En attendant Lumière
11 octobre 2019 par Bertrand Tavernier - DVD
LECTURES
POUR UNE ÉCOLE PUBLIQUE ÉMANCIPATRICE de Véronique Decker (Libertalia), auteure de TROP CLASSE, L’ECOLE DU PEUPLE, est un texte clair, concis, percutant sur le rôle que devraient jouer l’école et l’éducation si on s’inspirait davantage des méthodes Freinet. Veronique Decker a été directrice d’établissements à Bobigny et à Montreuil. Elle connaît les quartiers en difficulté, a été confrontée à la violence de certains élèves, à la misogynie de caïds, à l’ignorance satisfaite mais aussi à la bonne volonté, au désir d’apprendre et énumère des petits faits, des constatations. Elle se heurte aux décisions changeantes, jamais expliquées, souvent incompréhensibles d’une administration nébuleuse. Un jour, on lui envoie une stagiaire qui doit travailler dans deux écoles. Mais on ne lui donnera jamais le nom de la deuxième. Et deux après, ce poste est supprimé toujours sans explications. Elle nous parle des portables et des parents qui sont ravis que leur enfant de 8 ans soit une « youtoubeuse ». « Beaucoup de gens pensent que c’est le rôle de l’école de faire ce travail d’apprentissage des mondes virtuels. Mais personne ne se soucie de vérifier que nous disposons de la formation, du matériel et du temps d’enseignement indispensable pour le faire. » Les passages sur les rapports avec les Roms sont poignants : elle héberge pendant quelques semaines deux crevettes avec l’aide d’un avocat, découvre très vite pourquoi elles étaient souvent insupportables en classe : eczéma, dents cariées, elles sont carencées en sommeil à dormir à 4 dans une chambre d’hôtel, l’une est blessée au bras et l’autre a besoin de semelles orthopédiques. Et la conduite, les résultats seront nettement meilleurs. Obligation d’une vraie politique de santé scolaire : « A 13 ans, l’aînée aura vécu dans trois pays différents et aura du apprendre deux langues étrangères pour s’y adapter. Une enfance Erasmus. »
J’ai été passionné par EXTRÉMISME RELIGIEUX ET DICTATURE (Actes Sud) d’Alaa El Aswany, l’auteur de L’IMMEUBLE YACOUBIAN (Actes Sud) qui fut défendu par Gilles Kepel dans Le Monde et dont on tira un film tout à fait estimable et de J’AURAIS AIMÉ ÊTRE ÉGYPTIEN (Actes Sud). Il s’agit de petites chroniques écrites pour divers journaux (Al-Shorouk, El Masri El-Yom), en prise avec les problèmes de la vie quotidienne, qui abordent des sujets polémiques tous d’actualité : la persécution d’une doctoresse bahaïe, la persécution des coptes. Certains titres parlent d’eux mêmes : « Pourquoi sommes nous en retard sur le reste du monde ? », « Comment vaincre la séduction des femmes ? », « Pourquoi les religieux extrémistes sont-ils si préoccupés par le corps de la femme ? », « l’Egypte face au fascisme ». Ces articles sont écrits avec une ironie décapante qui évoque Albert Cossery mais aussi une douleur face à la dégradation de la tolérance, de la civilisation en Egypte. Il donne des chiffres accablants sur les perversions sexuelles, les viols, les agressions sur enfants dans les milieux extrémistes religieux : en 2008, 850 jeunes filles saoudiennes ont fui leur domicile à cause d’agressions la plupart d’ordre sexuel, de leurs parents proches.
Dans QUESTIONS DE CINÉMA (Carlotta), Nicolas Saada interroge des cinéastes, Jarmusch, Ethan et Joel Coen (ce chapitre est excellent), Paul Schrader (idem), fait dialoguer John Carpenter et Dario Argento. Peu de Français comme le veut la mode (Chabrol mais sur DOCTEUR M.) mais John Woo et Wong Kar-wai… J’ai beaucoup apprécié son interview d’Elmer Bernstein où l’on découvre que dans de très nombreux cas, Bernstein ne rencontra, du moins durant ses premières années, que les dirigeants des secteurs musique des studios qu’il jugeait intelligents et talentueux. C’est le scénariste producteur Sidney Buchman qui lui confie la musique de l’excellent SATURDAY’S HERO de David Miller. Il ne rencontra jamais John Ford pour SEVEN WOMEN ni même Anthony Mann pour COTE 465, partition percussive particulièrement mémorable. Quelques exceptions : Preminger avec qui il s’entendit très bien pour L’HOMME AU BRAS D’OR et Cecil B. DeMille qui savait ce qu’il voulait et l’expliquait bien (il y a aussi un très bon entretien de Michel Ciment avec Bernstein dans un numéro de Positif). Passionnante interview de Schiffrin. Lui et Bernstein sont très respectueux du travail de Frank Waxman (AVENTURES EN BIRMANIE, LE BOULEVARD DU CRÉPUSCULE) lequel composa après FENÊTRE SUR COUR une suite qui incorporait des morceaux NON utilisés par Hitchcock : du Bernstein avant Bernstein déclare Schiffrin. On croise beaucoup d’autres créateurs dans ce livre, de Thelma Schoonmaker à Angelo Badalamenti et à l’omniprésent Francis Ford Coppola, sans oublier David Lynch et Dianne Johnson. Bref, je me suis régalé.
SAMUEL FULLER – JUSQU’À L’ÉPUISEMENT (Rouge Profond) de Frank Lafond offre une approche assez originale de Fuller en privilégiant certains angles, en se concentrant sur certains films et surtout en allant piocher des faits, des explications dans les archives des studios. On découvre ainsi le processus de production de certaines œuvres, les remarques de la Censure, les modifications que cela entraîne dans le scénario avant le tournage. Lafond a regardé parfois plusieurs versions du scénario ce qui l’amène à faire des remarques souvent passionnantes : les scènes sentimentales, les rapports amoureux entre Robert Stack et une jeune Japonaise constituent un vrai apport de Fuller qui enrichit le scénario original de Harry Kleiner pour LA DERNIÈRE RAFALE de William Keighley (un bon film noir où Widmark jouait le gangster que reprend Robert Ryan). Lafond étudie longuement la tragique histoire du tournage de CHIEN BLANC qui fut assassiné avant sa sortie par des militants noirs qui n’avaient pas vu le film qu’ils jugeaient aussi raciste que NAISSANCE D’UNE NATION. Deux de ces militants noirs avaient été enrôlés par le studio pour donner un feu vert. Ils ne firent aucune observation durant le tournage mais se déchaînèrent dès qu’ils furent retirés des listes de paie. Leurs critiques témoignent d’une méconnaissance sidérante du film, des intentions du cinéastes, du roman de Romain Gary écrivain qu’ils ignorent totalement, le traitant d’auteur minable de troisième zone qui ne s’est jamais intéressé aux Noirs. Ils oublient simplement la dénonciation du colonialisme qu’on trouve dans LES RACINES DU CIEL. Cela dit, le roman CHIEN BLANC les ferait hurler, pour sa dénonciation au vitriol de la manière dont certains membres de Panthères Noires abusèrent de Jean Seberg, la rançonnant avec une misogynie crasse. Toute cette partie de ce livre extraordinaire avait été écarté par Fuller et par tous les scénaristes qui voulurent adapter le roman. J’ai appris aussi beaucoup de choses sur l’exploitation de J’AI VÉCU L’ENFER DE CORÉE, rebaptisé SERGENT ZACK.
Irwin Winkler dans A LIFE IN MOVIES (Abrams Press) évoque sa carrière de producteur riche en œuvres marquantes sous forme d’un journal. Du moins après les premières années. Avant, il entre tout de suite dans le vif du sujet. Rien sur son enfance, ses parents. En deux phrases, il relate comment dans l’Armée, il déclara qu’il pouvait taper à la machine, ce qui n’étais pas tout à fait exact mais réussit à se rendre indispensable en mettant la main sur des dossiers égarés concernant des troupes d’infanterie en Corée (« Une guerre inutile dans laquelle 52 000 Américains périrent »). Il trouve un travail à la William Morris, grimpe les échelons, devient un petit agent, s’associe avec un jeune diplômé, Robert Chartoff. Ils parviennent à gérer certains contrats de Julie Christie et la mettent en rapport avec Ponti et Lean qui préparaient LE DOCTEUR JIVAGO. Christie est choisie de préférence à Jane Fonda et Winkler et Chartoff doivent emprunter de l’argent pour se rendre à Londres assister à la première de DARLING. A la MGM, ils trouvent un sujet pour Julie Christie. Bob O’Brien, le président, le lit et leur dit qu’il est d’accord pour le produire à condition qu’on adapte le personnage de Christie pour Elvis Presley. Et Winkler s’entend répondre : « C’est un très bonne idée, Bob. » Cela donnera DOUBLE TROUBLE de Norman Taurog qu’on peut conseiller aux apprentis scénaristes pour voir comment a fonctionné le changement d’interprète. Taurog qui était pratiquement aveugle comme le découvre Winkler. Des histoires comme cela, on en trouve des centaines. Il y a celles sur la naissance de ON ACHÈVE BIEN LES CHEVAUX. Les pages décrivant comment Winkler et Chartoff vont réussir à se débarrasser de James Poe que Fonda avait choisi comme réalisateur « parce qu’il portait les mêmes bottes que John Ford » et imposer en douce Sydney Pollack sont très savoureuses. Il y a encore les passages sur RAGING BULL, L’ÉTOFFE DES HÉROS, NEW YORK, NEW YORK, deux films avec Costa Gavras dont l’excellent MUSIC BOX, AUTOUR DE MINUIT (Costa et moi, nous nous en sortons bien). Winkler évoque sans prendre de gants aussi la politique souvent erratique, incompréhensible des Studios, qui stoppent un projet quelques jours avant le tournage après l’avoir couvert d’éloge pendant huit mois, les luttes imbéciles pour le pouvoir. Il déclare détester Ken Russell et son VALENTINO, ne mâche pas ses mots contre la conduite arrogante de Peter Bogdanovich qui saccage dans NICKELODEON un fort bon scénario, contre le Verhoeven de BASIC INSTINCT, s’en prend violemment à David Biggelman qui dirigea un temps la Columbia et fut condamné pour escroquerie. Il prend des positions progressistes sur de nombreux sujets et montre comment le montage financier de ROCKY (ils hypothéquèrent leurs maisons pour financer le film refusé par tous) reproduit le thème du film, la revanche d’un prolétaire.
