période ne cessera jamais de me fasciner…
Petit compte-rendu de mes découvertes (ou re-) du moment…
L’ARRANGEMENT (1969)
Je savais que ce film ne comptait pas parmi les meilleurs de Kazan mais bon, Kirk Douglas et Faye Dunaway aidant… Résultat des courses : une réelle déception car l’ensemble est bien lourd. Si j’étais méchant, je dirais que Kazan a voulu « faire jeune » en hachant son récit d’effets rarement judicieux. Reste un début assez bluffant qui peut évoquer deux autres géants familiers de Douglas (une symétrie frontale à la Kubrick et un coup de folie automobile minnellien) ; le pater familias « bigger than life » – parfois trop – campé par Richard Boone (brève mais impressionnante scène où son visage tanné se défait lorsque son fils lui balance son mépris) ; le fait que Kazan ait mis beaucoup de lui dans cette histoire d’émigrés grecs (insert d’AMERICA, AMERICA et scène des souliers en clin d’oeil à son précédent chef-d’oeuvre) ; et surtout une des plus magnifiques interprétations de femme libérée par Faye Dunaway, d’abord garce publicitaire qui ne détonnerait pas dans un épisode de MAD MEN puis émouvante mère célibataire. Le traitement du personnage ambigu de son platonique ami n’est pas toujours très abouti.
Edition DVD peau de chagrin, sans même une bande-annonce (Warner).
DEUX BONS COPAINS (Zenobia, 1939)
Un Hardy sans Laurel (alors en conflit avec Hal Roach) mais avec un Harry Langdon démaquillé. Une petite comédie familiale et sociale dans le Sud de 1870 où le gros Ollie se révèle aussi un merveilleux comédien classique en médecin campagnard adorable et adoré dont une jeune éléphante (autrement dit son alter ego en volume comme en grace) s’entiche après qu’il l’ait soignée. Quelques character actors réjouissants (comme la zin-zin Billie Burke) ou horriblement caricaturaux (Step’n Fetchit en échalas Noir, idiot de la maisonnée) et un remarquable enfant-acteur Noir (Phillip Hurlic) qui offre les plus touchantes scènes avec Hardy dont une récitation du préambule de la Déclaration d’Indépendance qui n’est pas loin de valoir en force celle de Laughton citant Lincoln dans RUGGLES OF RED GAP.
Réalisation sobre du souvent excellent artisan polyvalent Gordon Douglas.
Double DVD Shawshank comprenant aussi le pas terrible LAUREL ET HARDY A JOUJOUVILLE (Babes in Toyland) et 4 courts-métrages (l’ultra-classique EASY STREET de Chaplin, deux Laurel muets et THE GOAT de Keaton).
OSTERMAN WEEK-END (1983)
Cet ultime film de Peckinpah m’a moins accroché qu’autrefois mais tout n’est pas à jeter. Je fais l’impasse sur Rutger Hauer, acteur qui me laisse assez indifférent. Burt Lancaster semble contraint ou las et je le préfère de loin dans le contemporain LOCAL HERO. Peckinpah veut se faire rappeler à notre bon souvenir en re-servant quelques séquences-types alternant montage rapide et ralentis (ça fonctionne là aussi sur le mode alternatif). Mais il y a John Hurt, comme toujours complexe et tourmenté, endossant le rôle d’un Big Brother un an avant d’en être victime dans 1984. La critique de l’emprise audio-visuelle a parfois vieilli mais ce jeu paranoïaque avec l’image captive et captatrice offre une séquence comique qui surprend dans ce film d’espionnage assez âpre lorsque Hurt, piégé par une défaillance technique doit s’improviser en présentateur météo ! Atroce b.o. de l’immense Lalo Schiffrin.
DVD Opening comprenant un commentaire à 4 voix, une analyse par J.B. Thoret et une de l’univers de Robert Ludlum.
(Je tacle au passage le site de la FNAC qui vend cette édition simple en montrant la jaquette de la double, cette dernière comprenant la version uncut et le long documentaire « Alpha à Omega »).
LA CIBLE (Targets, 1968)
Mon coup de coeur du moment ! Ce premier véritable essai du jeune Peter Bogdanovich laisse pantois par la maîtrise de son terrifiant sujet qui est aussi un hommage au cinéma de genre, porté par le grand Boris Karloff en personne. Bogdanovich, qui venait d’être lancé par le malin Roger Corman (d’où un générique… étonnant que je ne révélerai pas) est ici adoubé par le grand Sam Fuller, co-auteur discret du script et de l’idée finale. Ce récit montrant un parfait représentant de l’Amérique WASP, gendre idéal, en serial killer alignant tranquillement ses victimes comme dans un jeu vidéo à venir est aussi impressionnant et dérangeant que les lycéens meurtriers d’ELEPHANT.
Et dire que Bogdanovich allait bientôt placer la barre encore plus haut avec le sublime THE LAST PICTURE SHOW…
(Je ne l’ai pas découvert en DVD mais je crois que l’édition Paramount propose un commentaire du réalisateur et Bogdanovich n’étant pas l’analyste le plus médiocre, c’est tentant.)
LE DIABOLIQUE DR MABUSE (1960)
Souvenir très moyen confirmé à la re-vision. Lang en petite forme pour cette séquelle qu’il aurait pu – ou du – s’éviter. Bien sûr, ici et là se retrouvent sa marque et le soin technique d’ensemble mais sans Klein-Rogge point de méphistophélique salut. Précurseur dans les années 20-30, Lang est ici à la traîne. L’ère n’est plus au thriller à l’esprit serial qui posa les jalons du Film Noir, surtout quand l’inventivité est si ténue et la noirceur terne comme l’Allemagne de 1960 (pardon pour le jeu de mot à deux Pfennig : Lang est passé de la UFA à la RFA).
Dans le luxueux coffret Mabuse de la collection MoC d’Eureka! qui comprend de copieux livrets et suppléments. J’ai volontairement choisi de commencer par le maillon faible du triptyque avant de re-déguster bientôt les deux premiers.