FESTIVAL LUMIÈRE
Le festival projette sous un titre un peu trompeur (certains ont été produits par la MGM mais rachetés et restaurés par Warner les Tresors Warner), une dizaine films Pre-Code que j’ai plusieurs fois défendus dans cette chronique pour leur audace, leur vitalité, leur énergie narrative, leurs dialogues souvent percutants. On pourra voir :
ÂMES LIBRES de Clarence Brown où Norma Shearer campe un personnage qui a des rapport sulfureux avec Clark Gable.
L’ANGE BLANC de Wellman avec Barbara Stanwyck et encore Gable qui fait une entrée fracassante en lui filant un bourre pif : « Je suis Max le chauffeur ».
BLONDE CRAZY, un des très bons Roy del Ruth avec Cagney et la merveilleuse Jan Blondell sa partenaire préférée qui lui tient tête.
JEWEL ROBBERY, une délectable comédie où William Powell et Kay Francis forment un couple éblouissant.
RED DUST (LA BELLE DE SAIGON), la première version de MOGAMBO, là encore dialogue truffé de sous-entendus. Gable et Harlow donnent une sensualité, une force érotique à toutes leurs scènes et Myrna Loy est excellente.
LA FEMME AUX CHEVEUX ROUGES s’ouvre sur une question de Harlow : « vous ne trouvez pas que cette robe est un peu transparente » – « oui Madame » – « Bien je la prends ». Le ton est donné.
EMPLOYEE’S ENTRANCE est peut être le meilleur Roy Del Ruth que j’ai vu : rapide, caustique, audacieux. Warren Williams est aux acteurs Pre-Code ce que Barbara Stanwyck est aux actrices. Il imposera une série de personnages de canailles cyniques, impitoyables mais charmeuses et désinvoltes. TOUTES les situations et les répliques paraissent en prise avec les crises économiques actuelles et le rapport avec les banques.
THE MIND READER, toujours du même cinéaste, très inspiré à cette époque, avec encore Warren Williams.
BABY FACE a été reconnu ces dernières années comme un des films les plus féministes. Dans les 15 premières minutes, Stanwyck piétine un bon nombre de tabous dont il se ra interdit de parler après 33 : un père qui prostitue sa fille, la corruption politique, parricide, rapports sexuels dès la première rencontre etc. On peut brièvement voir John Wayne.
FEMALE est attribué à Curtiz qui pourtant ne tourna qu’une semaine à la fin nous apprend Aman K. Rode dans son indispensable biographie. Le film fut commencé par Dieterlé, repris par Wellman qui en tourna la majorité, Curtiz assurant surtout des retakes qui amoindrissent le ton caustique de l’oeuvre.
Parmi d’autres films de la même période, ANN VICKERS de John Cromwell (zone 1) adapte Sinclair Lewis et édulcore le roman sans en déformer le sens. Ann n’épouse pas l’homme qui prétend l’aimer et qui l’oublie dès qu’il revient de la guerre mais la violence masculine est toute aussi forte. Et elle file un parfait amour avec Walter Huston qui est marié. Cromwell tourne pratiquement toutes les scènes de prison souvent violentes et dures (matraquages, repas, courses dans les couloirs) en d’impressionnantes plongées comme si la caméra épousait le point de vue de l’héroïne qui ne peut que regarder de loin, d’une passerelle. Personne ne note ni à l’époque, ni dans les commentaires actuels, cette recherche esthétique pourtant forte.
PICTURE SNATCHER (Warner) récit dynamique qui fonce à cent à l’heure est un petit joyau avec des détails vraiment noirs : le héros trompe honteusement un pompier à moitié fou, on assiste à l’exécution d’une femme durant laquelle Cagney vole une photo de la condamnée sur la chaise électrique. Ce moment s’inspire de l’exécution de Ruth Snyder que quelqu’un parvint à photographier. Le film est truffé de remarques cyniques sur les journaux qu’un étudiant définit naïvement comme « cette somme de travail, de sueur, de photos qui va sortir demain. Des centaines de milliers d’hommes et de femmes vont nourrir leurs âmes médiocres et affamées des indiscrétions et des aventures d’autrui. Et après qu’est-ce qu’il deviendra ? » – « Vous ne savez pas », dit Cagney, « on s’en servira pour emballer les harengs ».
BLONDIE JOHNSON (Warner) est un de ces épatants films Pre-Code dont la Warner avait le secret dont on doit attribuer les vertus (narration concise, réalisation rapide, dégraissée) autant au studio, au chef opérateur Tony Gaudio qu’au réalisateur. Les séquences d’ouvertures foudroyantes tracent en quelques plans un portrait fort peu flatteur de diverses institutions dont aucune ne veut aider l’héroïne, Blondie (l’irréprochable Joan Blondell, l’une des reines du Pre-Code) : l’aide sociale, les avocats (« pas d’argent, pas de procès »), l’Eglise représentée par un prêtre aussi onctueux qu’antipathique. Elle décidera de se venger en s’élevant dans l’échelle sociale mais en se servant de son astuce, de son intelligence plutôt que de son pouvoir sexuel, ce qui rend le personnage assez original : « Pour moi, le travail prime toujours sur le plaisir », dit-elle.
FIVE STAR FINAL (zone 2) de Mervyn LeRoy est une charge incroyablement violente contre la presse à scandale où l’on attaque aussi les lecteurs. Edward G. Robinson s’en prend constamment à eux, les considérant comme une bande d’illettrés stupides, bigots et ignorants. Les victimes sont décrites de manière un peu trop mélodramatique et leurs scènes paraissent plus statiques. Mais tout ce qui se déroule à l’intérieur du journal est rapide, dépouillé, brutal. Boris Karloff campe remarquablement un reporter salace, ivrogne, obsédé sexuel, particulièrement répugnant, qui se déguise en prêtre pour extorquer une photo. « Vous êtes un blasphème vivant », lui dit Robinson.
THE HOUSE ON 56 STREET (zone 1) est un mélodrame tarabiscoté où Florey parvient à atténuer le coté incongru, invraisemblable et un peu zinzin de certaines péripéties : l’héroïne sort de prison et se voit offrir un travail dans une maison de jeu qui se trouve être l’appartement où elle tomba amoureuse.
ANDRÉ CAYATTE
Revoir les films de Cayatte (sortis en Blu-ray par Gaumont) fut un exercice salutaire, une manière saine de remettre en cause une vision archaïque, réactionnaire (en fait beaucoup d’attaques venaient de la droite) et simpliste de son œuvre qui comprend moins de films à thèse qu’on le dit. Et parmi ceux-là, il est vrai que JUSTICE EST FAITE pour mettre en lumière la difficulté de juger équitablement, s’appuie sur un cas extrême : l’euthanasie qui déclenche encore aujourd’hui des polémiques infinies. Pensez à l’affaire Lambert qui redonne une actualité à ce film. Par ailleurs, à chaque vision, je suis subjugué par le nombre, la variété des personnages, des milieux sociaux, la rapidité elliptique avec lesquels ils sont décrits. On côtoie aussi bien des bourgeois que des policiers, des magistrats, des ouvriers, des anciens militaires (Noel Roquevert est particulièrement spectaculaire), des paysans. Cayatte remet en question leur regard et le nôtre. Le propos est beaucoup plus ouvert qu’on le laisse entendre et il questionne aussi le spectateur. Il faut dire qu’il trouve en Charles Spaak un complice indispensable.
NOUS SOMMES TOUS DES ASSASSINS est le premier film qui aborde la peine de mort de manière frontale et non en fin de récit comme dans J’AI LE DROIT DE VIVRE de Lang et autres œuvres généreuses. Est-ce que questionner le bien fondé de la peine de mort est une thèse ou un constat ? Il est vrai que Spaak prend ouvertement position à travers des personnages de médecins (parfois idéalistes mais est ce un crime ?), de prêtres, certaines femmes ou ce que disent les condamnés. Qui contrairement à ce que l’on affirme ne sont pas innocents. Il y a même des tueurs répugnants parmi eux qui ont assassiné des enfants, tué et violé une petite fille. Même Mouloudji qui commence à apprendre à lire et se transforme ne peut pas imputer tous ses crimes à la société. Il est certes alcoolique, vit dans un milieu effroyable, avec une mère atroce de brutalité mais il est comme possédé par une rage, une violence qui explose à l’improviste et le fait tirer plusieurs fois surs son chef de réseau. Est-ce une thèse que de montrer l’horreur froide, méthodique qui préside à une exécution capitale avec tout ce personnel qui arrive en chaussettes au petit matin, ce rituel épouvantable, la froideur des formules officielles qui fait ressortir la compassion de certains gardiens (Frankeur épatant) ? On retrouve dans ce film puissant, dirigé une fois encore avec une rapidité dans le récit, un gout pour l’ellipse, une extraordinaire variété de décors – chopés avec justesse en deux ou trois plans -, de milieux, dans ce film extrêmement bien joué de Mouloudji à Balpétré en passant par Pellegrin, Renaud Mary et des dizaines d’autres tout ce qui fut analysé et développé par Robert Badinter.