LA CITE SANS VOILES (Naked City, 1948)
Jules Dassin dans sa meilleure période. Lui et ses collaborateurs voulaient avant tout capter la ville New York et pas d’une reconstitution de studio. Pari totalement réussi au risque de faire passer l’aspect policier en anecdote. « C’est haut et c’est beau » chantait Gainsbourg, surtout photographié par William Daniels.
Ted de Corsia (mon bad guy favori du genre, son nom seul est un poème brutal) y est plus inquiétant que jamais. Malin, Dassin nous l’économise une bonne partie du film pour nous le servir chaud bouillant vers la fin. Il faut le déguster dans la séquence où le jeune flic fait l’erreur fatale de se rendre seul chez lui alors qu’il fait sa gymnastique et l’accueille, relax et vicieux comme une mine antipersonnel… Superbe intro qui alterne documentaire amusé et éclairs de violence. La voix-off omniprésente devient pénible passé un moment.
DVD Wildside d’excellente facture et richement supplée.
Quelques ajouts à mon envoi bien fautif (car non relu: mon clavier fourche là où ma main ne le fait jamais!):
-sur Corti, la trilogie Welcome in Vienna a ceci d’unique qu’elle ne s’achemine jamais vers le réquisitoire, vers la démonstration…la dureté du parcours des héros récurrents ou ponctuels est effective -notamment dans le volet 1- mais elle est comme ouatée par un absolu refus de s’appesantir.Le volet 3 malgré le vertige existentiel terrible ressenti par son héros rencontre souvent le registre de la comédie, de l’ellipse quasi lubistchienne.De Corti par ailleurs, je n’ai qu’un très vague souvenir de sa Putain du roi et me demande ce qu’un cinéaste de cette ampleur a pu faire à côté de ce triptyque impressionnant
– il faut dire combien Guru Dutt est un grand cinéaste à ceux qui ne retiennent que le nom de l’immense S Ray pour le cinéma indien. Ce roi du mélodrame ne peut que plaire par son approche subtile et pourtant intense aux amoureux du cinéma de Sirk, Minnelli ou Stahl car il apporte sa touche à un « genre » (en est ce un?) d’une grande richesse.Le nouvel Audiard annoncé comme tel me fait saliver par avance!!!
– pour ce qui est de l’antisémitisme de Renoir, je crois effectivement qu’il ne faut pas réviser son opinion sur le cinéaste et le vouer aux gémonies tt d’abord en considérant un contexte bizarrement laxiste en la matière ( si on remonte plus loin, par exemple au siècle des Lumières, on constatera qu’un grand nom tel que Voltaire s’adonne à des propos hallucinants concernant la judéité notamment dans son Dictionnaire philosophique…devrions nous pour autant ignorer ce qui en fait un progressiste indispensable?), ensuite je crains très souvent que les cris d’orfraie poussés face à des oeuvres du passé exonère trop facilement des combats effectifs (je parle de combats autres que par clavier interposé) au présent…et question réapparition de la peste brune même ripolinée , nous sommes servis!!!Ces propos gênants ne peuvent être escamotés mais le personnage n’est pas le cinéaste et cela fonctionne comme un document.Il est nécessaire quoi qu’il en soit de connaître les arguties qu’on combat pour les démonter
A Ballantrae
Voltaire certes mais depuis il y a l’affaire Dreyfus
Je n’ignore pas cela a priori.Oui, il y eut des Dreyfusards et des courageux écrivains qui surent refuser la pente nauséabonde de l’antisémitisme…mais il y eut tous les autres qui, par facilité ou opportunisme, s’y laissèrent aller.Je n’exonère pas Renoir de ses responsabilités (notamment dans certains écrits) mais demeure convaincu que ce film est génial et je ne suis pas gêné par ces répliques d’un personnage , d’un réalisme malheureusement banal pour le contexte du récit comme pour celui de la conception du film!!!
J’essaie de voir les oeuvres parfois malgré leurs auteurs: Céline est une raclure humainement et idéologiquement parlant mais Voyage… et Mort à crédit (au minimum)sont des chefs d’oeuvre absolus de la littérature du XXème siècle.
Je citais voltaire car ses giclets d’invective sont particulièrement hallucinants…mais Voltaire est aussi l’homme de l’affaire Calas, autre entreprise de réhabilitation fondamentale!
A Ballantrae : En même temps, en ce qui concerne Céline, c’est difficile de séparer les choses, mettre les romans d’un côté et les pamphlets de l’autre. L’idéologie, si idéologie il y avait car pour moi Céline est tout le contraire d’un idéologue, est la même dans les romans et dans les pamphlets. (Le « voyage » reprenait le fil de « l’église », mais sans l’antisémitisme qui y était déjà très présent. Son antisémitisme n’est pas né soudain en 37.) Une raclure humainement? Pas pour tout le monde. Pas pour moi, sinon je ne l’aimerais pas autant. Mais oui, il dérange. Il dérangeait. Même les Allemands, il les dérangeait. Il dérange toujours. Alors on met les romans d’un côté, les pamphlets de l’autre. Pourtant, c’est le même Céline.
Et puis il faudrait savoir jusqu’à quel point Renoir était anti-sémite. Il y aurait une différence entre une phrase de mauvaise humeur et des éloges du régime nazi. Dire des horreurs sur les autres, c’est une manie quotidienne des hommes de partout et de toujours qui peut n’avoir rien à voir avec une idéologie meutrière. Les créateurs ont peut-être, comme les autres, le droit de dire des conneries histoire de calmer des nerfs mis à dure épreuve ?
A Minette Pascal
Des lettres à un ministre de Vichy, une demande de poste (la direction de la Cité du cinéma), des propos réitérés dans une interview au Portugal ce ne sont pas « des phrases de mauvaises humeur » mais des prises de position que dénoncèrent certains de ses anciens amis comme Henri Jeanson. Cela ne veut dire qu’il se soumet aux pulsions meurtrières de l’idéologie nazie mais qu’il soutient à plusieurs reprises (ce me fut confirmé par Jean Gabin qui ajoutait : « Renoir comme metteur un génie, comme homme une pute ») un gouvernement ultra réactionnaire et raciste (les lois anti juives). Vous n’avez pas vu Jeanson, Prévert, Aurenche, Bost René Clair, Duvivier se comporter ainsi
C’est décevant, et malheureusement, comme Hemingway et ses safaris, influe fatalement sur la manière de considérer les oeuvres…
J’avais parfois lu ou entendu dire que Renoir n’était pas le gentil « patron » débonnaire et bonhomme tel qu’il apparut ou aurait aimé paraître mais j’ignorais ces détails affligeants. Qu’en pensait Marcel Dalio, lui qu’il retrouva à Hollywood et avec lequel, bien des années plus tard, il bavarda si amicalement sur le perron de la demeure du marquis de La Cheyniest, filmés par Rivette en 1966 pour « Cinéastes de notre temps » ? Et que penser de l’avis lapidaire de Gabin, homme réputé pour son caractère entier, qui tournera pourtant une dernière fois pour Renoir en 1955…
Par un méchant hasard, j’ai revu hier LE PRESIDENT où Audiard fait prononcer cette terrible formule à Gabin : « Tout antisémite à son Juif… »
Pour faire le point, et étant arrivé aux pages du Renoir-Mérigeau dans lesquelles celui-ci aborde le sujet, je me demande si j’ai bien fait d’écrire que Renoir n’était absolument pas antisémite… Car enfin, cet opportunisme de Renoir face à Tixier-Vignancourt dans ses lettres où il
tente de préserver sa place dans le cinéma français (tout en préparant son départ pour les USA et tout en prétendant ne vouloir y faire qu’un court séjour avant de revenir à sa chère France…) est le même que celui de certains Français restés sur place qui ont par exemple, fermé les yeux sur les rafles et les humiliations infligées aux Juifs, sauf que Renoir ensuite aux USA, se retrouvait dans la position confortable de ne pas avoir à être héroïque. Du coup, la réplique de Gabin sonne autrement mais peut-être pas à juste raison, elle sonne juste autrement, quoi… De plus que le lecteur entend aussi parler de l’antisémitisme de Auguste Renoir (certes, juste une phrase que le peintre laissa tomber dans l’oreille d’un témoin…) que Jean enfant put apprécier a priori, ça fiche une claque sur la nuque de l’admirateur convaincu de l’infinie générosité du cinéaste, et de celle du peintre.
Autre chose: Renoir raconta que sur le tournage de LA GRANDE ILLUSION, un acteur ou qqn de l’équipe inventa la trouvaille de la chanson « Il était un petit navire » (p.322), et qu’il adopta l’idée spontanément par amour de l’improvisation (et par ouverture d’esprit louable de la part d’un créateur humble et heureux de laisser d’autres que lui participer à la création). Or, Mérigeau découvre dans le scénario initial de Renoir et Spaak que la chanson était prévue dans la séquence depuis le début! Problème de mémoire? Bien sûr, c’est possible, mais ce n’est pas le seul exemple.
Truffaut n’est plus là pour lire ce livre, sinon j’imagine la polémique!
Bien des raisons, Bertrand, de vous féliciter encore une fois pour les nombreuses pépites mises en évidence par votre chronique.J’y reviendrai plus longuement ultérieurement mais souhaiterais attirer l’attention sur deux chefs d’oeuvre moins connus que les titres de Schoenderffer, Renoir ou Schwatzberg à savoir il était une fois en Anatolie de Nuri Bilge Ceylan et la trilogie Welcome in Vienna soit l’un de mes films préférés de l’an passé et ma grande découverte de ce premier trimestre.
Ceylan accomplit encore un travail admirable dans un film qui atteint une sphère existentielle digne de Dostoievski ( amis Les trois singes, déjà un film impressionnant s’aventurait sur ces cimes). Si le terme « réalisme magique » n’avait utilisé ailleurs sur des oeuvres qui n’ont rine à voir avec il était une fois…, je crois que je le trouverais très adéquat tant on a l’impression d’une pregance très physique des êtres et des lieux que ce soit par la texture de l’image ou par un travail impressionnant sur la présence sonore et dans le même temps onne saitvers où on va , comme emmenés dans un périple onirique et terriblement prosaique ( on cherche un corps, voilà pour le point de départ).Rien n’est surligné, tout est effleuré et mystérieux comme un défilé d’apparitions fantomatiques (les arbres dans la lumière des phares, la belle jeune fille à la lampe). Du très grand art qui confirme un sans faute voire une montée en puissance du cinéaste après Nuages de mai, Uzak,Les climats et les deux titres cités.
Je reviendrai sur corti dont je connaissais le volet III mais celui-ci prend une ampleur exceptionnelle au sein d’un travail pensé comme un triptyque.C’est aussi ample et subtil, aussi complexe et passionnant que le travail de l’Allemand Edgar Reitz avec Heimat et Die zweite heimat.
Bonjour Monsieur Tavernier,
Je vous félicite pour votre chronique que je lis très régulièrement. Je vous écris pour vous demander la permission de reproduire votre beau texte sur Pierre Schoendoerffer dans le topic que nous avons fait sur son oeuvre dans le forum dvdclassik. Outre le bel hommage que vous lui rendez, il y a de nombreuses anecdotes et informations que je veux propager le plus possible.
Merci de faire partager votre passion.
Bien à vous
Olivier Henry
A Homerwell
Bien sur
Cher Monsieur,
J’aimerais vous parler de Frédéric Rossif : peut être pourriez-vous m’aider. Comment puis-je, s’il vous plaît, vous joindre ou vous adresser un email?
Par avance merci.
J’ai l’édition VCI de REIGN OF TERROR aka THE BLACK BOOK d’Anthony Mann, je ne l’ai pas encore regardé, mais je dois dire que la vision, biaisée idéologiquement, des anglo-saxons sur la révolution française m’a souvent laissé perplexe (me vient à l’esprit A TALE OF TWO CITIES film anglais de Ralph Thomas avec Dirk Bogarde)
THE AMAZING MR X semble inspiré du MASK OF DIMITRIOS de Negulesco qui m’avais déçu par un dynamique de flash backs qui ne faisaient qu’alourdir le film, focalisant sur un personnage pas très passionant au final… Par contre, je cherche depuis longtemps à revoir THREE STRANGERS du même Negulesco (scénario de John Huston) que j’avais adoré (merci Mr Brion) et qui à ma connaissance n’a pas d’édition DVD.