J’ai dit le bien qu’il fallait penser de la première partie du DOSSIER NOIR qui gagne à être revu et dans la deuxième partie la force des deux personnages de policiers incarnés par Blier et Roquevert.
PIERRE ET JEAN n’est pas un film à thèse mais une belle histoire d’amour tirée de Maupassant qui donne à Renée Saint Cyr, remarquable, le rôle de sa vie. Cayatte impose un ton retenu, dépouillé, une vision plutôt sombre avec des rapports minés par la jalousie, l’envie (entre les deux frères), l’égoïsme masculin, le contentement de soi (pour le couple Saint Cyr/ Roquevert, encore lui). La dernière réplique, sidérante de pessimisme inconscient (« tu te rends compte ma pauvre vieille, on va rester ensemble jusqu’à notre mort » – je cite de mémoire), est absolument anthologique. Terminer un film de cette façon est remarquable.
Je suis très heureux de découvrir LE DERNIER SOU dans une copie restaurée qui m’avait bien plu même dans une horrible version. Cette histoire d’escroquerie est rondement menée surtout dans les deux premiers tiers et Cayatte s’appuyant sur un scénario co-écrit avec Louis Chavance lui donne une noirceur, une âpreté rare dans ce genre d’histoire. Une fois de plus, Noel Roquevert est royal dans un personnages aux nombreuses facettes, charmeur, caustique, fourbe et en fin de compte impitoyable. Ginette Leclerc dégage un charme fou, une chaleur dans un personnage plus sympathique qu’à l’ordinaire. Certains extérieurs de rues, reconstitués en studio, paraissent aussi oppressants, aussi désolés que les couloirs de la prison. A découvrir.
ŒIL POUR ŒIL reste un film profondément original surtout dans ses deux premiers tiers, avec une description retenue et lucide de la colonisation, de belles scènes nocturnes et de magnifiques et très nombreux extérieurs alors qu’on décrivait le cinéma de Cayatte comme confiné en studio. Ce qui est faux dès LE DESSOUS DES CARTES et va être battu en brèche par LE PASSAGE DU RHIN, peut être son chef d’œuvre avec AVANT LE DÉLUGE. Deux œuvres complexes, surprenantes qui réfutent bien des idées reçues et témoignent d’une grande ouverture d’esprit. Peu de film ont évoqué l’antisémitisme comme AVANT LE DELUGE ou le personnage de Balpétré qui voit partout un complot juif est inoubliable comme est inoubliable Aznavour dans LE PASSAGE. Deux films à redécouvrir absolument. Dans le premier, la construction en flashback est parfois appuyée, soulignée (défaut compensé par l’écriture acérée de certaines séquences, la justesse du personnage de Blier ce militant socialiste épris de l’humanité mais aveugle face à son fils et surtout à sa fille), défaut auquel échappe LE PASSAGE DU RHIN dont la liberté de ton est encore plus frappante aujourd’hui.
COPPOLA
Dans les films de Francis Coppola dont beaucoup ont été admirablement restaurés par Pathé, ceux qui m’ont spécialement touché en dehors des PARRAIN qui tiennent incroyablement le coup et d’APOCALYPSE, c’est OUTSIDERS, chronique mélancolique, bouleversante qui me touche plus des années après que RUSTY JAMES pourtant impressionnant visuellement. J’ai aussi adoré revoir CONVERSATION SECRÈTE et son extraordinaire premier plan, JARDINS DE PIERRE, œuvre méconnue, secrète, émouvante et TUCKER qu’on oublie trop souvent mais qui n’est disponible qu’en zone 1.
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avec « Irishman »Martin Scorsese vient de clore avec brio une série de films sur la mafia,avec ses hommes de l’ombre.Il nous propose en plus de trois heures une œuvre maitrisée de bout en bout.Il revient une nouvelle fois sur les liens directs entre la mafia,les politiques,la justice et les syndicats en l’occurrence celui des camionneurs avec à sa tète Jimmy Hoffa figure emblématique des années 60 et 70.Le choix des acteurs,la reconstitution et les décors d’époque sont à la hauteur de la mise en scène tout en finesse et douceur.On relève peu de violences mais des non-dits et il arrive à nous plonger dans la psychologie de ces hommes avides de pouvoir,de sexes et d’argent sans tomber dans la caricature habituelle des polars.Esperons tous que cette œuvre sortira en format dvd car il signe surement « le chant du cygne »d’un genre qui ne sera jamais égalé.
Au risque ici d’aller à contre-courant, et je sais toute l’affection que Monsieur Tavernier porte à Monsieur Scorsese et reconnaît tout le talent de ce(s) dernier(s) j’avoue avoir été déçu par ce film pour avoir passé trois heures à la fois à regarder le film que J’attendais tout en espérant en voir un autre.
Je me demande si l’histoire n´eut pas été mieux servie par un casting de quasi inconnus (ou moins connus) , qui aurait permis à Scorsese de réaliser quelque chose de plus inattendu , moins caricatural de ses précédents chef-d’œuvres du genre.
À part Pesci qui en vieillissant reste toujours Inquiétant dans le personnage je trouve que le »jeune » Pacino n’est pas crédible, marchant comme un grand-père fatigué après avoir laissé sa victime allongé sur le bitume. je reste donc sur ma faim, Peut-être à tort, mais c’est en tout cas le goût que m’a laissé ce film un peu peut-être à tort, mais c’est en tout cas le goût que m’a laissé ce film un peu rassasié, un peu frustré, d’un plaisir coupable.
Pardon pour les erreurs, syntaxe et autres répétitions, Siri ne m’est pas toujours fidèle.
à A Angel/IRISHMAN: bravo oui chef d’oeuvre, et sans se concerter! Scorsese lui-même a terriblement mûri et a su organiser autour du thème du vieillissement une espèce de toile, de mosaïque, de vision globale qui renvoie toujours à la mort lente, inexorable, de personnages complètement perdus, qui ne peuvent que se raccrocher à leur volonté de puissance, à leur désir d’argent comme but absolu, sans se douter de ce que leur ascension sociale peut avoir de dérisoire. Pour retrouver des éléments de ce qui constitue cette toile il vaudra mieux relire votre commentaire affiné et lucide (si!), je suis plus dans le ressenti que dans l’analyse et je n’ai plus qu’à revoir le film.
Quand même la dernière heure de IRISHMAN qui nous emmène donc si loin, est bien le produit logique de la première partie que je ne veux pas sousestimer. Avec ce final majestueux, nous voilà traverser des pièces vides et glaçantes, effleurant du doigt le vide (que de questions étranges de la part du spectateur: qu’est-ce que c’est que cette histoire de poisson dans la voiture? juste un détail d’intrigue? mon oeil). C’est le dernier plan des AFFRANCHIS quand Ray Liotta ouvre la porte de son pavillon minable, ou celui de CASINO avec DeNiro dans sa veste rose nous fixant à travers ses verres fumés énormes qui sont pendant cette longue conclusion de IRISHMAN, développés jusqu’au magistral. Pour la force de la forme elle-même ya du boulot à étudier celle-ci, une autre fois!
Toujours sur la plateforme netflix je vous encourage à voir le film de Steven Soderbergh qui à prouver en 30 ans de carrière qui l’est un cinéaste doué. »Laudramat,Panama papers »dresse un tableau noir des placements d’argent et nous montre une fois de plus le visage découvert du capitalisme sauvage qui broit et accentue de plus en plus les inégalités entre les puissances des banques et les individues hommes,femmes et enfants qui survivent chaque jour avec moins de 1 dollars.
a frederic fortet.Je pense que ce sera la dernière fois que l’on pourra voir réunit à l’écran des acteurs tels De niro ,Pacino,Keitel et bien sur Joe Pesci.Scorsese est rester très lié avec eux,dans le casting on trouve également des tètes nouvelles notamment l’acteur qui incarne le fils adoptif de Jimmy Hoffa qui à des faux airs de Matt Damon.
A Yves Rouxel
C’est vrai mais il y a surtout ces échanges magistralement dialogues par Steven Zaillian (avec sans doute de l’improvisation), triomphe de la paranoïa (les adversaires ne parviennent jamais à aborder le sujet principal et se perdent dans des arguties interminables formidablement cocasses) où Scorsese ose prendre son temps, laisse du champ à ses personnages. Sondage intéressant, le gens qui voient le film en salle l’aiment beaucoup dans une écrasante majorité. Près de 30% de ceux qui le voient sur Netflix ne vont pas au bout. Preuve que la concentration est beaucoup moins grande
à Bertrand et Y Rouxel/IRISHMAN/Je l’ai vu par Netflix et c’est un chef d’oeuvre, DeNiro libéré de son cabotinage ses ficelles, Pesci redoutable dans sa sobriété même (comme cet acteur s’est affiné, a mûri!), Pacino en pleine forme, on peut à la rigueur trouver les deux premières heures cousines de GOODFELLAS ou réminiscentes d’autres films, mais à partir de la chute de J Hoffa, ça touche au sublime et le vrai sujet c’est le vieillissement et là, Scorsese arrive à nous chuchoter des trucs glacants à l’oreille comme dans une tragédie grecque où on sent le thème derrière les discours, les envolées, les batailles ou les fêtes grandioses.
Au chapitre humour on peut citer la tentative de conciliation entre Hoffa et Tony Pro, et cette maxime « c’est facile pour trois personnes de garder un secret mais il faut que deux soient mortes ».
Je pense que Scorcese doit avoir une autorité en béton armé sur ses acteurs pour qu’ils soient aussi bons, et que surtout DeNiro arrête de faire le malin et joue vraiment.
A Bertrand, Yves et F.Fortet
J’ai trouvé THE IRISHMAN merveilleux et jamais décevant. Il faut juste accepter que ce ne soit pas tout à fait pareil que par le passé.
Oui, Scorsese ose prendre son temps et surtout, il ose finir son film sur la négation totale de toute idée de spectacle, de feux d’artifice. C’est follement gonflé de consacrer comme ça la dernière demi-heure a des images de vieillesse et de solitude, froides, décharnées, avec ce plan final, truqué où l’on passe du jour à la nuit alors que la caméra, qui allait de l’avant en suivant l’infirmière, se retourne pour revenir dans la chambre de Frank Sheeran.
J’ai trouvé génial ce retour récurrent au trajet en voiture jusqu’à Detroit avec les pauses cigarettes des femmes qui viennent scander le récit, et magnifiques, au cours de ces scènes, ces atmosphères de motels, de salle désertes où l’on prend un petit déjeuner.
Plus généralement, Scorsese creuse chaque scène de l’intérieur, de façon plus raffinée que jamais, comme si le principe d’une séquence comme celle, dans GOODFELLAS, où De Niro essaie d’inciter Lorraine Bracco à rentrer dans un dépôt pour s’y trouver un joli manteau, était étendu à pratiquement tout un film. J’ai admiré également comment la mise en scène « habille » chaque arrière-plan de toute une vibration vitale et évocatrice (le film est la meilleure reconstitution que j’ai pu voir du début des années 60 américaine), intégrant le moindre figurant à une invention moins mise en avant que dans GOODFELLAS et CASINO mais non moins profuse.
Pour moi, c’est un chef d’œuvre.
Découvert par hasard un film de Jean Dellanoy de 1959″Guinguette »est une œuvre guillerette à souhait avec la jolie frimousse de Zizi Jeammaire qui joue un peu les garçons manqués.On pense au premier abord a une comédie légère sans prétention pourtant le film vire au policier avec une équipe de gangsters incroyable(Paul Meurisse,Raymond Bussières et Georges Lycan et son petit chien dans les bras forment un trio désopilant à souhait).Puis il y a les dialogues de Jeanson: »Elle avait le sommeil lourd mais les cuisses légères »dixit le personnage du viconte incarné par le flegmatique Meurisse.Il faut reconnaitre que le chanteur-acteur Jean claude Pascal n’est pas vraiment à la hauteur dans cette histoire d’amour avec Guiguette une ancienne prostituée qui a économiser et ouvert une auberge dansante près de l’eau,au calme loin de la ville et du bruit ambiant.Le film reste quand même à découvrir pour l’ambiance non chalante et joyeuse.
A Yves Rouxel
J’ai des doutes mais c’est néanmoins, envers et con très tout, DELANNOY
a Bertrand.Hou la Bertrand vous faites dans le jeu de mot.Moi aussi avec l’actualité sociale agité dans notre pauvre pays,je suis en vert et contre tout.Pourtant la couleur verte porte malheur!Qui à dit ça que je le dénonce?
a Bertrand.Je tiens à vous remercier une nouvelle fois pour cette fournée de films à découvrir ou à revoir et d’avoir évoquer le dernier festival Lumières de Lyon.En revoyant »Justice est faite »de Cayatte j’ai penser à un documentaire fort instructif que propose actuellement netflix sur l’affaire Gégory.Documentaire fait d’archives de la télévision française mais aussi d’autres chaines francopholes.On entend mème la voix du fameux corbeau qui a envoyer plusieurs missives.35 ans après la mort de cet enfant le mystère plane toujours dans les eaux de la vologne.Les protagonistes sont vieux ,d’autres ont disparu.Saura-t-on un jour la verité et les mobiles de cet étrange affaire?La plateforme diffuse également la superproduction de Scorsese »Irishman »que j’espère voir .
A Yves Rouxel
Vous avez entièrement raison, ce documentaire de Gilles Marchand est excellent et cerne très bien les terribles conneries commises par un juge avide d’honneur (sorti un des derniers de l’école avec mention : « ne jamais lui confier d’affaire importante »). Il faut revoir aussi l’excellente série réalisée par Raoul Peck
A Bertrand.Pour revenir à la série documentaire de Gilles Marchand,signalons au passage plusieurs pans de l’affaire qui restent dans l’ombre.Pourquoi Murielle Bolle adolescente de 15 ans vivait chez sa sœur mariée à Bernard Laroche.ensuite on ne précise aucunement ou a été kidnapper le petit Grégory et dans quelle circonstance vu qu’il n’était pas à l’école(trop jeune).Ce qui m’a choquer le plus c’est le journaliste correspondant de RTL dans l’est de la France qui à signer de trois noms différents dans deux quotidiens et un célèbre hebdomadaire qui sort le dimanche avec le soutien de sa femme elle aussi journaliste,ceci pour l’appat du gain.C’est honteux au niveau de la déontonlogie de l’information.Je n’évoquerais pas ici les maladresses du jeune juge d’instruction Jean michel Lambert qui à mis fin à sa vie l’an dernier.Il n’a rien fait afin d’empécher la meute de charognards qui ont harceler la famille Vuillemin et le clan Laroche.Cette histoire reste un mystère irrésolu à ce jour.
A Yves Rouxel
Ce qui est choquant dans ce couple de « journalistes charognards » comme vous dites, ce n’est pas seulement qu’ils écrivent dans plusieurs journaux avec différents noms, c’est qu’ils écrivent systématiquement à charge avec l’appui de l’avocat de Laroche qui pour défendre son client, fait charger à mort via la presse Christine Villemin. Et ils ont en leurs mains comme le policier de la PJ et cet avocat le dossier de l’instruction ce qui est totalement illegal. Non seulement le Juge Lambert n’a rien fait pour bloquer cette meute sanguinaire mais il l’a encouragée par vanité personnelle, accumulant les fautes de procédures, les décisions ineptes (ne pas interroger puis protéger Murielle Belle parce qu’il veut partir en week end et du coup elle est renvoyée dans sa famille qui peut exercer toutes les pressions du monde)
à Yves Rouxel: j’ai vu que durant l’affaire Dominici, le journaliste J Chapus avait produit un faux journal de Elisabeth Drummond! J’ai aussi vu dans un doc sur l’affaire un titre de France Soir je crois sur lequel on lit qqchose comme « le vieux continue à mentir! » au cours de son procès jugement non rendu. On verrait plus ça maintenant mais des activistes ont manifesté devant les cinés montrant J ACCUSE ayant déjà rendu leur verdict sur RP!
A Bertrand.Entièrement d’accord avec vous concernant le juge Jean michel Lambert qui a laisser une lettre avant son suicide expliquant qu’il ne voulait pas ètre le bouc émissaire de cette affaire.Dans le dernier volet de la série on apprend que Grégory était garder par une nourrice.Mais qui est cette femme qui habitait le village?Puis les tests adn relévé sur un timbre poste n’ont rien donner comme par hasard!on voit également un extrait du film de Clouzot »Le corbeau »avec la célèbre scène de la dictée dans l’école communale ou les protagonistes sont obligés d’écrire de la main droite puis de la gauche afin de comparer avec l’écriture du fameux corbeau.Enfin je terminerais avec ses images saisisantes ou Jacques Martin animateur producteur sur Antenne 2 interprète une chanson sur l’affaire Grégory en demandant un non lieu pour l’incarceration de Jean marie Villemin.Il fallait quand même oser pour l’époque car les émissions du dimanche étaient toutes en direct.Celà parait inconcevable aujourd’hui puisque la plupard des émissions du week end sont enregistrées et montées dans la semaine avec des coupes bien sur.
A Yves
Vous connaissez peut-être cette video en hommage au travail de Pierre Trabaud en tant qu’acteur de doublage…
https://www.youtube.com/watch?v=TXYTfxXuU1o
A Bertrand.Je n’arrive pas à comprendre pourquoi la veuve et les deux enfants de Jean michel Lambert attaque en règle le réalisateur Gilles Marchand et les producteurs Netflix.Cette série dépoussière et lève des hypothèses sur cette macabre affaire.La gréffière qui intervient dans le dernier volet cite des extraits d’un journal intime du second juge Maurice Simon(décédé depuis)qui révèle des aspects qui ont été négligés par Lambert dès octobre 84.D’autre part Jean marie et sa femme qui habite maintenant dans l’Essonne ont vu la série et ont décidés de porter plainte contre un gendarme qui tient des propos sexistes sur la façon dont Christine était habillée à l’époque.
A Yves Rouxel
Yves, est ce que vous pouvez être précis et citer vraiment le film. Ce n’est pas un gendarme qui tient des propos sexiste, c’est le flic de la Criminelle qui a remplacé les gendarmes destitués idiotement par le juge Lambert. Pourquoi vous étonnez vous de la réaction de sa veuve ? La série montre qu’il a commis des erreurs lamentables, qu’il s’est mis tout à coup à jouir de cette nouvelle célébrité : la manière dont il se prépare avant les photos soi disant prises à l’improviste est consternant
c’est un documentaire mais c’est joué par des acteurs?
A MB
C’est une série documentaire qu’il faut voir. Elle met en valeur l’épouvantable intervention de Marguerite Duras, déconnectée, snob, hyper parisienne. La version dramatisée, fort bonne, avait été réalisé par Raul Peck et il faut la voir aussi
« l’épouvantable intervention de Marguerite Duras, déconnectée, snob, hyper parisienne. »
tout à fait d’accord, à l’époque je n’arrivais pas à comprendre comment ce qu’elle disait pouvait se justifier!