Sinon, pour ce qui est du Renoir antisémite, cela confirme l’appréciation que j’ai de ce directeur, sa vision « bonhomme » de la France,LA GRANDE ILLUSION, un peu comme dans le LIFE AND DEATH OF COL BLIMP de Powell & Pressburger (en gros: dommage que la guerre ne sois plus faite par les vrais gentlemen, ceux qui respectent les règles), j’ai vu son film américain THIS LAND IS MINE (pour que C.Laughton et G.Sanders)concernant l’occupation et la collaboration en France pendant la 2d guerre mondiale, et franchement, c’est très superficiel dans la « caricature » des personnages, une vision proprette et hollywoodienne, alors que pour un réalisateur français en exil, on attendait peut être quand même quelque chose de plus heu …virulent. Mais bon, ce n’est pas Clouzot.
A CATHERINE
Etrangement le point de vue de Mann (qui disait s’inspirer de Carlyle) qui comporte beaucoup d’erreur (surestimation de Danton et surtout de l’horrible La Fayette, caricature de Saint Just) parvient à attraper des éléments du climat de l’époque : cette paranoia dont parle si bien Domecq, cette impression d’étouffement, de claustrophobi. Meme si l’on sait que Robespierre ne voulait pas être dictateur (au contraire, il est étrangement démissionnaire, absent dans les dernières semaines), ses ennemis avaient tellement propagé cette idée que le reprendre en compte est une manière de capter une certaine vérité. Et puis s’il fallait retenir que les romans ou les films qui ont un regard juste (lequel change avec les époques et le progrès des recherches), on devrait bruler Dickens, Dumas et tant d’autres. En dehors de cela, le film est éblouissant
Bonjour monsieur Tavernier,
j’ai juste une question à vous poser concernant le film ALAMO que je possède déjà en DVD mais dont je ne sais quelle est la meilleure version du moins la plus complète car la durée du film semble varier de 140 mn à 203 (?).
Je sais que ma question est hors sujet mais j’ai beau aller sur mes sites habituels (dont Amazon), je ne sais quelle version prendre.
Merci beaucoup pour votre réponse.
A MAXOU37
Il y a une version aux USA qui est à peu près complête (une en laser qui fait 3 heures 22 et une en dvd et où j’ai vu des scènes qui avaient totalement disparues après la première semaine d’exclusivité en France mais le film avait déja été coupé. J’ai vu quatre versions différentes en France et parfois certaines VF étaient plus longues ou comportaient des scènes qui manquaient dans les VO mais en omettaient d’autres. Je ne sais même pas si celle que j’ai est totalement complète. CELA DIT, dans la version dite complète, il y a des moments qu’on avait justement coupés (les chansons de Frankie Avalon, des séquences très statiques et sentimentales. Avec ses erreurs énormes, le film me touche. Mais attention dans celle que j’ai, il y a des moments que j’ai eu du plaisir à retrouver et d’autres que je n’avais jamais vu et qui m’ont paru fort mauvais
sur mon dvd la durée est de 2h35.
merci beaucoup.
Moi la z1 (très belle copie)a 2h42
Bonjour,
Merci pour ce très beau témoignage sur Pierre Schoendoerffer.
Je recherche le second film qu’il a réalisé un an après la Passe du Diable, Ramuntcho. J’ai cru comprendre qu’il avait été édité en VHS, mais aucune trace de lui en DVD.
Je voulais savoir si vous aviez plus d’infos sur ce film, comme une disponibilité sur un dvd bonus par exemple, comme cela a été le cas pour la Section Anderson avec l’anthologie « Cinq Colonnes à la Une » ?
Cordialement.
A Pierre
C’tait une production Georges de Beauregard tout comme PECHEUR D’ISLANDE. Je ne les ai pas vus. Godard louait un plan de Mijanou dans RAMUNTCHO
LA 317e SECTION et LE CRABE TAMBOUR font partie des rares « films de guerre » qui m’ont marquée, sans doute pour la beauté de leur photographie, maintenant que j’y repense, le très beau noir & blanc de la 317e sûrement, et puis le choix des confrontations d’acteurs merveilleux tels que Jacques Perrin et Bruno Cremer, le même avec Jean Rochefortet et Claude Rich …
J’espère voir un jour DIEN BIEN PHU, ne serais-ce que pour voir la performance d’un autre acteur que j’adore, Donald Pleasence.
A Catherine
Il est un peu decevant alors que d’autres acteurs sont plus impressionnants : Patrick Catalifo, Raoul Billerey
Bonsoir,
je viens de découvrir DIEN BIEN PHU. En ce qui concerne les acteurs, je dois avouer avoir été un peu déçu par Patrick Catalifo, qui sonne un peu faux dans certaines scènes (dans la scène de présentation de ses amis dans le bar au début notamment). En revanche, j’ai été impressionné par la performance, bien qu’assez brève, de Maxime Leroux, excellent.
A Julien, vous avez raison dans cette scène mais le problème vient de la scène, d’un dialogue qui n’est qu’explicatif. Cette scène de présentation n’est rien d’autre qu’une scène de présentation avec des évocations qui ne doivent parler qu’à Schoendoerffer. Et Catalifo doit se débrouiller avec cela. De plus, je crois qu’elle fut post syncronisée et que Schoendoerffer ne voulait ni d’ambiance ni même d’une musique de piano bar pour donner de la profondeur. Je revois le monteur Armand Psenny (qui monta tous mes films jusqu’à L 627 ) s’arracher les cheveux. Je pense que ce n’est pas la faute de Catalifo, excellent dans les belles scènes final. Mais le film est boiteux. Plus on explique, moins on comprend et Donald Pleasance n’est pas crédible en journaliste américain. En revanche certains plans de bataille, la prise de la colline sont magnifiques. Les premiers plans aussi. C’est Hanoi qui plombe le film.