GREGORY/ »c’est un documentaire mais c’est joué par des acteurs? »
à Y Rouxel et Bertrand: je vous ai demandé ça parce que je ne sais pas si vous avez vu la fiche IMDB:
https://www.imdb.com/title/tt11269714
A MB
Cette fiche est totalement démente et renvoie à un téléfilm américain. Il s’agit d’une série de Gilles Marchand sans acteur
GREGORY/ à Bertrand si IMDB commence à glisser vers le n’importe quoi ça devient grave, il nous faudrait une base de données ciné qui ne dépende pas de Amazon ou autre! un ensemble créé par des passionnés, quoi.
Sinon il me reste un épisode à voir. Bon je regrette un peu la dramatisation: musique de fond à flots, corbeaux dressés dans le salon, mais le fond y est. Ah, vous avez raison ce personnage de Jean Ker sort d’un film de fiction hollywoodien, le mec pas très honnête qui… avec le temps, glisse vers l’honnêteté (Douglas dans LE GOUFFRE AUX CHIMERES?), ou semble glisser… Je voudrais souligner l’incroyable aveu 35 ans après (remords?) de l’une des deux journalistes douteux qui signe avec son mari sous 5 pseudos différents dans 5 canards différents, revenant sur son article de 1984: « alors là j’écris un article un peu hypocrite… » suggérant que C Villemin est le corbeau-criminel plutôt que les deux autres femmes suspectes, ce qui contredit le titre qui pourtant établit une égalité de suspicion pour les trois à ce sujet. Remords encore à l’âge de la retraite?
il nous faudrait une base de données ciné qui ne dépende pas de Amazon ou autre! un ensemble créé par des passionnés, quoi.
Martin,
Ce n’est certes pas Amazon qui dicte les commentaires des usagers dont certains sont des passionnés !Je viens d’en lire un sur un film de Comencini injustement peu connu « tu es mon fils » (la finestra sul luna park »)écrit sous le pseud « gerryitaly » qui m’a donné envie de le voir illico!
à Dumonteil/IMDB OK mais je ne parle que du générique absurde que j’ai mentionné, Amazon ou autre.
J’ai vu LA FINESTRA ya un bail à Chaillot hélas sans stf, je l’avais adoré quand même.
Martin,
« la finestra » est sur ciné+ actuellement en VO avec stf
c’est le plus beau rôle de Pierre TRABAUD ,loin des bondieuseries du Léo Joannon des années 50…
A DUMONTEIL
Mais Trabaud a aussi joué chez Becker, Dreville et autres. Il avait un sacré caractère et se brouillait avec plein de gens mais il était aussi chaleureux, émouvant, sensible. Jean Cosmos lui a écrit une masse de rôles épatants à la télévision et je l’ai dirigé deux fois
A BT et MB
j’ai toujours aimé TRABAUD et ses airs de chien battu c’est vrai qu’il est dans « rendez-vous de juillet » « antoine et antoinette » et « sans laisser d’adresse » ,sans oublier « la guerre des boutons » où il est un instituteur parfait;ce que je déplore ,c’est qu’il se soit perdu pour ses rôles principaux dans les films « religieux » navrants tels que « le désert de Pigalle » ou « le défroqué « ;dans ce dernier ,il est tabassé (à mort) comme il l’est dans le Comencini ;là s’arrête la comparaison:Comencini a su saisir son côté « chaleureux et sensible » dont parle BT et lui donner un rôle digne de lui ;et « la vie et rien d’autre » étant son dernier rôle de cinema ,il a pu terminer sa carrière sur une note haute ;il était aussi un habitué de « l’heure du mystère » ,une série de pièces radiophoniques .Et dans le doc « carnet de naufrage « ,condamné par la maladie ,ses yeux fiévreux sont fascinants quand il déplore qu’il ne reste qu’un cliché de lui avec Reggiani .
A Dumonteil
Et il a réalisé un beau film chaleureux qui lui ressemble, LE VOLEUR DE FEUILLES dont j’avais parlé dans ce blog. Il venait sur le plateau chaque jour après sa séance de chimiothérapie. Les deux Joannon sont un mystère mais il devait être copain avec lui tout comme Fresnay. Je ne me souviens pas qu’il m’en ai dit du bien alors qu’il était intarissable sur Becker. J’insiste encore sur certains films ou séries qu’il fit avec Jean Cosmos dont il partageait l’amour des champignons (c’était un expert). Pour la pêche c’est moins sur. Je pense à LA FILIERE, à un épisode de Julien Fontanes magistrat et à un beau téléfilm de Jean Pierre Marchand. Voila ce que j’écrivais sur son film : » Autre œuvre en marge et que l’on a beaucoup de mal à voir, LE VOLEUR DE FEUILLES, écrit, dialogué et dirigé par Pierre Trabaud, le merveilleux interprète de RENDEZ-VOUS DE JUILLET, ANTOINE ET ANTOINETTE, NORMANDIE NIEMEN et à qui je donnai un petit rôle dans LA VIE ET RIEN D’AUTRE et AUTOUR DE MINUIT. Il produisit et réalisa ce film sensible, doux-amer, attachant alors qu’il luttait contre le cancer. Comme l’écrit Philippe d’Hughes, « un ton original, en demi-teinte une interprétation subtile font de ce film injustement méconnu le digne héritier du meilleur cinéma français des années 30 et 40 ». Il faut ajouter que Trabaud est égal à lui même, Denise Grey magnifique et que Jean-Pierre Castaldi, bouleversant en colosse Steinbeckien, trouve le rôle de sa vie, à des millions de kilomètres des gugusseries auxquelles on le condamna souvent. Le dvd peut être trouvé au prix de 10 euros + 2 euros 50 de frais de port au http://www.pierrotetsesamis.fr
A BT et MB
;dans ce dernier ,il est tabassé (à mort) comme il l’est dans le Comencini (mais,je précise,il survit dans ce dernier)
à BT
Merci pour ce bel hommage à un acteur qui le méritait bien!
à BT et Dumonteil/TRABAUD/ on rencontre son regard une fois au ciné on ne l’oublie pas.
A Bertrand.effectivement il s’agit d’un policier aujourd’hui à la retraite dans le midi de la France.En revanche le photographe Jean Ker qui a sut tisser des liens proches avec Jean marie et Christine est un drole de type.Il fait une série de clichés au sein de la famille et même lors de la naissance à la maternité du petit Julien,second enfant des Villemin puis se rétracte en avouant que ce n’est pas lui qui à vendues les photos à Paris match!!
A Yves Rouxel
On le voit évoluer au cours de l’histoire et de prédateur il passe à soutien comme dans un film américain
A MB.Je n’ai pas lu l’entretien que Roman Polanski à accorder a Paris match.Signalons au passage que Jacques Chapus à l’époque de l’affaire Dominicci était salarié journaliste à Radio Luxembourg future RTL en 66.Enfin pour clore cette chronique sur le mystère de la Vologne Jean michel Bézina a été aussi journaliste sur RTL!!!
A tous.Malgré le retard de lecture que j’ai pris ,je vais essayer de lire »16 octobre »écrit par Jean marie Villemin ou il évoque l’acharnement de la presse à scandale comme Paris match ou Détective qui tirais à l’époque à plus de 2 millions d’exemplaire.
A Bertrand Tavernier : à propos de Jean Harlow, l’ouvrage PLATINE, paru chez Actes Sud est une biographie au sens strict ou une biographie romancée comme j’ai pu le lire ailleurs ?
A Edward
Aucune idée
Scénariste de « The full monthy »Sam Miller réalise en 98″Les géants »qui mérite une revision.C’est l’histoire d’une étudiante australienne a l’esprit baroudeur qui se retrouve à Sheffield en Angleterre.C’est une jeune femme libre dans sa tète qui explore le monde et les ètres qui le composent.Un jour,elle est prise en stop par Ray en plein divorce.Lui est rugueux et vit la crise tout les jours.Ray à pour mission de repeindre des tours électriques sur 23 kilomètres durant trois mois.Secondé par des copains de comptoir,Ray et Gerry(l’étudiante)vont se rapprocher et une histoire d’amour va naitre entre ces deux individus dont tout sépare.Chez Miller il y a aucun sentimentalisme mais des scènes fortes d’amours et de fraternité.La séquence la plus forte est celle ou ils vont sous des anciens chateaux d’eau transformés en douche,courir l’un après l’autre.On retrouve le regrétté Pete Postlewaithe acteur massif venu du théatre qui à eu des roles conséquents notamment dans »Usuels suspects »puis la jolie Rachel Griffith trop rare à mon gout au cinéma.
Bela Lugosi ouvre une porte, dans un petit film de 1954. Le film est « The black sleep », titre étrange dont JP Putters avait trouvé une traduction peu Verlainienne. La photographie est assez grisâtre, le décor fonctionnel, le mouvement d’appareil, minimal. Mais quand Bela Lugosi ouvre la porte (à 15’40 ») tout se transcende.Ce pourrait n’être qu’une figure persistante du has been Bela, immense acteur dont l’aura n’aura cessé de décroître dès qu’il mit le pied sur un plateau de cinéma ; on ne sait plus vraiment qui il fut au théâtre. Mais au bout de cette lente déchéance qui aura vu chaque décennie grignoter un peu plus son prestige, il reste un petit homme qui est grand, et qui dans les muscles de son dos porte tout un art disparu. Art de la présence, de la narration incarnée, et l’intelligence du corps, tout ce qui donne à ce court fragment un poids inattendu.
Je suis moins familier que beaucoup ici, de ce qu’est un acteur, mais ce matin, Bela Lugosi, en ouvrant une porte, m’aura ouvert une vue nouvelle sur ce qu’est cet art. (Dont une composante me touche, tout l’orgueil d’un artiste, dans la modestie d’un emploi. Martin Landau, dans le beau « Ed Wood » de Tim Burton ,avait, dans ce jeu troublant de l’acteur qui joue un acteur , soulevé un coin de ce voile-ci.)
PICTURE SNATCHER est très étonnant non seulement on y trouve les éléments type pre-code habituels mais on attend une rédemption du héros après toutes ses saloperies indignes qui ne viendra jamais. Le happy end du couple qui se soude à la fin n’est pas celui d’une femme qui va ramener le héros (Cagney) à l’honnëteté, quoiqu’il soit dit que celui-ci va quitter son torchon à scandales pour aller travailler dans un journal honnête (plus par accointance avec son copain, et cet engagement semple superficiel), mais le type a quand même commis qqs forfaits indignes que vous avez cités et que ce final ne signale chez lui pas le moindre regret de ceux-ci. Le héros reste un fieffé minable! On sent qu’à l’époque les stars étaient sans doute moins soucieuses de leur image pour accepter un rôle de salaud (quoique Cooper n’aurait jamais accepté le rôle et que Cagney à l’époque était moins connu mais c’était quand même après PUBLIC ENEMY qui était un grand succès?), étonnante réussite d’un cinéaste qui ne s’est pas vraiment distingué, sauf par sa vitesse de tournage dites-vous.
A ce propos de ce que vous dites de Lloyd Bacon (« on ne sait jamais vraiment dans quelle mesure il est responsable de leur réussite (ses films) tant le rôle joué par d’autres (« ») est considérable et tant son style brille par son absence »): disons que dans le cadre puissant de la production hollywoodienne de ces années les parts réalisateur-production (et par « production » je recouvre des dizaines de personnes, de départements) sont toujours ardües à établir! Un grand film de Curtiz est un grand film à 50% de Curtiz? ce qui ne fout pas en l’air tte la politique des auteurs il me semble (seulement 50%? même pas).
A MB
Curtiz comme le prouve la très bon livre de Alan K Rode était davantage interventioniste que Bacon
à Bertrand
« Curtiz comme le prouve la très bon livre de Alan K Rode était davantage interventioniste que Bacon »
oui je comprends que ces deux cinéastes ne jouaient pas dans la même cour, pour influer sur la production. Je me disais que certains éléments de choix de mise en scène pouvaient être, comme des gabarits, nés de la production, tout prêts à devoir être appliqués, moins chez Curtiz ou d’autres. Celà intervient par exemple sur les plans d’introduction après le générique: un 1er plan éloigné sur le paysage, puis d’autres pour se rapprocher jusqu’à un plan moyen sur un personnage et ça sera la même chose autant pour Bacon que pour Curtiz! C’est après que le style se révèle.
A MB
Le livre de Rode, les memos de la Warner montrent que tant Zanuck que Wallis ou Warner n’intervenaient pas souvent sur le découpage, le choix des cadres, seulement s’ils jugeaient un acteur mal éclairé ou défavorisé (Jack warner sent que Huston privilégié amoureusement Olivia de Havilland dans IN THIS OUR LIFE). Seules exceptions, le reproche récurrent fait à Curtiz sur l’abondance de ses mouvements d’appareil, ses travellings à la grue, reproches constants suivis d’interdiction qu’il ignorera superbement durant plus de 20 ans. Ils étaient surtout concernés par le respect du budget et du plan de travail (Bacon était champion dans ces deux domaines et il filmât même les répétitions ce qui plaisait à Cagney que la méticulosité de Litvak agaçait. Litvak qui était un des rares, avec Curtiz, Dieterle et Wellman à choisir lui même ses angles et le découpage que d’autres abandonnaient au chef opérateur
à Bertrand: CURTIZ BACON etc.
C’est très intéressant, je vous remercie de préciser mes affirmations non dégrossies.
à Mathieu: excellent!
Par la bande parce que ce n’est pas une réponse directe je saisis la question du montage que je voulais mentionner plus haut en tant que dicté par des règles échappant au réalisateur, en fait soumis à un département totalement indépendant, (lire là-dessus Sidnet Lumet making Movies/Faire un Film, ch.9.) mais plus que ça, l’autorité réalisateur-monteur comme on l’imagine un peu vite, était inversée puisque des règles de tournage étaient établies par le chef monteur! Le réal était tenu de filmer un plan général (master shot) statique de la scène entière, un plan moyen de la même scène entière, un plan plus près sur l’actrice parlant avec en amorce l’épaule de l’acteur qui l’écoute et vice-versa, pour toujours la même scène entière et ça continue pour les gros plans de face etc.. Voilà qui donnait toute la liberté au monteur… La pellicule était moins chère je suppose, si on avait vidé les corbeilles en prévoyant les bonus dvd!… Bien sûr Ford savait ça et filmait en conséquence, et Curtiz était trop renommé aussi pour s’incliner tout à fait. C’était les années 30-40 dans les grands studios mais je crois que le même genre de règles perdure pour les séries TV d’aujourd’hui, je me demande si pour celles-ci, dont les épisodes sont filmés par différents réalisateurs, il n’y a pas en plus une charte de la réalisation à respecter absolument par la production: imaginez une série dont un épisode serait réalisé à la Gaspar Noé et le suivant à la Bresson! J’étais lassé à voir dans les épisodes de MAD MEN toutes les conversations de groupe filmées de la même façon (mais ça, c’est aussi les séries qui n’en finissent pas suite à un bon indice d’écoute).
Il faut que je voie THE UNSUSPECTED.
A MB
Je crois que ces règles étaient moins imposées par les monteurs que par les dirigeants de studio et certains réalisateurs comme Bacon s’en félicitaient. C’était une approche généralisée. Même Powell écrit dans ses mémoires qu’il voulait échapper à l’obligation du master shot. Au départ ces règles étaient établies pour tous les réalisateurs souvent venus du théâtre qui débutaient dans le parlant. Cela les encadraient. Très vite les chefs opérateurs ont décidé de jouer un role et Kazan raconte que pour son premier film, son chef opérateur lui demande ce qu’il veut obtenir, son idée de la scène. Et après l’avoir entendu, lui propose des idées de plan excellentes. Kazan ajoutait qu’il n’a commencé à choisir les angles et la place de la caméra que sur PANIQUE DANS LA RUE. Les réalisateurs venus du muet ne suivaient pas ces règles. Ni beaucoup de cinéastes étrangers. Curtiz et Dieterle préparaient chez eux le découpage des scènes souvent sur des maquettes du décor et avec l’aide de leurs femmes dont l’apport créatif était réel. Celle de Curtiz traduisait en hongrois les finesses du scénario. Ils passaient du coup pour des tyrans et pouvaient être brutal avec les techniciens
merci Bertrand, très intéressant
je vais chercher un peu des bouquins sur l’histoire des studios, les gros bouquins comme MGM story, me semblent rester à la surface.
A MB
Tout à fait. J’avais beaucoup aimé le recueil des Memos de la Warner mais le Studio l’a ensuite bloqué. Je crois que c’est Rudy Belhmer qui l’avait fait. On lui doit une très bonne interview de Hathaway dans Scarecrow press je crois où il faut lire le livre d’entretiens avec Byron Haskin
« J’avais beaucoup aimé le recueil des Memos de la Warner mais le Studio l’a ensuite bloqué. Je crois que c’est Rudy Belhmer qui l’avait fait. »
ça doit être « Inside Warner Brothers, 1935-51 » de toute façon je viens de le commander!
Behlmer a fait aussi « Memo from Darryl F. Zanuck: The Golden Years at Twentieth Century-Fox »
Il avait fait aussi les Memos de Selznick qui ceux-ci sont parus en français.
Le bouquin où il a interviewé Hathaway est sur ma liste depuis un bail mais un peu cher.
merci pour les infos
A MB
Les memos de Selznick sont, de loin, les moins intéressants. Il se perd dans des interminables notes sur le maquillage, la coiffure, les costumes, ne semble jamais reconnaitre le style d’un réalisateur. Il fait toujours passer les détails avant l’ensemble, prenant souvent des décisions idiotes (Louis Jourdan ou Peck dans le PROCES PARADINE) Powell, Huston, Vidor disent tous qu’ils ne les lisaient pas et le livre de Charles Drazin sur le TROISIEME HOMME met en lumière tout ce qui sépare Selznick de Korda. Les Memos de Zanuck sont plus acérés, intelligents même s’il se trompe (son montage de MY DARLING CLEMENTINE est dans l’ensemble moins fort et inventif que celui de Ford, notamment dans l’utilisation de la musique). Il cerne le style, les points forts des cinéastes
A Bertrand:
J’ai vu récemment PINKY que je ne connaissais pas et qui vaut à mon avis mieux que sa réputation et j’ai été frappé entre autres par la beauté visuelle du film, que j’ai attribuée à McDonald plus qu’à Kazan. Je pense notamment à un plan fixe de Pinky, vêtue de son uniforme blanc d’infirmière, seule au balcon de la vieille maison patricienne et décrépite apres avoir passé la nuit à veiller Ethel Barrymore. C’est un plan à la fois très beau plastiquement, un plan de directeur photo, mais en même temps signifiant et servant la dramaturgie du film.
A Mathieu
Le film est quand même timoré, indécis dramaturgiquement. Le dramaturge noir Carleton Moss abandonna le projet car il détestait l’approche du sujet. Il venait de collaborer avec Stuart Heisler sur le documentaire THE NEGRO SOLDIER IN WW2 où il joue le pasteur et prononce un prêche unique pour l’époque
à Bertrand: voir MY DARLING CLEMENTINE dans la version Ford avait été une révélation, je ne savais pas qu’il pouvait approuver si peu de musique, et surtout si peu de musique tintamarre! j’adore cette version.