Entièrement d’accord avec BT: ce film est structurellement semi réussi car le contrepoint d’Hanoi plombe son avancée malgré une musique sublime et lancinante (de Delerue je crois). L’ambition de P S semblait par là viser une opposition entre terrain et géostratèges en chambre (en salon) pour mieux montrer un massacre scandaleusement inutile.
Le problème est que PS est un grand cinéaste épique et réaliste pas un grand dialecticien style Rossellini ou Pasolini.
Par comparaison,je trouve par exemple que Oliver Stone (que je n’adore pas pourtant!) réussissait à rendre très lisible le feuilleté hallucinant de la situation dans Salvador.
Bonjour,
Je profite de votre « post » au sujet de la réédition du dvd « la grande illusion » pour vous faire part de mon malaise durant la lecture de votre passionnant livre d’entretiens « le cinema dans le sang » où vous faites allusion à l’antisémitisme de Jean Renoir. A propos de Lautner, vous dites « il me trouble en me parlant de l’antisémitisme de Renoir… Je suis troublé à mon tour… que dit Lautner exactement?… car on ne saura pas grand chose à part l’interview par Jeanson qu’on trouve rapportée sur internet et qui si elle est vraie, est tout de même accablante .. et pourtant « la règle du jeu »?… la célèbre scène de la salade de pomme de terres ?
J’ai du mal à prendre ça à la légère et du coup j’ai cette épine dans ma chaussure qui me fait boiter chaque fois que je revois un film de Renoir… et je trouve qu’il y a bien peu d’informations à ce sujet et si peu de signes dans ses films. Comment savoir mieux? bien à vous.
A OLIVIER ADELEN
Je parle de Lautner ? Il me semble plutot que c’est Bernard Blier le premier qui m’a parlé de l’antisemitisme de la GRANDE ILLUSION (je ne suis pas d’accord). Et puis Gréville…Mais il y a beaucoup de textes, principalement ces lettres à Tixier Vignancourt ministre de l’information de Petain qui le félicitent d’avoir débarassé la France des juifs et des métèques, ce projet soumis à Vichy d’une cité du cinéma interdite aux memes juifs et meteques et qui serait dirigée par un des ces curés qui ont évangélisé les nègres. Le texte a été retrouvé par Philippe d’Hughes…Il y a tout ce que dénonce jeanson dans ses souvenirs dont m’avait parlé Aurenche et que Gilles Perrault a aussi vu. Cela n’empeche pas la REGLE DU JEU, TONI (film pour les étrangers), UNE PARTIE DE CAMPAGNE, LA GRANDE ILLUSION d’être admirables
Bonjour Bertrand,
quel coup sur la tête pour moi aussi de lire que Jean Renoir, un de nos plus grands cinéastes, était antisémite ! Quand on a réalisé un des plus grands films pacifistes au monde (LA GRANDE ILLUSION), un autre aussi prémonitoire que LA REGLE DU JEU, comment peut-on émettre ensuite de telles idées ?
Cela me fait penser à Brando qui, dans ses mémoires tenait Chaplin comme le plus grand génie qu’il avait rencontré mais que ce dernier était un véritable salopard et un tyran, notamment avec son frère Sydney.
Appelons cela le malaise Céline : être un génie d’une part tout en ayant un comportement ou des idées absolument abominables d’autre part. Quel gâchis et quel regret qu’ils n’aient pas tous eu la grandeur d’âme d’un John Ford.
A OLIVIER
Mais Ford a ses faiblesses que McBride a mis en lumière sans que cela entache la beauté sublime de certains films. Et Renoir a été antisémite quand cela le servait. Il ne l’a pas été aux USA et n’a pas prise de position semblables quand il est revenu en France
Il n’est pas certain que les acteurs qui ont travaillé avec John Ford ( voire qui sont devenus célèbres grâce à lui) n’aient gardé qu’un souvenir de grandeur d’âme !
Oui pardon, c’est à propos de BBlier ( page 86 ) … ces deux là ( blier lautner ) qui se sont naturellement fusio/aimantés tiens ! … bref je cherche encore « l’antisémitisme dans la grande illusion »…. Peut-on être double à ce point ? …
A ADELEN
ecouter et regardez la penetrante analyse d’Olivier Curchod dans le nouveau Blue Ray. C’est remarquable
L’époque était antisémite. (France coupée en deux depuis au moins l’affaire Dreyphus. 1894?) Voyez Céline. Le canard enchainé, à l’époque, avant-guerre, applaudissait ses pamphlets à deux mains. Juifs fauteurs de guerre, etc… Un antisémitisme qui était bien ancré y compris dans les classes populaires. Quand Gabin accable son compagnon d’évasion qui le freine et le traite de « sale juif » voire pire car toute sa haine peut-être même atavique remonte alors, c’est cet antisémitisme-là… En même temps, il l’aime bien, son copain… Renoir avait un côté un peu anar, comme je vois les choses et quand on était un peu anar, à l’époque, on était souvent aussi au moins un peu antisémite… Mais « la grande illusion » antisémite? je ne crois pas, même si elle montre l’antisémitisme « populaire » de cette époque…
Renoir n’était absolument pas antisémite, mais de crainte pour sa carrière et sa survie, il l’a exploité un court moment dans un sens de carriérisme, projetant de rester en France, c’est la lettre à Tixier. Puis il a décidé de partir aux USA car il en avait les moyens (c’est Flaherty qui lui a préparé le terrain là-bas), et là, il n’a pas eu à prendre position, ce qu’il a toujours voulu: ne pas prendre position, son humanisme est inséparable de sa peur de s’engager. Maintenant, il y a dans les rangs de ceux qui par complaisance, ont laissé faire l’antisémitisme en France durant ces années, plein de gens comme Renoir dont l’engagement était de ne pas s’engager et qui en ont porté la responsabilité, sans doute aussi lourde que celle de ceux qui se sont commis avec l’occupant. Mais eux, n’avaient pas les moyens de quitter la France.