D’où je me disais que le volume de musique entendue dans ses autres films était parfois de trop mais malgré tout approuvée par lui, croyant qu’il avait tout le contrôle et qu’il aimait trop la musique surlignante. Mais à lire la bio de Actes Sud (McBride) on voit que si les deux s’entendaient s’appréciaient, JF ne faisait pas ce qu’il voulait en 1946. A réécouter le bonus de Clementine dans le dvd de 2006 (20th century fox) on voit que le memo que Zanuck lui adresse pour ses critiques, prend des gants mais est très clair sur les désaccords…
Ce bonus de R Gitt qui compare les versions Ford-Zanuck, repris du Criterion, est très intéressant, en plus de montrer ces deux versions et je parle bien du dvd z2 de 2006/2 disques je ne sais pas si on le trouve encore (en couv Fonda assis sur le porche du saloon):
https://www.dvdfr.com/dvd/f22136-poursuite-infernale.html
voilà pour les précisions!
A Bertrand:
Je n’ai pas trouvé PINKY si timoré que cela, beaucoup moins en tous cas que GENTLEMAN’S AGREEMENT que je trouve vraiment raté, faussement courageux, à coté de la plaque et finalement terne et ennuyeux. PINKY a le mérite entre autres de montrer le racisme comme un phénomène qui contamine la société toute entière, pas seulement le Sud, et pas seulement les « petits Blancs » pauvres et sans éducation. Le fiancé de Pinky est un médecin du Nord (NY je crois) et tout ce qu’il peut proposer à Pinky c’est de s’établir apres leur mariage à Denver, loin de leurs familles et relations respectives, dans un lieu où personne ne les connait. Et le film rend bien compte je trouve de l’inextricable de la situation, de l’enfermement racial et social auquel est condamnée Pinky.
Dans d’autres films dénoncant le racisme, celui-ci semble ètre plus le fait d’individus, de pauvres Blancs dégénérés, de « White Trash » que d’une société toute entière. C’est le cas de TO KILL A MOCKING BIRD ou de NO WAY OUT, autre production Zanuck à peu près contemporaine de PINKY, et que j’ai revu récemment, et que j’ai encore moins aimé que la première fois, alors que comme la plupart des cinéphiles j’aime beaucoup les autres films de Mankiewicz de cette période (Fox noir et blanc, moins après).
NO WAY OUT résume pour moi de facon caricaturale une certaine attitude de bourgeois libéral cultivé vis à vis du racisme, vu comme comme étant l’apanage de pauvres blancs ignorants. Dans NO WAY OUT, seul le voyou incarné par Widmark est raciste, hystériquement, pathologiquement raciste, les autres personnages (y compris les flics) ne manifestent aucun signe de racisme, et bien sûr pas le gentil medecin humaniste incarné par McNally. Comme si l’Amerique blanche, libérale et éclairée se défaussait de tout péché de racisme en le reportant sur le « white trash » incarné jusqu’à la caricature par Widmark.
Quelques décennies plus tard…
Un film qui rend justice au pauvre Blanc sudiste malmené par une partie de la littérature et du cinéma américain, c’est LOVING de Jeff Nichols (même si ce n’est sans doute pas le meilleur film de son auteur), qui montre un pauvre Blanc qui n’est pas raciste parce qu’il n’est pas assez éduqué pour cela. C’est en tout cas comme ca que le voit le flic qui le persécute. Loving ne sait pas, a oublié qu’on ne doit pas se mélanger avec les races inférieures. Dans son discours, le flic renvoie Loving à son quartier d’origine, où pauvres Noirs et pauvres Blancs vivent mélangés, où les Blancs sont dégénérés, ont oublié leur valeurs blanches, leur éducation blanche. Dans NO WAY OUT, c’est le gentil humaniste McNally qui renvoie Widmark à son quartier pauvre, « basket of deplorables » forcément violents et racistes.
A Mathieu
Mais montrer le raciste comme un dégénéré violent et brutal, c’était aussi s’opposer à l’image prédominante du Sudiste romantique, se dressant contre le pouvoir du Nord et étant accessoirement raciste mais de manière chevaleresque. C’est montrer que le racisme est une tare. C’est combattre une idéologie alors triomphante qui reléguait le racisme à l’arrière plan comme le montrent presque tous les films sur la guerre de Secession où la question de l’esclavage est à peine mentionnée. Et LOVING est un grand film
à Mathieu: NO WAY OUT je ne sais pas mais MOCKINGBIRD (DU SILENCE ET DES OMBRES? c’est la palme d’or du titre français le plus crétin!!!) n’est pas un film qui prétend faire une thèse sur le racisme et établir la liste lourdingue des arguments contre (ce n’est pas non plus ce que vous dites je grossis le trait exprès), c’est une aventure individuelle qui narre la formation de l’esprit de l’enfant, de sa morale, comment son horizon s’élargit, ce qui lui permet, dans ce qu’il découvre dans la vie, de faire enfin la part des choses: celui qui est laid ou repoussant n’est pas pour autant qqn de dangereux ou malfaisant, ce qui fait peur peut faire peur à tort, le violeur peut avoir l’air beaucoup plus « normal » que le fils du voisin qui ne sort que la nuit et effraie par son aspect (Robert Duvall) alors qu’on peut constater qu’il peut vous aider, vous aimer.C’est par le comportement dans la vie quotidienne des personnages, la façon de le filmer que Mulligan met tout à plat et place côte à côte Blanc et Noirs, nul besoin de lister les avanies des racistes et les qualités de leurs victimes. D’ailleurs les films à thèse en général se concentrent sur les personnages de Noirs innocents et victimes là, c’est une fois acquis le spectacle de la vie quotidienne vue de façon large, que le procès du Noir innocent peut avoir lieu, résonance d’autres procès habituels des films antiracistes mais procès qui n’est pas le départ dramatique du film. Notez qu’il y a autant de Blancs victimes sociales avec les personnages de Duvall et celui du gamin blanc issu d’un milieu pauvre et qui ne mange pas toujours à sa faim, que la famille de Peck héberge (là le regard de la petite fille se montre encore étroit et ignorant de la réalité sociale, car elle ne voit pas de mal à brocarder le gamin qui met trop de confiture sur ses tartines (ou un truc du genre) du coup elle se fait engueuler et par son père et par la servante noire! (étonnante Mary Badham la fille de Peck). Tiens vous avez eu raison de le citer je vais le revoir!
A MB
Très bonne analyse
« s’opposer à l’image prédominante du Sudiste romantique, se dressant contre le pouvoir du Nord et étant accessoirement raciste mais de manière chevaleresque. »
très important! la meilleure scène de AUTANT EN EMPORTE LE VENT (je dirais la seule, heureusement c’est au début) c’est la confrontation entre les jeunes coqs va-t’en-guerre (exactement ça le côté « noble », chevaleresque, la morgue inconsciente, le racisme réel et en veilleuse) et Gable qui a les pieds sur terre.
On voit pas assez de peinture de l’esprit du Sud dans les films américains des 30-40-50 et même 60, dans les films sur la guerre civile la question est réduite à l’esclavagisme au combat contre les anti-esclavagistes, supposés être anti-racistes (par ailleurs et pour le plaisir une scène brillante, précurseuse, de L ESCLAVE LIBRE montre un officier du Nord un peu borné face à Poitier qui mentionne pour lui-même « son sens de l’infériorité », l’autre ne comprend pas l’ironie). On ne voit que peu le côté économique et social, d’ailleurs je ne connais pas assez ce sur quoi repose l’anti-esclavagisme du Nord. On ne peut bien sûr affirmer qu’il ne reposait QUE sur un idéal pro-égalitarisme!
A MB
Même cette question de l’anti esclavagisme est passé sous silence ou à peine effleuré dans la plupart des films dont l’idéologie est souvent pro sudiste. L’anti esclavagisme, l’abolitionnisme comprenait plus sieurs courants obéissant à des convictions morales, humanistes, religieuses. Et ses chefs n’étaient pas toujours d’accord. On sent très bien cela dans LE POURFENDEUR DE NUAGES de Russell Banks, très belle ouvrage frictionnel à partir de faits et de personnages historiques notamment John Brown, figure complexe (son engagement, son dévouement à la cause, sa générosité co existait avec une intransigeance,un entêtement, une rigidité) qui fut honteusement caricaturé dans plusieurs films
à Bertrand: ce blog est très enrichissant c’est de votre faute.
D’autre part, parfois on reçoit un compliment, ce qui est cool.
« Même cette question de l’anti esclavagisme est passé sous silence ou à peine effleuré dans la plupart des films dont l’idéologie est souvent pro sudiste. »
j’aurais dit le contraire!
A MB
Oh non, dans presque tous les westerns, de LA PISTE DE SANTA FE à LA MAITRESSE DE FER, les Sudistes sont chevaleresques et héroïques. Cooper est un combattant sudiste dans VERA CRUZ, Wayne dans LA PRISONNIERE DU DÉSERT (où le propos devient plus noir, plus critiques) comme Ben Johnson dans les autres westerns de Ford. Y compris dans des bandes de série comme SOUTH OF SAINT LOUIS. Ne parlons pas des deux biopics sur Brown, la PISTE DE SANTA FE et SEVEN ANGRY MEN, ce dernier plus intéressant (DVD a Warner Archive). Quelques scénaristes « progressistes » écriront des personnages de héros nordistes dans des westerns comme FORT BRAVO tandis qu’une grande partie de la production recycle l’idéologie de NAISSANCE DU NATION moins l’apologie du KKK. Les Nordistes sont des carpetbaggers, des profiteurs de guerre. Randoph Scott passa d’un camp à l’autre, avec une majorité de héros sudistes
Dans une interview àPlayboy en 1971, Wayne avait dit: “0n ne peut pas tout d’un coup se mettre à genoux et donner tout à diriger aux Noirs ». « Je crois à la suprématie blanche tant que les Noirs ne seront pas formés au point de pouvoir exercer des responsabilités. Je ne pense pas qu’il faille donner des places de directions et de jugement à des gens irresponsables ». Aussi horrible que cela puisse apparaître aujourd’hui, je me demande s’il se pensait raciste ou si, comme vous l’évoquiez à travers les derniers échanges sur le sujet, c’était une logique de pensée associée à son temps dans son contexte qui transpirait dans les films sans filtre moral …
A Frank F
Ces propos dérangeants sont en contradiction avec la manière dont Wayne traitait ses partenaires noirs qui ont livré de nombreux témoignages le montrant plein d’empathie et de respect. Il restait très conservateur et n’aurait pas voulu d’un président noir mais il était plus ouvert lors de relations quotidiennes
A Bertrand.
Effectivement, d’où l’intérêt de la perspective de l’époque et du contexte dans le jugement moral de certains acteurs ou réalisateurs de l’époque, même si certains furent abjects. Je me demande si et à quel points ces derniers traduisaient leurs préjugés dans des films de type western qui n’étaient censé que divertir, et si ce romantisme sudiste avait parfois des relents engagés .
A F Fortet
Très bonne question. Difficile d’y répondre. Certains cinéastes étaient ouvertement conservateurs (Sam Wood et des tas d’autres qui ont soutenu De Mille contre Mankiewicz- mais d’autres se plaint aux diktats financiers (peur de ne pas être distribué dans le Sud si on prenait trop position) et d’autres luttaient (Wellman dans OX BOW, Wise, Zinneman) parfois de manière oblique (Tourneur)
à Bertrand: je crois que j’avais oublié les 10.000 westerns que j’ai vus, je pensais plus aux films qui ont pour cadre la guerre civile, c’est vrai que beaucoup de westerns commencent APRES la fin de celle-ci pour peindre des héros désenchantés et magnifiques par là même. J’ai découvert récemment GUN FURY de Walsh et face à Rock Hudson, un peu terne, un acteur moins connu, Phil Carey, vole les scènes à Hudson en jouant le méchant avec la brillance de l’ex officier de la guerre civile, amer et suicidaire. Ce film que j’avais toujours loupé est d’ailleurs à marquer d’une pierre blanche, excellent!
A MB:
Bien sûr TO KILL A MOCKINGBIRD est beaucoup plus que ce que j’en disais mais en me promenant sur Internet je tombe sur ceci qui confirme mon sentiment, une citation du livre de l’historienne Nancy Isenberg: « White Trash: The 400-Year Untold History of Class in America ».
» The Ewell family in Harper Lee’s “To Kill a Mockingbird” (1960) may be American literature’s purest distillation of white trash, emblematic of how ‘redneck’ had come to be synonymous with an almost insane bigotry.”
Si le sujet vous interesse, je vous conseille la lecture du long article « White trash » de la version anglaise de Wikipedia et du très court article de la version francaise que je copie-colle presqu’intégralement:\
« White trash, littéralement « déchet blanc/raclure blanche », est un terme d’argot américain désignant à l’origine la population blanche pauvre.
Le terme date du milieu du xixe siècle . Il était alors tout particulièrement utilisé par l’Américain digne et laborieux pour désigner des Blancs dont on jugeait — par dérision ou non — qu’ils se situaient entre la bête et l’esclave, mais sans leurs avantages respectifs, car improductifs. Ceux qui sont appelés white trash sont souvent dépeints par les milieux progressistes urbains comme pauvres, avec un niveau d’éducation bas, de mauvaises manières et un manque général d’intérêt pour les questions de société et la culture. Ils sont souvent stéréotypés comme des personnes en surpoids avec beaucoup d’enfants, une mauvaise hygiène et des problèmes d’alcoolisme, de drogue ou de tabagisme.
Ils sont politiquement classés comme conservateurs par les gens de catégories sociales plus élevées, bien qu’en réalité il n’y ait aucune idéologie officielle : en effet des rappeurs comme Eminem, Big B ou Everlast n’ont rien en commun avec des membres du gang Nazi Lowrider, bien qu’ils soient tous considérés comme appartenant à la catégorie des white trash. »
On peut y voir (dans l’article en anglais) que le concept, ou plutot le mythe, a une longue histoire et que le personnage de Widmark ou la famille Ewell dans TO KILL… s’inscrivent dans cette construction mythologique, et qu’un film comme LOVING, retrouve un pan de la réalité derrière le mythe.
Cette construction mythologique du white trash est finalement elle-même raciste. je cite Wikipedia:
« White supremacist Daniel R. Hundley’s 1860 book Social Relations in Our Southern States includes a chapter entitled « White Trash ». He used the supposed existence of poor whites with bad blood to argue that genetics and not societal structure was the problem, and that therefore slavery was justified. He called white trash the « laziest two-legged animals that walk erect on the face of the Earth », describing their appearance as « lank, lean, angular, and bony, with … sallow complexion, awkward manners, and a natural stupidity or dullness of intellect that almost surpasses belief. »
Si le pauvre Blanc est si détestable au yeux du Blanc éduqué, c’est qu’il est selon lui une insulte à la race blanche naturellement supérieure, il ne peut être que dégénéré.
A Bertrand:
LOVING est un très bon film mais où Nichols n’est peut-être pas aussi libre et original que dans SHOT GUN STORIES ou MUD, par fidélité envers la vérité historique, et l’acteur principal n’a pas la présence d’un Michael Shannon (qui n’aurait pas convenu au rôle).
Je persiste à penser que Mankiewicz ne fait que remplacer le mythe du sudiste chevaleresque développé dans la culture populaire par celui du white trash violent et hystériquement raciste.
Mais ma critique de NO WAY OUT n’est pas qu’idéologique. le film et les dialogues notamment me paraissent lourds et artificiels, notamment ceux entre McNally et Linda Darnell, Mankiewicz semble avoir perdu toute sa verve et son ironie et je trouve Widmark carrément pénible à la fin.
L’expression « basket of deplorables » que je citais est celle que Hillary Clinton a utilisée en 2016 pour qualifier les supporters de Trump pendant la campagne présidentielle et désignant clairement ce qu’elle considère comme « white trash ». Je vois une continuité dans l’attitude d’une certaine intelligentsia américaine libérale qui s’exprime à mon avis dans NO WAY OUT et dans l’attitude de Clinton.
Dans la même idée, j’ai été également déçu par THE INTRUDER de Corman, qui promet beaucoup par son tournage en décors réels mais qui ne tient pas la route je trouve par son scénario et ses dialogues qui ne sonnent pas juste et qui n’est pas non plus trés bien joué par son acteur principal, et qui là aussi exploite le mythe white trash avec un regard appuyé sur les pauvres blancs du sud forcément racistes mais aussi forcément laids et portant les stigmates de la dégénérescence.
A Mathieu
Là vous êtes trop dogmatique. NO WAY OUT vaut mieux que ce que vous en dites et dans THE INTRUDER le personnage principal n’appartient pas à la white trash. C’est quelqu’un qui a été idéologiquement formé pour mener des actions racistes, semer le trouble, organiser le désordre. Comme les gens de la John Birch Society. Il agit comme un VRP du racisme. Rien à voir avec un pauvre blanc illettré
à Mathieu
« Le terme date du milieu du xixe siècle . Il était alors tout particulièrement utilisé par l’Américain digne et laborieux pour désigner des Blancs dont on jugeait (…)qu’ils se situaient entre la bête et l’esclave »
ça ressemble au regard de la société victorienne (de la reine elle-même qui s’exprima là-dessus avec sottise et haine) sur la classe pauvre.
Dans mon souvenir du film, j’avais occulté la famille Ewell sauf pour le gamin qui vient dîner chez les Finch et qui se fait moquer par la petite fille (je crois qu’il s’agit bien du fils Ewell).
il est donc temps de le revoir ce film.
pour LOVING, très étonnante cette innocence du héros par rapport au racisme, sinon ce mélange cette touche de solidarité blancs-noirs (la sage-femme blanche se charge de l’accouchement de la femme noire), sans doute justement créée par l’influence d’être dans la même pauvreté.
Une scène importante est dans le bar (alors que Magic Sam chante « my love will never die ») quand un copain noir rappele à Loving que la vie est quand même plus facile pour lui, qui est blanc, Loving ne perçoit pas de quoi l’autre veut parler.
A MB:
Parmi la conjonction de talents réunis pour produire ces films Warner au style si remarquable, il y a aussi je crois les monteurs, qui participent beaucoup au rythme des films, surtout dans le cas de réalisateurs moins personnels comme Bacon. Par exemple dans PICTURE SNATCHER quand Cagney, poursuivi, saute de voiture. Autrefois je trouvais que ces scènes d’action ultra-speedées étaient « walshiennes » quand je les voyais dans des films de Walsh de la Warner, mais on les trouve autant chez Keighley (l’excellent G-MEN), Bacon et d’autres. Chez Curtiz, le plus souvent, son découpage et ses conjonctions de mouvements de caméra dictent le montage. On peut trouver des tas d’exemples notamment dans ANGELS WITH DIRTY FACES, KID GALAHAD, THE UNSUSPECTED, dont les premiers plans sont pour cel
à assez époustouflants. Claude Rains, écrivain d’histoires policières, récite son histoire dans un studio de radio. Mouvement d’appareil vers un haut-parleur. Du noir du tissu recouvrant le haut-parleur surgit un train. Dans un compartiment de ce train un homme écoute la même émission de radio sur un poste à transistors. Quand le train traverse une ville, la caméra se déplace vers la fenêtre du train, passe
à travers celle ci, et se met à suivre en travelling avant une rue perpendiculaire à la ligne du train, suit la rue jusqu’à un hôtel, monte de l’extérieur les étages de l’hôtel pour se retrouver dans une chambre plongée dans l’obscurité où un homme écoute la même émission de radio. L’histoire révelera que les destinées des trois personnages, Rains, l’homme dans le train et celui dans la chambre de l’hôtel sont liées..