L’admiration béate pour Renoir (Truffaut…) néglige de relier son humanisme à cette part noire.
Quant à Ford, est-ce que ses louvoiements et sa réserve prudente par rapport au maccarthysme n’étaient pas aussi lourds de responsabilité que l’engagement actif en faveur de l’anti-communisme de Ward Bond, Sam Wood? Peut-être pas, mais pas de beaucoup, alors.
Le bouquin de McBride vous en file une claque dans la figure question humanisme et générosité de Ford (au fait il n’était pas spécialement généreux et humain sur le plateau, lui aussi pratiquait la vexation pour obtenir ce qu’il voulait, ou pour le plaisir: voyez aussi l’autobiographie de Harry Carey Jr à ce sujet, comment Ford l’a traité), ben oui pourtant Fort Apache reste un chef d’oeuvre, et Partie de Campagne, La Règle du Jeu aussi.
A JC Freycon: en effet, l’interjection de mauvaise humeur et de fatigue de Gabin à Dalio n’a rien à voir avec un antisémitisme de Renoir (ou Gabin), si Dalio avait été breton, c’était « sale breton! ». Merci de replacer tout ça dans le contexte de l’époque.
A JC Freycon: je voulais dire « merci d’avoir replacé tout ça… » vous l’aviez compris!
A Martin Brady : Sauf qu’il n’était pas breton… mais juif… Et Gabin a honte, après, que ça soit remonté, sa haine atavique, son antisémitisme ordinaire… Dire sale breton aurait eu quand même moins de conséquences… Le personnage de Gabin EST antisémite, et ça n’a rien d’extraordinaire, c’est même banal, le personnage de Gabin n’est pas un monstre, c’est un type ordinaire, un brave gars d’origine modeste… c’est aussi ça qui est tellement bien dit dans le film… et qui annonce la suite, pas seulement que les guerriers ne seront plus les chevaliers d’antan…
Tout le monde rêve d’un John Ford tendre et sensible, comme le sont ses films. Je dois reconnaître en avoir pris un méchant coup le jour où je suis tombé sur des documents super 8 où on le voit sur son bateau ,en compagnie d’un John Wayne rayonnant, posant fièrement devant sa pêche du jour : une forêt de thons agonisants et sanguinolents alignés au-dessus du pont…
A Minette
Il faut relativiser cette image. A l’époque personne ne songeait à protéger les thons et le mythe des chasseurs ou grands pecheurs était popularisé par de tr!s nombreux romanciers. Il faudrait bruler les deux tiers d’Hemingway.Le fait que Ford aille avec Barry Goldwater me parait plus grave même s’il a toujours gardé une distance et un point de vue un peu anar et que finalement il était pour Kennedy
A Martin Brady : Du coup, j’ai revu la RDJ, pour me rafraîchir la mémoire. « J’ai jamais pu blairer les Juifs! » envoie Maréchal à Rosenthal. (Maréchal, n’est-ce pas prémonitoire ça aussi? Non non, je plaisante… Oui, c’est de très mauvais goût… mais bon…) A ce moment, ils ne sont plus compagnons d’armes, plus soudés non plus dans la détention qui à côté était plutôt confortable (le gîte et le couvert et un projet commun), ils viennent pourtant de dormir fraternellement l’un contre l’autre pour se tenir chaud dans la nuit glaciale… Ils sont dans la mouise, épuisés, ont faim et froid, ils n’en voient pas le bout… C’est là, que ça remonte, la haine, quand c’est vraiment la mouise… Ils ne peuvent plus se sentir, c’est d’ailleurs réciproque, ça explose… Ils se rabibochent assez vite il est vrai, plus vite que dans mon souvenir où le malaise entre les deux compères persistait jusqu’à la fin, mais ce n’était peut-être que le mien de malaise… A la fin, avant de passer la frontière suisse, ils s’embrassent, au cas où ils ne se reverraient plus… La dernière parole de Gabin pour Dalio : « Allez au revoir eh sale Juif! »… Ça rigole de part et d’autre, ça sonne un peu comme : « Tu vois bien, mon pote, que je n’ai rien contre les juifs… » Comme pour effacer ce qui avait eu lieu précédemment… qui n’était donc pas si anodin que ça, sinon quel besoin d’y revenir?… Moi, ça m’a toujours fait bizarre… et j’ai toujours ressenti Maréchal comme un genre d’antisémite « dormant », près à se réveiller et même à exploser et ça vient de loin, ça remonte de profond, pour moi, ce « j’ai jamais pu blairer les Juifs! »… Tant que tout va bien, il n’y a aucun danger…
A Jean Charles
Marechal ne serait il pas un des pères du Michel Simon du VIEIL HOMME ET L’ENFANT
A Bertrand Tavernier : Peut-être bien… Un autre père serait peut-être Céline, que Simon appréciait tant. Comme c’est beau, le VOYAGE lu par Michel Simon. (Et Arletty, lisant MORT A CREDIT…)Pour conclure peut-être, dire aussi que « la Grande Illusion » est sortie en 37, tout comme « Bagatelles pour un massacre », grand best-seller de cette année-là. Céline n’était pas encore un monstre, en 37, aux yeux de ses contemporains et de l’Histoire. Et être antisémite, pour beaucoup, n’avait rien de monstrueux. Ce n’est pas pour sauver Céline qui n’a nullement besoin d’être sauvé, ni défendu, ni célébré, ni quoi que ce soit, tellement son œuvre est grande, pour ne pas dire monstrueuse, c’est de toutes façons l’écrivain français le plus traduit et lu dans le monde, celui qui a influencé aussi une foule d’écrivains pas du tout d’extrême droite, genre Miller, Kerouac, Bukowski, c’est aussi le père de Michel Audiard entre tant autres et même des Juifs le lisent avec passion et rigolent même très fort en lisant les pamphlets, si si… Antisémite, Céline? Férocement… Est-ce une raison pour ne pas le lire?… (En plus, dans « Bagatelles » on se rend compte que finalement, ils sont tous juifs, au nord, au sud, partout, sauf lui. C’est un délire absolu…) On ne lirait pas non plus Lovecraft, antisémite maladif, grand grand paranoïaque. Ce serait dommage. Et tant d’autres… Bref on ne peut toujours s’indigner et juger de notre époque ce qui a eu lieu il y a 2/3 de siècle… On n’imagine pas vraiment ce qu’a été l’époque, la boucherie de 14, puis celle de 40, on est un peu « puceaux de l’horreur » comme disait si bien Céline, nous autres, pour la plupart, qui n’avons pas connu ces Guerres, ni la crise de 29, ni rien du tout à côté. Alors parfois ces indignations sont un peu pénibles, je trouve… En France on a toujours ce problème avec L’Histoire. Le régime de Vichy, le temps qu’on a mis pour le regarder bien en face… et donc l’antisémitisme, bien français, pas du tout apporté par Hitler en nous envahissant… Lisez Proudhon aussi, bien avant, l’anarchiste, ses carnets, des horreurs antisémites, il a même écrit qu’il fallait les… exterminer, les Juifs… tout ça parce que Marx s’était brillamment foutu de sa gueule et que ça l’avait humilié, le pauvre petit Proudhon, Marx, un Juif, s’était permis de le railler… Et puis la guerre d’Algérie, après, rebelote, négation, refus longtemps de voir les choses en face… Alors, que Maréchal, dans « la grande illusion », soit un poil antisémite, il n’y a pas de quoi s’indigner… Et que Renoir ait été antisémite, moi je n’en sais rien et je crois même que ça ne me tarabuste pas tant que ça, mais il n’y a rien d’extraordinaire là-dedans si c’est avéré… Et puis autrefois, aussi, on aimait bien chasser l’éléphant… Et oui, c’est moche, de chasser l’éléphant, cet animal si noble, sauf qu’à l’époque c’était beau…
A Jean Charles, attention l’antisemitisme était certe très repandu et présent dans de nombreux films français des années 30 mais il y avait aussi des gens qui le dénonçait avec véhémence : Jaurès, après l’affaire Dreyfus, Jules Valles, Jules Renard, Zola, Mirbeau et dans le cinéma Henri Jeanson, Prévert. Auguste Renoir était parait il anti sémite
A JC Freycon : vous ne pouvez pas dire que « chasser l’éléphant, c’était beau à l’époque ». Beau pour qui ? Une mode aristocratique peut-être ? J’espère qu’il restait quand même du monde dans la société pour vomir sur ces photos de sourires épanouis et d’éléphants morts. On parlait de Ford et d’Hemingway, par exemple ; franchement, même si les safaris et la pêche au gros étaient considérés « à l’époque » comme des oeuvres d’art, je préfèrerais quand même n’avoir connu de ces hommes que leurs créations cinématographiques ou littéraires…
A Minette Pascal : (Je ne sais plus où cliquer pour vous causer…) Si, c’était beau, chasser l’éléphant ou pêcher le gros, dans l’imaginaire de beaucoup. Il ne faut pas voir seulement le résultat, l’animal mort, le massacre. Plus l’animal est grand et noble, plus la chasse est émouvante, sacralisée. C’est un peu le syndrome Moby Dick. Voyez aussi tous les artistes, à l’époque d’Hemingway, férus de corrida. L’homme face au taureau, ça a de la gueule. Avez-vous vu une corrida sur la Plaza Mayor de Madrid? Moi oui. Une grande communion païenne. J’en avais des frissons de partout, et pourtant je n’étais que spectateur. Et oui, le taureau est mort, il y avait même du sang partout, ça sentait même la mort et il a souffert très longtemps. (Moi, je suis même incapable de tuer une souris.) Et le chasseur d’éléphant, le vrai chasseur, son objectif n’était pas de pauser pour la photo le pied sur la tête de l’animal, mais l’émotion d’être face à face, de l’avoir traqué, de commettre peut-être aussi quelque part un acte « sacrilège ». Voyez « Chasseur blanc cœur noir » d’Eastwood. Et aussi « The deer Hunter », les magnifiques scènes de chasse. Et dans « Colonel Blimp » la scène drôlatique où l’on voit les trophées de chasse du général Sugar Candy envahir les murs de son bureau entre deux guerres. C’est sûr que le safari ou la pêche au gros n’étaient pas des passe-temps de prolétaires… Mais qui s’en indignait?… L’émotion, quand vous avez une truite au bout de votre ligne (souvenir d’enfance), imaginez maintenant ce que ça doit être avec au bout un espadon… L’homme est un chasseur, au fond de lui, un prédateur, c’est comme ça, à une époque c’était même une question de survie. La grandeur de la chose, de mon point de vue, était qu’on était alors confronté directement à la nature tragique de la vie. Moi je trouve bien plus affreuse la vision d’un abattoir de cochons, mis en barquettes en polystyrène pour le supermarché.
A JC Freycon : Moi non plus je ne sais pas trop où vous répondre sur le problème de…comment dire….de l’esthétique du massacre. Je suppose que c’est vrai qu’il y a du tueur dans l’homme et que c’est une hypocrisie de le nier. Toutefois, avec la meilleure ouverture d’esprit possible, je me sens définitivement incapable d’associer la tauromachie, la pêche au gros ou le pachidermicide à quelque esthétique ou sensibilité artistique que ce soit. Et ce même si de grands esprits l’ont fait et revendiqué. Merci d’avoir réagi à ma remarque…
A JCF: merci de rafraîchir les mémoires avec ce compte-rendu détaillé, d’où l’intérêt d’avoir le dvd sous la main!
A JCF: je n’avais pas vu votre message précédent, alors dans mon souvenir dans La Grande Illusion (vous avez dit « RDJ » mais on a tous compris) l’ « injure » de Gabin m’était restée comme une injure qu’on balance à un camarade d’infortune, je l’ai vu récemment et j’ai pas du tout senti un antisémitisme chez Gabin, j’ai connu un peu cette ambiance entre hommes où on se balance des injures en n’y pensant pas plus que ça. On attrape n’importe quoi de caractéristique de l’autre et on en fait une insulte, ceci dit, vous auriez peut-être raison… Je ne vois pas Renoir non plus placer cette réplique de façon antisémite ni même inconsciente, bon je sais plus maintenant!
A Bertrand Tavernier : Tout à fait d’accord. Mais il ne me semblait pas avoir dit voir des antisémites partout comme Céline voyait des Juifs partout, je ne suis pas aussi fou. Bien sûr, qu’il y avait des anti-antisémites et heureusement. (La France coupée en deux, j’avais bien dit un peu vite et grossièrement, et ça ne m’était jamais sorti de l’esprit.)
A Martin Brady : Oui oui, je pensais « Grande illusion » et j’ai écrit « Règle du jeu »… En même temps, je m’emporte… Et tout à fait d’accord avec vous, je ne vois pas non plus Renoir placer cette réplique de façon antisémite. (Ce qui ne prouve en rien qu’il ne l’était pas. Moi je n’en sais rien, et je m’en fous un peu, comme j’ai dit.) Le film, vraiment, n’a absolument rien d’antisémite, selon moi. (Le personnage de Rosenthal est formidable, pas du tout une caricature de Juif.) Il faudrait que Bernard Blier nous explique… hein… S’il nous entend, de tout là-haut ou d’ailleurs ou de nulle part… N’empêche, la fin, qui est l’une des 3 conclusions du film (les deux autres : Rosenthal qui répond à Maréchal qui vient de dire qu’il espérait que ce soit la Dernière (des guerres) : « Te fais pas trop d’illusions… » Et le soldat allemand qui dit à son compagnon qui s’apprête à tirer sur les fuyards : « Laisse tomber, ils sont passés en Suisse… Tant mieux pour eux! ») est quand même éloquente : « Allez au revoir eh sale juif! » dit par un Maréchal matois et charmant au possible, en rigolant… Drôle de rendez-vous, non? (Evidemment, nous on connait l’Histoire que Renoir ne connaissait pas encore, puisqu’elle n’avait pas encore eu lieu.)
A Minette Pascal : Erreur : Evidemment pas la Plaza Mayor… Mais la Plaza de toros…
j’ai moi même du mal à voir de l’antisémitisme dans la grande illusion.la scène entre gabin et dalio est pourtant limpide non ?
Merci monsieut Tavernier pour ce très beau texte-hommage à Pierre schoendoerffer : je n’ai malheureusement pas eu la chance de voir la 317ème Section alors qu’il me fait face dans ma dvdthèque (j’avais lu le roman il y a quelques années, je suis donc impardonnable).
J’ai vu à l’occasion de son décès « L’honneur d’un capitaine » qui me semble plus amer peut être mais qui rend hommage aux vrais soldats, aux compagnons d’arme qui ont combattu ensemble dans une « guerre sans nom ».
Pour moi, PS est le plus « conradien » des cinéastes et voir Jacques Perrin et Bruno Cremer dans une adaptation d' »Au coeur des ténèbres » m’aurait semblé logique …
Bonsoir
Merci pour ce texte merveilleux sur Schoendorffer, voilà qui va me faire découvrir ce cinéaste que j’ai un peu négligé.
J’attendais de revoir L’Assoiffé de Guru Dutt depuis longtemps (on ne le trouve, très cher, qu’en zone 1) mais je ne vois rien chez l’éditeur Memento Films, même dans les annonces à venir? Vous êtes sûr qu’ils doivent le sortir?
Ca me fait penser qu’il y a eu une rétrospective et au moins un livre récemment sur Ritwik Ghattak, autre cinéaste indien, l’année dernière et qu’on ne peut rien trouver de lui en zone 2 française, il n’y a que des z2 du BFI avec sta! Patience, patience…
A Martin Brady
Il y certains qu’on peut trouver en VOD (ou VAD) et certains editeurs les testents pour savoir s’ils peuvent sortir en dvd
Bonjour,
J’essaie de me procurer « Directed by John Ford » de Bogdanovitch. MK2 boutique l’a commandé depuis juin 2011 mais ne semble plus pouvoir se le procurer. Epuisé? Voyez-vous une piste où je pourrais me le procurer?
Par ailleurs, je viens de visionner « Prime cut ». OK, ce film est rempli de convenu et de maladresses. Mais qu’il est étonnant! Le générique bien sûr avec la transformation en saucisses, puis la voiture qui est transformée par la moissonneuse-batteuse en pièces détachées… Ce titre ‘Carnage » qui fait référence à la viande: animale et humaine, jusqu’à ce « couteau » qui est une saucisse. Le nihilisme général et surtout de Mary-Ann (pas de différences entre humains et animaux). Sans compter ces images du Texas et de l’orage. Boiteux, certes, erratique, certes, mais vachement (c’est le cas de le dire) étonnant et stimulant! Je serais moins sévère que vous dans l’appréciation!…
Merci pour ce blog passionnant.
Pour info, Artus Films vient de sortir également le film d’Anthony Mann sous son titre français « Le Livre Noir », avec en bonus, une intervention de Jean-Claude Missiaen.
A Bertrand Tavernier: pour Ghattak, on ne trouve que Rivière Titas et l’Etoile Cachée en dvd z2 sta du BFI, je vais chercher en vod, merci.Pour L’Assoiffé de Dutt, ça doit être en projet, merci pour cette chronique fournie…
A Jadin Philippe-Michaël: ah, c’est exactement ça, Carnage! Merci! En fait, jamais film n’aura autant évoqué ce qui touche à la matière organique. Mais on a en général raison de dire que c’est un loupé.
A Sullivan: Le Livre Noir, tout le monde apprécie ce film qui m’avait laissé froid quand je l’avais vu à Chaillot, la photo était très belle c’est vrai dans une belle copie, mais pas de stf ça m’avait gêné j’ai dû être influencé et tous ces Français en costumes d’époque parlant anglais ça me gênait aussi: un sans-culotte lançait: « Good enough for me! ». Je vais lui redonner une chance, puisque tout le monde insiste!…